Au fil des pages… Foot & violence. Politique, stades et hooligans : Heysel 85…

Foot & violence. Politique, stades et hooligans : Heysel 85

Paru en 1995 aux éditions De Boeck Université, cet ouvrage de Serge Govaert et Manuel Comeron (*) me semble tout indiqué pour les étudiant(e)s de BTS de deuxième année. De fait, le nouveau thème concernant l’enseignement de « culture générale et expression » en deuxième année, session 2012 est « Le sport, miroir de notre société ? « . Comme il est rappelé dans les instructions officielles, « Le sport dans les sociétés contemporaines structure une part importante de la vie publique. Créateur d’événements, il occasionne des rassemblements de masse et des manifestations qui rythment le temps collectif. […] Néanmoins, le sport nous renvoie l’image de certaines dérives. […] Lieu de rassemblement, il peut aussi devenir lieu de débordements identitaires dégénérant en violence ouverte ».

C’est précisément cet aspect qui a retenu l’attention des auteurs : ainsi qu’ils le précisent en introduction,

« Le contexte footballistique «privilégie» des comportements de violence individuelle ou de masse et, surtout, de groupes inscrits dans des problématiques de société.
Au centre : le supporter. Celui-ci s’identifie fortement au spectacle compétitif («on a gagné !») et est plongé dans un contexte de virilité («c’est le plus fort qui gagne»). Contexte particulier, par ailleurs, où, les médias pointent cette compétition comme un enjeu crucial et où l’aspect festif est profondément ancré — avec la consommation d’alcool qui va de pair.
A l’épicentre : les hooligans. L’environnement social (médias, clubs, forces de l’ordre, pouvoir politique, etc.) leur accorde une reconnaissance formelle, une identité qu’ils accepteront avec avidité malgré sa connotation négative. Les plus imposants de ces noyaux durs se verront assimilés à des «associations de malfaiteurs», statut juridique qui parachève l’édification de ces «gangs» en groupes sociaux formels. Ces groupes aux comportements radicaux font partie intégrante d’un phénomène collectif qui les dépasse […].
Ces comportements de masse incontrôlables, autrefois ponctuels, que les noyaux durs ont modélisés et extrémisés pour en faire un mode de fonctionnement permanent (un way of life pour certains), apparaissent comme la facette la plus visible du phénomène. Cette visibilité détonante deviendra le moteur de ces jeunes en quête de valorisations symboliques : en raison d’un contexte sociétal qui les favorise peu (cumul de critères sociaux défavorables, absence de perspectives futures, etc.), mais aussi par le fossé déresponsabilisant qui les sépare inexorablement des structures du football — spo,t sur lequel ils sont venus se greffer, moins par hasard que par nécessité » (page 6 et s.).

En analysant ce phénomène de société qu’est le hooliganisme à travers la finale de la Coupe d’Europe opposant la Juventus de Turin à Liverpool au stade du Heysel en 1985, Serge Govaert et Manuel Comeron rendent très bien compte des rapports qui s’établissent entre sport, violence et société. Lisez tout d’abord l’introduction (page 5 et s.) : elle vous sera très utile pour comprendre cet aspect essentiel mentionné dans les instructions officielles :  » Lieu de rassemblement, [le sport] peut aussi devenir lieu de débordements identitaires dégénérant en violence ouverte ». Comme il a été justement rappelé dans le Rapport au Parlement et au Gouvernement portant sur la violence et le sport, (**), « les grandes manifestations de football deviennent des lieux spécifiques de débordements identitaires et de transgression qui, pour certains groupes, sont d’autant plus recherchés qu’ils apparaissent à l’écran ».

Rédigée dans un style journalistique alerte et largement accessible, la première partie de l’ouvrage revient sur la tragédie du Heysel ainsi que sur la gestion calamiteuse du drame puis sur ses conséquences sociales et politiques. Quant à la deuxième partie (malheureusement non consultable), elle s’attarde davantage sur l’apparition de la notion de hooliganisme, en tant que violence organisée et préméditée. Même si quelques passages seulement sont librement consultables (en fait, les quatre premiers chapitres), ils ouvrent néanmoins des pistes de réflexion pertinentes sur les phénomènes de violence collective au sein du sport, et plus largement sur la vulnérabilité des institutions et la très grande fragilité des démocraties.

(*) Serge Govaert, Manuel Comeron, Foot & violence. Politique, stades et hooligans : Heysel 85, De Boeck Université (Bruxelles, 1995).

(**) Rapport au Parlement et au Gouvernement portant sur : la violence et le sport ; le sport contre la violence » , décembre 2007, page 9. Rapport librement consultable (et téléchargeable) en cliquant sur le lien hypertexte.

  • A lire aussi (en intégralité, mais d’un abord plus difficile) : LE FOOTBALL À L’ÉPREUVE DE LA VIOLENCE ET DE L’EXTRÉMISME, Sous la direction de Thomas Busset, Christophe Jaccoud, Jean-Philippe Dubey et Dominique Malatesta.
  • Je vous conseille enfin de parcourir cet ouvrage : Jean-Philippe Leclaire, Le Heysel, une tragédie européenne, Calmann-Lévy, Paris 2005 (cliquez ici pour lire sur Gallica-BNF le descriptif complet). De nombreux passages sont consultables gratuitement sur Numilog (installation de Silverlight requise) : cliquez ici pour feuilleter le livre.

Au fil des pages… Foot & violence. Politique, stades et hooligans : Heysel 85…

Foot & violence. Politique, stades et hooligans : Heysel 85

Paru en 1995 aux éditions De Boeck Université, cet ouvrage de Serge Govaert et Manuel Comeron (*) me semble tout indiqué pour les étudiant(e)s de BTS de deuxième année. De fait, le nouveau thème concernant l’enseignement de « culture générale et expression » en deuxième année, session 2012 est « Le sport, miroir de notre société ? « . Comme il est rappelé dans les instructions officielles, « Le sport dans les sociétés contemporaines structure une part importante de la vie publique. Créateur d’événements, il occasionne des rassemblements de masse et des manifestations qui rythment le temps collectif. […] Néanmoins, le sport nous renvoie l’image de certaines dérives. […] Lieu de rassemblement, il peut aussi devenir lieu de débordements identitaires dégénérant en violence ouverte ».

C’est précisément cet aspect qui a retenu l’attention des auteurs : ainsi qu’ils le précisent en introduction,

« Le contexte footballistique «privilégie» des comportements de violence individuelle ou de masse et, surtout, de groupes inscrits dans des problématiques de société.
Au centre : le supporter. Celui-ci s’identifie fortement au spectacle compétitif («on a gagné !») et est plongé dans un contexte de virilité («c’est le plus fort qui gagne»). Contexte particulier, par ailleurs, où, les médias pointent cette compétition comme un enjeu crucial et où l’aspect festif est profondément ancré — avec la consommation d’alcool qui va de pair.
A l’épicentre : les hooligans. L’environnement social (médias, clubs, forces de l’ordre, pouvoir politique, etc.) leur accorde une reconnaissance formelle, une identité qu’ils accepteront avec avidité malgré sa connotation négative. Les plus imposants de ces noyaux durs se verront assimilés à des «associations de malfaiteurs», statut juridique qui parachève l’édification de ces «gangs» en groupes sociaux formels. Ces groupes aux comportements radicaux font partie intégrante d’un phénomène collectif qui les dépasse […].
Ces comportements de masse incontrôlables, autrefois ponctuels, que les noyaux durs ont modélisés et extrémisés pour en faire un mode de fonctionnement permanent (un way of life pour certains), apparaissent comme la facette la plus visible du phénomène. Cette visibilité détonante deviendra le moteur de ces jeunes en quête de valorisations symboliques : en raison d’un contexte sociétal qui les favorise peu (cumul de critères sociaux défavorables, absence de perspectives futures, etc.), mais aussi par le fossé déresponsabilisant qui les sépare inexorablement des structures du football — spo,t sur lequel ils sont venus se greffer, moins par hasard que par nécessité » (page 6 et s.).

En analysant ce phénomène de société qu’est le hooliganisme à travers la finale de la Coupe d’Europe opposant la Juventus de Turin à Liverpool au stade du Heysel en 1985, Serge Govaert et Manuel Comeron rendent très bien compte des rapports qui s’établissent entre sport, violence et société. Lisez tout d’abord l’introduction (page 5 et s.) : elle vous sera très utile pour comprendre cet aspect essentiel mentionné dans les instructions officielles :  » Lieu de rassemblement, [le sport] peut aussi devenir lieu de débordements identitaires dégénérant en violence ouverte ». Comme il a été justement rappelé dans le Rapport au Parlement et au Gouvernement portant sur la violence et le sport, (**), « les grandes manifestations de football deviennent des lieux spécifiques de débordements identitaires et de transgression qui, pour certains groupes, sont d’autant plus recherchés qu’ils apparaissent à l’écran ».

Rédigée dans un style journalistique alerte et largement accessible, la première partie de l’ouvrage revient sur la tragédie du Heysel ainsi que sur la gestion calamiteuse du drame puis sur ses conséquences sociales et politiques. Quant à la deuxième partie (malheureusement non consultable), elle s’attarde davantage sur l’apparition de la notion de hooliganisme, en tant que violence organisée et préméditée. Même si quelques passages seulement sont librement consultables (en fait, les quatre premiers chapitres), ils ouvrent néanmoins des pistes de réflexion pertinentes sur les phénomènes de violence collective au sein du sport, et plus largement sur la vulnérabilité des institutions et la très grande fragilité des démocraties.

(*) Serge Govaert, Manuel Comeron, Foot & violence. Politique, stades et hooligans : Heysel 85, De Boeck Université (Bruxelles, 1995).

(**) Rapport au Parlement et au Gouvernement portant sur : la violence et le sport ; le sport contre la violence » , décembre 2007, page 9. Rapport librement consultable (et téléchargeable) en cliquant sur le lien hypertexte.

  • A lire aussi (en intégralité, mais d’un abord plus difficile) : LE FOOTBALL À L’ÉPREUVE DE LA VIOLENCE ET DE L’EXTRÉMISME, Sous la direction de Thomas Busset, Christophe Jaccoud, Jean-Philippe Dubey et Dominique Malatesta.
  • Je vous conseille enfin de parcourir cet ouvrage : Jean-Philippe Leclaire, Le Heysel, une tragédie européenne, Calmann-Lévy, Paris 2005 (cliquez ici pour lire sur Gallica-BNF le descriptif complet). De nombreux passages sont consultables gratuitement sur Numilog (installation de Silverlight requise) : cliquez ici pour feuilleter le livre.