“Des mots égarés, une écriture du silence” par les élèves de Seconde 18 et Seconde 7

Les classes de Seconde 18 et Seconde 7 ont travaillé sur une nouvelle dense et forte de Marguerite Duras, “Le Coupeur d’eau” (La Vie matérielle, P.O.L. 1987). Ce texte a amené les élèves à s’interroger sur le style si particulier de cette écrivaine : dans Écrire, voici comment Duras présente sa propre conception de l’écriture : “Il y aurait une écriture du non-écrit. Un jour ça arrivera. Une écriture brève, sans grammaire, une écriture de mots seuls. Des mots sans grammaire de soutien. Égarés. Là, écrits. Et quittés aussitôt”. Cette expression de “mots égarés” a suscité l’intérêt des étudiants qui ont souhaité créer des poèmes dont la langue, très épurée, est comme une réponse au vœu de l’auteure… Découvrez ces textes, particulièrement le travail sur le style et la syntaxe entrepris par les “jeunes écrivains”.

Les poèmes seront publiés au fur et à mesure de leur achèvement. Bonne lecture !

Au matin de la pluie…

par Luiza M. (Seconde 18)

          

Expliquer ses larmes,

Larmes postées sans sens

Écrire au loin des mots parallèles

effacer la mort

Avoir une dernière chance

Sortir du fleuve brûlé

Incendié de souvenirs…

La mer est voilée de chiffres

Qui s’additionnent, se multiplient,

Mais sans être mouillés…

La mer a traversé mes yeux

J’ai écrit une feuille sans eau

Au matin de la pluie…

La vie ?

par Rayan D. (Seconde 18)

          

L’amour on peut en rire,

Boire sodas et manger gâteaux,

Il faut savoir séduire,

Pleurer si pas assez beau.

Venir en manteau et bas,

Un collier et son chat,

regarder un nuage,

Remplir des pages,

Montrer son journal intime,

Être consolé par une fille,

Humilié par un garçon qui rit,

Faire des poèmes à mauvaises rimes.

Routine de la vie et du temps

par Leïla G. (Seconde 7)

La vie est comme le jour :

Un lever de soleil pour te donner l’amour en un cri

Comme un sourire, un “Je t’aime”

La vie est comme la pluie qui tombe

Comme ces coups bas de l’existence

Comme pour affronter une mort, une séparation.

Puis vint le coucher du soleil :

La mort d’une personne

Qui regarde le soleil par l’adieu de la lumière

Laissera place au ciel noir

Où les étoiles et la lune brilleront,

Comme pour rendre hommage à ceux

Ayant vécu la routine de la vie et du temps…

Qui n’ose étinceler

par Pauline C. (Seconde 18)

          

L’exceptionnel infini, ostentatoire pour l’horizon,

Orgueilleux pour l’océan qui n’ose étinceler,

(Pauvre instrument du voyage…)

N’accentuait aucune émotion.

Les vagues, les vagues…

Futiles espoirs égarés,

Renouvelaient vagabonds et naufragés

Ailleurs, en exil…

À l’heure du silence…

par Léo R. (Seconde 18)

          

Découverte d’une tentation nouvelle :

Le souvenir d’une mélodie égarée

À l’heure du silence,

La beauté étoilée du Noir au Soir,

L’émerveillement d’une nuit d’été hésitante

(profondeur d’un regard

Dans la lumière obscure de la vie)

Infinité inconnue,

Regret d’un changement lointain

Et la raison d’une fascination :

Ce désespoir d’une femme à mes côtés

Quelques larmes, une infinité inconnue…

Joie et la mort

par Mélisa A. et Thulaciga Y. (Seconde 18)

          

Rose soir soleil arc-en-ciel

Mer plage et les arbres

Lumière de la nature

Famille couleurs

Sirène retentit, guerre arrive

Enfants soldats apeurés

Partout douleur et malheur

Femmes battues partout,

Hommes, enfants battus

Partout soleil couché,

partout nuit noire

Loin d’eux rester

Écrire dessiner sans eux

Source de la mort courage

Courir voler vers la lumière

Du paradis timide…

L’eau a touché le vent

par Victor E. (Seconde 7)

          

Dans sa tristesse remplie de joie,

L’eau a touché le vent :

Couleur sombre devenue claire !

Libérée, emprisonnée,

Touchera la mort la vie

Et l’esprit quittera le corps.

Colline regardant montagne

Dans l’obscurité d’une toile blanche,

L’eau a touché le vent…

Une soif rare

par Ksénia C. (Seconde 18)

Trouver sans fin des carreaux

Découvrir un sourire vide, infantile, décoloré

Partir vers des pointes symétriques.

Ouvrir une montre hermétique,

Arrêter le temps

Des lacets grisés par personne

Noués autour de tes pieds.

Une crêpe sur le sol

Encore chaude, colorée

Au revoir est écrit à l’envers

Coloré par des larmes sans compter

Une soif rare, linéaire

Plaquée sur toi…

Tombe la nuit

par Hélène P. (Seconde 18)       

Tombe la nuit en installant le silence

Aussi froide et sombre

Le souffle de mon cœur

Ébréché par un amour perdu…

Je ris d’une promesse brisée

Souffre de la tristesse de la pluie

Mon corps dénué de rire

Les signes nourissent les plis de ma pensée…

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Associé, Dissocié

par Arthur S. (Seconde 18)

Crayon bleu

Arbre de Noël

Ville de maisons

La pluie sur le feu

Le clair de lune, de terre et de force

La télé regardant le canapé

Une bouche vit la voiture courir

La fin de la vie

Contact dans mon téléphone

Le soir de la barrière

Une main dans le vent…

Infinie tristesse

par Charlotte G. (Seconde 18)

Amis perdus, solitude partagée

Savoir aimer, peur de haïr

Amour Haine

Tous deux très proches

Sentir des parfums libertaires

Oublier la lumière

Ouvrir les portes de la mer…

Découvrir l’infini, croire au bonheur

Complicité entre sœurs

Superficielle : l’amour est réel

Un jeu de hasard :

Océan de laine ?

Poisson de porcelaine ?

Infinie tristesse…

En direction de l’été

par Florent de W. (Seconde 18)

          

Amour vivant sa vie

Sonnerie, Guerre et la pluie

Hiver, rage, vent

Forêt rouge de têtes

Seules, meurent et pleurent

Cœur de pierre blanc

Peur magique du képi

Couloir crevé de sang

Meurent les cœurs noirs au matin

En direction de l’été

Monument généalogique du souvenir

Retentit Sonnerie du passé

Mais l’amour a perdu la vie,

Sonnerie, guerre et la pluie…

Mon Cœur

par Marion D. (Seconde 7)

            

Mon cœur battait de vie

Quand tu es arrivé.

De sentiments, il battait :

Tes yeux m’ont touchée.

Mon cœur bat de silence :

Je ne t’ai jamais parlé…

Bruits qui se répètent

par Laurie C. (Seconde 18)

          

Hommes aux cœurs égarés

[Solitude de leurs sourires]

Bruits qui se répètent

PEUR

Hurlements silencieux

GOMMER LE MONDE

L’horloge ronde tourne

Tic-tac, Tic-tac des coups de feu

Courir jusqu’au fond

Trouver la porte

Quitter le monde

[Tic-tac, Tic-tac]

C’est fini.

Comme un sablier

Maxime C. (Seconde 7)

                        

Le temps sillonne à travers les étoiles :

Sablier qui s’écoule

Destructeur et fatal.

Plus je m’avance et plus je vieillis

Je m’approche de la cascade finale :

Pierre qui roule

Vers le silence…

(Voir les autres parutions de textes)

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Crédit photographique : B. Rigolt

Publié par

brunorigolt

- Agrégé de Lettres modernes - Docteur ès Lettres et Sciences Humaines (Prix de Thèse de la Chancellerie des Universités de Paris) - Diplômé d’Etudes approfondies en Littérature française - Diplômé d’Etudes approfondies en Sociologie - Maître de Sciences Politiques