Aujourd’hui, vendredi 16 juin, la contribution de Guy (Première S2)

Pour la troisième année consécutive, l’exposition « Dis-moi un Po-aime » est de retour ! Les classes de Première S2 et Première STMG2 du Lycée en Forêt sont fières de vous présenter cette édition 2017 qui a tout d’un grand millésime : l’exposition a été l’occasion d’un travail soutenu mêlant inspiration, invention et revendications intellectuelles ou esthétiques.

Chaque poème est accompagné d’une note d’intention dans laquelle les auteur-e-s expliquent leurs choix esthétiques, précisent le fil conducteur méthodologique, éclairent certains aspects autobiographiques… Le travail ainsi entrepris permet de pousser la lecture de la poésie au-delà des lieux communs pour en faire une authentique quête de vérité. Loin de la lire de l’extérieur, le lecteur curieux pourra au contraire chercher le sens profond que les jeunes auteur-e-s ont voulu conférer à cette expérience esthétique et littéraire. 

Plusieurs fois par semaine jusqu’au début du mois de juillet, les élèves vous inviteront à partager une de leurs créations poétiques…

Bonne lecture !

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Aujourd’hui, vendredi 16 juin, la contribution de Guy S.
(Première S-2)

 Samedi 17 juin : Célia L. (Première S-2) ; Cassandre P. (Première STMG-2)

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« La Foule »

par Guy S.
Classe de Première S-2

Obligé d’exprimer des choses que je ne pense pas,
De suivre les autres sans être moi,
Être affecté, identique et semblable à la foule,
Je m’invente un personnage qui ne me ressemble pas.

Cette peau fabriquée par malheur me censure,
Qui chagrin, peur et souffrance me procure.
Cependant, espérant pouvoir continuer,
Je paie ce désastre qui n’est pas limité.

Je me fais envahir par ces vagues de pensée
Qui obligent la mienne aux autres ressembler
Par la richesse d’un simple oubli
Fait parfois tout perdre et cette personnalité aussi.

Obligé de suivre le monde avec ce que j’ai,
J’écris mon histoire, et avec grand succès,
Mieux vaut être soi-même
et devenir un emblème.

Auguste Rodin (Paris 1840 − Meudon 1917), « La Pensée », c. 1893-1895
|Source : Musée Rodin|

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Le point de vue de l’auteur…

Comme nous le montre très bien le titre (« La Foule »), j’ai rédigé un poème sur un phénomène qui nous suit partout : la société, notamment les conditionnements existentiels. La peur d’être rejeté par les autres ou les groupes sociaux dominants fait que nous abandonnons parfois notre personnalité, nos valeurs propres. Nous avons peur d’être censurés et ainsi oublions d’affirmer qui nous sommes.

Afin d’écrire ce poème, j’ai laissé tout d’abord mes pensées s’exprimer. Puis j’ai structuré mon texte en causes et conséquences. Ainsi, la première partie du poème cherche à expliquer la situation actuelle du monde moderne, qui nous oblige à nous comporter de façon trop souvent stéréotypée : il faut plaire aux autres avant de plaire à soi-même. La deuxième partie du texte nous montre les conséquences de cette société sur les personnes qui la suivent obstinément, et sont ainsi dans la souffrance de ne pouvoir être elles-mêmes.

Tout au long du poème, on observe des mots et des sonorités qui se répètent. Bien évidemment, ces répétitions sont voulues : elles expriment la répétition de la société, jusqu’à ce que la personne qui suit cette société décide enfin de penser par elle-même. Par la suite, j’ai amélioré le poème en travaillant les figures de style. Ainsi, l’énumération du vers 3 (« Être affecté, identique et semblable à la foule ») m’a permis d’accentuer l’idée que je voulais faire passer. De même, j’ai essayé de faire une gradation ternaire au vers 6 (« chagrin, peur et souffrance ») afin de mieux transmettre au lecteur les sentiments que je ressens.

© Guy S.
Classe de Première S-2 (promotion 2016-2017), juin 2017.

Espace Pédagogique Contributif

Aujourd’hui, vendredi 16 juin, la contribution de Rim et Sarah (Première STMG2)

Pour la troisième année consécutive, l’exposition « Dis-moi un Po-aime » est de retour ! Les classes de Première S2 et Première STMG2 du Lycée en Forêt sont fières de vous présenter cette édition 2017 qui a tout d’un grand millésime : l’exposition a été l’occasion d’un travail soutenu mêlant inspiration, invention et revendications intellectuelles ou esthétiques.

Chaque poème est accompagné d’une note d’intention dans laquelle les auteur-e-s expliquent leurs choix esthétiques, précisent le fil conducteur méthodologique, éclairent certains aspects autobiographiques… Le travail ainsi entrepris permet de pousser la lecture de la poésie au-delà des lieux communs pour en faire une authentique quête de vérité. Loin de la lire de l’extérieur, le lecteur curieux pourra au contraire chercher le sens profond que les jeunes auteur-e-s ont voulu conférer à cette expérience esthétique et littéraire. 

Plusieurs fois par semaine jusqu’au début du mois de juillet, les élèves vous inviteront à partager une de leurs créations poétiques…

Bonne lecture !

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Aujourd’hui, vendredi 16 juin, la contribution de Rim et Sarah Z.
(Première STMG-2)

 Vendredi 16 juin : Guy S. (Première S-2)

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« Kelbi  ileyka ya Fès »

par Rim Z. et Sarah Z.
Classe de Première STMG-2

Fés, ma chère ville,
Là-bas ton soleil éclaire le sourire de mes parents,
N’brick bezeef Fés,

Quand je suis avec toi mes problèmes s’envolent dans ton vent
Comme l’odeur du tajine que Jedda vient de sortir du four
Tu m’as vue grandir, tu me manques déjà,
J’aimerais entendre encore les cris d’Oumy qui appelle
Les enfants pour qu’ils rentrent,

Malgré la distance je resterai ton enfant.

Je me rappelle que les lumières m’éclairaient la nuit dans la Médina
Le marchand au loin criait « Djellaba pas chère Madame,
Cinq dirham, ti belle viens essayer »
Il me faisait rire avec son accent… Si loin maintenant…
Tes enfants ne pleurent jamais, ils sont toujours heureux

La couleur de ton ciel me redonne la joie,
Tout l’amour que tu m’as donné… Tu mérites aussi mon amour :
Alors j’aimerais te dire N’ brick bezeef n’mout haylik.

Le quartier des tanneurs à Fès… 
|Source : Office du Tourisme du Maroc|

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Le point de vue des auteures…

Ce poème s’intitule « Kelbi  ileyka ya Fes » qui pourrait signifier en Français « J’ai donné mon cœur à Fès ». De fait, le texte évoque notre enfance au Maroc, pays de nos origines. Située à 180 km à l’est de Rabat, entre le massif du Rif et le Moyen Atlas, la ville de Fès fait partie des villes impériales du Maroc.

Considérée encore de nos jours comme sa capitale spirituelle, elle témoigne d’un extraordinaire patrimoine culturel qui lui a permis d’être classée au patrimoine mondial de l’UNESCO. Qui n’a pas entendu parler de la grande mosquée Quaraouiyine, des célèbres mosaïques, du bleu de Fès ou du vert des minarets, des tanneries de l’ancienne médina, ou des fabriques de caftans ?

Pour évoquer notre amour de Fès, nous avons voulu également faire référence à des réalités plus quotidiennes qui sont celles de la médina : de cette mosaïque de paysages, de parfums d’épices et de couleurs, nous avons retenu quelques mots qui permettent d’ancrer le texte dans le charme et l’authenticité :

Je me rappelle que les lumières m’éclairaient la nuit dans la Médina
Le marchand au loin criait « Djellaba pas chère Madame,
Cinq dirham, ti belle viens essayer »

De même, nous avons voulu transmettre un message rempli de joie et de sentiments, avec les femmes qui préparent le tajine ou les mères appelant les enfants dans la rue pour qu’ils viennent manger… Comme un repas que l’on partage, nous avons écrit ce poème pour faire partager au lecteur quelques unes de nos émotions les plus intenses et les plus intimes. Le lyrisme qui parcourt tout le texte permet ainsi de mettre en avant nos sentiments si forts par rapport à cette ville, qui est pour nous le lieu des origines et de l’enfance.

Évoquer cette ville, c’est donc en quelque sorte avoir une mémoire, c’est ne pas oublier qui l’on est et d’où l’on vient. Au vingt-et-unième siècle, cette conscience du passé est essentielle. Chaque endroit de Fès, chaque rempart de la médina parle à notre âme, raconte une histoire, raconte une mémoire…

Voici pourquoi cette évocation de Fès a été aussi pour nous l’occasion de réfléchir au sens de la poésie. Écrire un « po-aime » pour reprendre l’intitulé de cette belle exposition, c’est aussi chercher à se comprendre soi-même, dans la mesure où la poésie réunit le langage, l’art et la spiritualité…

© Rim Z. et Sarah Z.
Classe de Première STMG-2 (promotion 2016-2017), juin 2017.

Espace Pédagogique Contributif

Aux alentours de Fès…
|Source : Office du Tourisme du Maroc|

Aujourd’hui, vendredi 16 juin, la contribution de Jeanaïs (Première S2)

Pour la troisième année consécutive, l’exposition « Dis-moi un Po-aime » est de retour ! Les classes de Première S2 et Première STMG2 du Lycée en Forêt sont fières de vous présenter cette édition 2017 qui a tout d’un grand millésime : l’exposition a été l’occasion d’un travail soutenu mêlant inspiration, invention et revendications intellectuelles ou esthétiques.

Chaque poème est accompagné d’une note d’intention dans laquelle les auteur-e-s expliquent leurs choix esthétiques, précisent le fil conducteur méthodologique, éclairent certains aspects autobiographiques… Le travail ainsi entrepris permet de pousser la lecture de la poésie au-delà des lieux communs pour en faire une authentique quête de vérité. Loin de la lire de l’extérieur, le lecteur curieux pourra au contraire chercher le sens profond que les jeunes auteur-e-s ont voulu conférer à cette expérience esthétique et littéraire. 

Plusieurs fois par semaine jusqu’au début du mois de juillet, les élèves vous inviteront à partager une de leurs créations poétiques…

Bonne lecture !

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Aujourd’hui, vendredi 16 juin, la contribution de Jeanaïs (Première S-2)

 Vendredi 16 juin : Rim et Sarah Z. (Première STMG-2) ; Guy S. (Première S-2)

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« Vie éternelle »

par Jeanaïs B.
Classe de Première S-2

Il est parti un jour vide et glacé
Un jour sans aujourd’hui, sans lendemain.
Il prit un bateau, un dernier bateau
pour quitter ce monde.

Dès lors il légua des larmes :
Défense, Résistance, Justice
De pauvres larmes contre le monde entier,
Monde de satire et de simulacres.

Ses larmes étaient de véritables amies :
Leurs gestes demeurent inoubliables
Une noyade dans un océan de peur et d’armes
L’absence, le souvenir permettent d’apprendre

Le courage n’est pas l’absence de peur,
Mais la capacité de la vaincre
Désormais parti, il devient voyant
Il perçoit objectivement le monde hermétique

Où les hommes résident aujourd’hui
L’existence humaine est un long voyage
Vers la vie éternelle
Et le matin du ciel.

Illustration : « Vie éternelle », © Bruno Rigolt, juin 2017 (Photomontage et peinture numérique)

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Le point de vue de l’auteure…

J’ai rédigé ce texte au mois de mai 2017 dans le cadre d’un atelier d’écriture poétique consacré à la quête du sens en poésie. Dans ce poème, différents thèmes apparaissent comme le voyage, le souvenir et la conscience mémorielle, ou encore la réflexion sur le sens même de la condition humaine.

C’est tout d’abord la thématique du voyage qui domine le texte. De fait, dans la première strophe on retrouve trois indices du voyage : « il est parti », « il prit un bateau » et « pour quitter ce monde ». Plus que le voyage réel, c’est la dimension métaphorique du voyage qui apparaît, en référence à la vie humaine. Le voyage vers l’outremonde est comme le contrepoint du monde réel, fait « de satire et de simulacres » (v.8), « monde hermétique » (v. 16) du conformisme banal et sclérosé. Monde adulte, inaccessible à la poésie et à la pureté de l’enfance.

C’est ainsi que de nombreux aspects font évidemment référence au thème du poète maudit : au même titre que Baudelaire ou Rimbaud, Nerval Lautréamont, le poète maudit a ouvert la poésie à la quête de l’idéal : comme le suggère la thématique maritime présente dans le texte sous forme de métaphore filée, le poète maudit est l’homme du mouvement perpétuel entre le flux et le reflux, le spleen et l’idéal, la foi et le doute : vivant en marge d’une société dans laquelle il ne se reconnaît plus, il préfère partir « un jour vide et glacé/Un jour sans aujourd’hui, sans lendemain ».

Quitter une société dans laquelle il ne se sent pas en accord et trouver un monde meilleur est pour lui la seule solution qu’il trouve pour recouvrer son identité. Dans le texte, l’idéal fait référence au paradis. Cette image du bateau qui part fait également songer au poème de Rimbaud « Le bateau ivre ». Le départ s’apparente en quelque sorte à une quête d’authenticité, fût-elle vaine et quelque peu absurde : puisse le lecteur comprendre le sens profond que j’ai voulu exprimer ici et l’hommage que j’ai voulu rendre à celles et ceux partis trop tôt, de l’autre côté de la terre, parce qu’ils désespéraient de l’inanité du monde.

Cette thématique est renforcée au vers 9 par une métaphore très suggestive : « ses larmes étaient de véritables amies ». Personnifiées, les larmes s’hyperbolisent au point de devenir une « noyade dans un océan de peur et d’armes ». Mais ce naufrage débouche sur une renaissance, au sens rimbaldien du terme, car « Je est un autre ». Comme le suggère très explicitement le vers 15, « Désormais parti, il devient voyant ».

Cet aspect du texte est évidemment fondamental car il appelle à un devoir de mémoire : il nous appartient, dans un monde fait d’indifférence et d’oubli, de nous souvenir. La poésie assume ainsi une fonction mémorielle consistant à écrire pour ne pas oublier, mais aussi et surtout pour faire revivre l’autre : marquée par de nombreux enjambements pour suggérer cette dynamique du souvenir, la dernière strophe confère à l’écriture poétique un rôle didactique. Mais point ici de morale sclérosante : si morale il y a, c’est une morale du cœur. Il est écrit au vers 18 « L’existence humaine est un long voyage » : ce voyage est surtout un voyage intérieur, mais aussi un voyage vers l’autre.

Malgré le temps qui passe, la rapidité de nos vies, il faut trouver le temps de la mémoire, il faut encore savoir aimer, il faut pouvoir donner du sens : c’est une manière d’humaniser la vie, et de faire de la mort une nouvelle naissance… Le texte se clôt sur une référence à la vie éternelle pleine d’espoir. Aux images sombres et désenchantées du début du poème succède au contraire la lumière du matin et le bleu du ciel…

© Jeanaïs B.
Classe de Première S-2 (promotion 2016-2017), juin 2017.

Espace Pédagogique Contributif