Un été en Poésie (Saison 2) 22 juillet-22 août 2014… Aujourd’hui : François Mauriac


UAEP 2014 accroche
Illustration : © Bruno Rigolt, août 2013-juillet 2014 (Peinture numérique et photomontage)
Sources : Gustave Le Gray, « La grande vague » (1857) ; Aivazovsky, « Calme sur la mer Méditerranée » (1892) ; Modigliani, « Jeanne Hébuterne au chapeau » (1917)

En été, hydratez votre cerveau au maximum !

Pour la deuxième année consécutive, du mardi 22 juillet 2014 au vendredi 22 août inclus, découvrez une exposition inédite : « Un été en poésie« …
Chaque jour, un poème sera publié. Cette année, quinze pays seront représentés dans ce tour du monde poétique, mêlant écriture et arts visuels. Conformément au cahier des charges éditorial de ce blog de Lettres, le principe de la parité sera strictement respecté.

 

Aujourd’hui… François Mauriac ♂
(1885, Bordeaux — 1970, Paris) FRANCE

Demain, mercredi 23 juillet : Renée Vivien… France

Plaintes de Cybèle

Ton rire jaillissait, vif entre les eaux vives.
Mes branches déchiraient lentement le brouillard
Et ta face brillait sur Cybèle attentive
Mieux que les astres morts qui n’ont pas de regard
Ton reflet s’endormait dans mes sources cachées
Dont le souffle ridait l’eau froide au goût terreux.
De la chair fourmillante à ma chair attachée
Je ne sentais plus rien que les mains écorchées
D’Atys qui caressait l’herbe de mes cheveux.
Ma douleur sur la mer poussant un cri farouche,
Eût réveillé le peuple assis aux sombres bords :
Atys, tu me brûlais de ta petite bouche,
Je n’avais pas de bras pour enserrer ton corps.

Une ligne de sable, un renflement de dune,
Une frange d’écume et de varech : la mer…
Le doux trait des sourcils sur ta paupière brune
Et l’obscure forêt au bord du front désert :
Ton visage éclairé du feu de deux prunelles.
Étoiles de ma nuit dont les flammes jumelles
Quand tu dors, vont brûler sur un autre univers,
Atys, je confonds tout dans un unique songe :
Enfant qui me dévaste, océan qui me ronge.

Les ruisseaux dont je sens partout la vive fuite.
Les gaves dont les eaux par les cailloux brisées
Agitent les cheveux des nymphes enlisées.
Longues mousses flottant sur le sommeil des truites.
Que sont-ils pour mon cœur, ô toi qui m’as perdue.
Visage dur, souillé de mûres et de boue,
Au prix de cette larme à tes cils suspendue
Et qui creuse soudain l’argile de ta joue !

François Mauriac (1885-1970)
Le Sang d’Atys, Paris Bernard Grasset 1940

Bruno Rigolt_Paysage de dunes« Une ligne de sable, un renflement de dune, Une frange d’écume et de varech : la mer… »

Crédit photographique : © Bruno Rigolt, « Paysage de dunes dans le Finistère » (2013)

frise_fleur

Publié par

brunorigolt

- Agrégé de Lettres modernes - Docteur ès Lettres et Sciences Humaines (Prix de Thèse de la Chancellerie des Universités de Paris) - Diplômé d’Etudes approfondies en Littérature française - Diplômé d’Etudes approfondies en Sociologie - Maître de Sciences Politiques