La citation de la semaine… Anaïs Nin…

“Écrire doit être une nécessité, tout comme la mer a besoin des tempêtes, et j’appelle cela respirer…”

À la question “Pourquoi écrivez-vous ?”, Anaïs Nin répond : “Je ne pouvais vivre dans aucun des mondes qui m’étaient proposés […]. J’ai dû créer un monde pour moi, comme un climat, un pays, une atmosphère, où je puisse respirer, régner et me recréer anais-nin-1.1254664398.jpglorsque j’étais détruite par la vie… C’est un monde pour les autres, un héritage pour les autres, un don aux autres en définitive. Nous écrivons afin de pouvoir transcender notre vie, aller au-delà. Nous écrivons pour nous apprendre à parler avec les autres, pour raconter le voyage à travers le labyrinthe, nous écrivons pour élargir notre univers, lorsque nous nous sentons étranglés, gênés, seuls […]. Lorsqu’on crée un monde tolérable pour soi-même, on crée un monde tolérable pour les autres. Nous écrivons pour agrandir le monde que nous trouvons étouffé, rétréci ou désolé. Nous écrivons comme les oiseaux chantent, comme les primitifs dansent leurs rituels. Si vous ne respirez pas en écrivant, si vous ne criez pas en écrivant, si vous ne chantez pas en écrivant, alors n’écrivez pas, car notre culture n’en a nul besoin. Lorsque je n’écris pas, je sens mon univers se rétrécir. Je me sens en prison. Écrire doit être une nécessité, tout comme la mer a besoin des tempêtes, et j’appelle cela respirer…”

Anaïs Nin, Journal, février 1954

Anaïs Nin (1903-1977) est une écrivaine atypique, secrète et mystérieuse. Muse et poétesse, inspiratrice d’Antonin Artaud et d’Henri Miller, elle consacrera une bonne part de son activité créatrice à la rédaction d’un imposant journal (sept tomes au total), dont la veine intimiste et narcissique n’a cessé de fasciner des générations de lecteurs. Commencé à onze ans et jamais interrompu, ce journal constituera pour elle une sorte de thérapie interrogeant le sujet écrivant et l’écrivaine elle-même : tout écrire, tout confier jusqu’au plus intime sera pour elle la seule façon de communiquer aux autres le silence de son être par le pouvoir cathartique des mots.

De fait, Anaïs Nin apparaît comme une femme divisée, fragmentée, à la recherche perpétuelle d’une identité que seule l’écriture lui permettra de retrouver. Dans ce passage justement, elle aborde le processus qui l’amène à ce besoin d’écrire et s’interroge plus largement sur la mission de l’écrivain. Écrire, dit-elle, “c’est un monde pour les autres, un héritage pour les autres, un don aux autres”… À ce titre, l’écriture apparaît comme une sorte d'”invitation au voyage” : de cette rencontre avec les autres naît un nouveau regard sur soi-même et sur le monde : “Lorsqu’on crée un monde tolérable pour soi-même, on crée un monde tolérable pour les autres”…

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Crédit photographique : B. Rigolt (photomontage)
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brunorigolt

- Agrégé de Lettres modernes - Docteur ès Lettres et Sciences Humaines (Prix de Thèse de la Chancellerie des Universités de Paris) - Diplômé d’Etudes approfondies en Littérature française - Diplômé d’Etudes approfondies en Sociologie - Maître de Sciences Politiques