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La classe de Première ES2 du Lycée en Forêt est fière de vous présenter une exposition exceptionnelle : « Dis-moi un Po-aime »… Plusieurs fois par semaine, les élèves vous inviteront à partager l’une de leurs créations poétiques…
Bonne lecture !
Aujourd’hui, dimanche 26 juin, la contribution de Julie
Précédentes publications : samedi 25 juin : Kassandra ; vendredi 24 juin : Lucie ; vendredi 24 juin : Mélinda ; jeudi 23 juin : Lou ; jeudi 23 juin : Noémie et Emma ; vendredi 3 juin : Pauline ; vendredi 20 mai, Agatha et Léa ; dimanche 15 mai : Furkan ; samedi 14 mai : Céline ; mardi 10 mai : Alyssa et Ninon ; dimanche 8 mai, Aymmy ; vendredi 6 mai, Aymeric ;
Prochaines publications : Marine et Jeanne, Jessica…
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« Rêves d’ailleurs »
par Julie D.
Classe de Première ES2
J’ai rêvé tant de fois de vivre
L’innocente vertu du vent,
D’entendre le léger murmure de la liberté
J’ai tant de fois soupiré : « partir loin d’ici » !
Le rêve n’est qu’un voyage incertain,
Le voyage n’est que songe
Dont le souvenir est inoubliable :
Mon esprit s’évade dans le désert étoilé de la nuit
Tel les plumes d’une colombe qui virevolte dans les airs :
Ces plumes atterrissent plus loin sur la terre
Ô triste réalité ! Pensées nourries de rêves éphémères
Et de voyages inachevés !
Illustration : © 2016, Bruno Rigolt, « Sur les bords du Nil » (dessin, photographie retouchée et pastel numérique)
Le point de vue de l’auteure…
Intitulé « Rêves d’ailleurs », ce poème est l’expression d’une profonde envie de voyage. Comme l’a si bien exprimé Baudelaire, le départ de l’homme pour un voyage allégorique est la seule façon d’échapper à l’insuffisance du réel :
Mais les vrais voyageurs sont ceux-là seuls qui partent
Pour partir […] Et qui rêvent […] De vastes voluptés, changeantes, inconnues,
Et dont l’esprit humain n’a jamais su le nom ! »
Au sentiment de la réalité comme spleen, le désir de voyage est une manière de donner un sens à la vie : telle Anna de Noailles, dans « Le Port de Palerme », j’aurais pu évoquer « cet éternel souhait du cœur humain : partir ! » ou m’exclamer avec Mallarmé dans « Brise marine » : « fuir ! Là-bas fuir… »
Loin d’être un désir superficiel ou passager, le voyage apparaît comme une quête profondément existentielle. Et si dans ce poème, je me suis laissée guider par mes sentiments et mes émotions, c’est pour conférer au voyage la mission d’atteindre un idéal « pur ». Le but n’est pas d’aller vers un lieu précis, mais de s’évader en rêve à travers une succession de non-lieux : le vent, ou « le désert étoilé de la nuit » (v. 8).
Insatisfait de ce monde, l’esprit voyage à la recherche d’un lieu idéal, d’un paradis rempli de symboles : l’hypallage double des vers 2 et 3 fait que le vent devient une « vertu », et la liberté, un « léger murmure ». De fait, dans le monde de la poésie, tout est possible : elle nous permet, comme Alice, d’entreprendre un voyage « au pays des merveilles ». « Voyage incertain » (v. 5), tel un mirage d’Orient qui entraîne l’esprit à l’autre bout de la terre vers des lieux lointains, bercé par les parfums capiteux des fleurs exotiques, de la myrrhe, de l’encens ou des roses.
La dernière strophe est comme un retour douloureux à la « triste réalité » (v. 11) : pourtant, à la manière des symbolistes, la fin du texte qui évoque les « rêves éphémères » et les « voyages inachevés » met en évidence le pouvoir évocateur de la poésie : n’est-ce pas elle qui permet de faire un voyage métaphorique ? Comme l’affirmait Baudelaire, « ce qui est créé par l’esprit est plus vivant que la matière ».
C’est bien l’art poétique en effet, par sa puissance transfiguratrice, qui permet cette alchimie, capable de rendre plus réelle la signification transcendante des mots que la réalité immanente qu’ils désignent. La poésie apparaît dès lors plus profonde, plus sensée, voire plus vraisemblable que la vie elle-même.
Porteuse d’imaginaire, toute chargée de plénitude et d’allégorie, elle prend ainsi son sens : fuite vers un ailleurs primitiviste, goût pour la liberté, quête de l’ineffable : le voyage apparaît comme un déchiffrement des mystères du monde…
© Julie D., classe de Première ES2 (promotion 2015-2016), juin 2016.
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