À l’Ouest tout est bleu. Le regard est happé par ce bleu qui ouvre la géographie d’angle…
Est-ce la mer qui arrive sur la côte ? Ou la côte qui arrive sur la mer ? Est-ce la terre qui interrompt la masse de l’eau, ou l’eau qui limite la terre ? Je me tiens devant la mer, la mer de chez moi, celle qui touche la côte basque et me sert de repère pour regarder les autres mers. En face il y a l’Amérique, mais d’abord, à quelques milles à peine, de très profondes fosses, une fracture, un mur jusqu’au fond de l’eau. Au Nord, il y a la forêt. Au Sud, la frontière de l’Espagne. À l’Est, la masse du continent. À l’Ouest tout est bleu. Le regard est happé par ce bleu qui ouvre la géographie d’angle…
Marie Darrieussecq, Prévisions sur les vagues (texte complémentaire au roman Le Mal de mer, © éditions P.O.L, 33, rue Saint-André-des-Arts, Paris 1999).
Née en 1969, Marie Darrieussecq est écrivaine et universitaire. Dans ce court récit où la précision de l’observation “naturaliste” se mêle aux brumes de la mer, l’auteure nous entraîne vers d’autres rivages. Son style d’écriture est à lui seul la symbiose d’une perception physiologique et poétique de l’univers. À la fois précis et suggestifs, les mots jettent sur la grève du quotidien des sensations iodées qui trouvent leur achèvement dans le voyage et l’ailleurs. Un beau texte, entre vents et marées…
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