Un automne en poésie 2011 1L2 1S2 1STG3… Deuxième livraison

Un automne en poésie… édition 2011… Deuxième livraison.

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Depuis une semaine, les classes de Première dont j’ai la charge cette année sont fières de vous présenter l’édition 2011 d’Un automne en poésie, manifestation d’art qui entend marquer à sa manière la rentrée littéraire au Lycée en Forêt. Plus de soixante textes, tous inédits, sont en cours de publication. Ces poèmes, souvent d’une grande densité intellectuelle, chantent avant tout la nostalgie de l’Idéal et du Spirituel. Proclamant le pouvoir de l’art sur la vie quotidienne, de la subjectivité sur l’objectivité, de l’imaginaire sur le réel, ils s’inscrivent dans la tradition symboliste. Je vous laisse découvrir la suite des textes publiés…
NetÉtiquette : comme pour l’ensemble des textes publiés dans cet Espace Pédagogique Contributif, les poèmes des étudiant(e)s sont protégés par copyright. Ils sont mis à disposition des internautes selon les termes de la licence Creative Commons Paternité (Pas d’utilisation privée ou commerciale, pas de modification). La diffusion publique est autorisée sous réserve de mentionner le prénom de l’auteur, l’initiale de son nom, la classe, l’établissement ainsi que la référence complète du poème cité (URL de la page).
arrow.1242450507.jpg Pour accéder aux textes de la première livraison, cliquez ici.
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arrow.1242450507.jpg Pour accéder aux textes de la quatrième livraison, cliquez ici

 

Tableau de larmes bleues

par Agathe V.

(Première L2)

             

Mais déjà le ciel se remplit de peine :

Rapidement les vagues deviennent mur

C’est un voyage sans barrières où chavire mon cœur

Où navires quittent Terre pour rejoindre l’ailleurs,

Où l’océan n’a ni côte ni horizon

Quand résonne au fond des mers le chant des sirènes,

Je découvre ce tableau de larmes bleues

Éclairé du soleil couchant.

Le bleu de solitude s’emplit de colère

Et chaque grondement fait vibrer l’infini

Laissant revivre le tableau meurtri,

Le tableau de larmes bleues, comme un oubli de la nuit…

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« Le tableau de larmes bleues »
Composition d’après Man Ray (« Tears », 1932)

Souvenir(s)

par Lucile C.

(Première S2)

Ma solitude ressemble

À un ciel sans nuages

Qui de la nuit me bouleverse

La lune s’est échouée à ma fenêtre,

Je pense à toi.

La distance ne nous a pas divisés,

La distance nous a rapprochés

On se raconte la nuit et le jour

Et ces peu d’importance,

Je pense à toi.

J’ai franchi ce pont de sentiments

Qui nous rassemblent

De vastes lumières nous unissent.

Mon cœur s’étreint dans ton absence,

Je pense à toi.

La musique est une étoile

Quand je suis en face de toi

Mes mots sont de silence

Hélas le soleil est d’un jaune-ennui vide,

Je pense à toi.

Tes yeux sont d’un profond enivrant

Tes yeux sont de parole

Et de lumière

L’espoir m’envahit,

Je pense à toi, je pense à toi.

Dans le secret du monde

par Magali M.

(Première STG3)

L’avenir plongé dans le secret du monde,

Glacial poison de l’innocence

Prisonnière de l’homme et de sa blessure

Léchant l’ouverture de ma souffrance.

L’avenir plongé dans le secret du monde

Serrant mon corps de marbre :

J’ai perdu la nuance du temps,

J’ai oublié les couleurs de l’arbre

Ainsi j’affronte le danger,

Je ne fais qu’un avec l’immortalité

Comme le ciel je ne meurs pas

Car j’ai rêvé

L’avenir plongé dans le secret du monde.

S’enferme l’oxygène dans l’extase

De la mort et du vent. Je fuis le monde,

Perdue dans l’insouciance…

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Ton soupir

par Romane M. et Anthony B.

(Première S2)

Ma muse mourante dans l’Aurore rosée

Insouciance et naïveté à l’aube du destin.

Un imaginaire, faut-il, et jamais tu ne comprendras !

Les vives lumières du silence m’éblouissent et me consternent

Irréelle, je me noie de mon juste bonheur

Une allée, une femme, tout peut nous mener à la mer.

Mais où chaque aube commence ?

La limite du crépuscule est vallonnée d’aléas

La passion m’étrangle. Je ne puis résister au départ,

L’étoile inaccessible me rappelle le tourment du fleuve.

L’horizon n’est-il pas la limite de l’Infini ?

Mes libres pensées se heurtent à ton soupir.

Une nébuleuse, ainsi la distance qui nous sépare.

Rejoins-moi sur l’astre fuyant de nos rêves !

Puis la beauté du monde s’efface…

par Mikayil S.

(Première STG3)

La poussière du jour cache ta beauté,

Mon âme rajeunit au lever du soleil,

Mais je veux aller vers ces endroits sombres :

Il suffit de rien pour plonger dans le noir !

Ma jeunesse dégradée par l’alcool

J’attends de remplacer le soleil par un spliff le matin

Je la méprise cette terre

Car je me sens minuscule

Puis la beauté du monde s’efface

J’accumule mes erreurs et mes défaites

Je reste le même.

Je me fais contrôler sur un parking

Ils n’ont trouvé que des mégots d’estime.

La vie est une leçon que j’apprendrai plus tard

La poussière du jour cache ta beauté

Que Dieu me pardonne et me guide…

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Les falaises du temps

par Émilie M.

(Première L2)

Elle se montre parfois et murmure

Cette pensée de l’enfance qui m’envahit,

Remplie de joie, de rires et de larmes

Quand mon regard s’attarde

Sur les falaises du temps

Qu’on appelle la vie…

Les couleurs de la vie

par Charline L.

(Première STG3)

Le ciel m’emporte lentement comme la mer traîne ses vagues

À l’âme de ces gens que la vie emmène

Loin de leurs peines, loin de leurs haines.

Le temps passe vite mais la vie est infinie

Je continue mon chemin jusqu’à l’au-delà

De la mer qui se perd dans l’horizon.

Je vois la montagne qui monte au ciel

Et la vie qui se meurt dans le paradis.

Vole comme l’oiseau qui voyage

Vers l’ombre des profondeurs.

Suis le vent qui te guidera vers la lumière blanche,

Marche sur des nuages remplis de douceur…

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Léger frisson de solitude

par Ange S. et Marie-Sophie H.

(Première S2)

L’esprit libre d’un voyage

Satisfaisant l’insolite joie

Des plaisirs surpris,

Savourant le rêve qui transperce

Les inquiétudes : sensation

De deux corps ardents

Comme la chaleur du soleil

Reflétée sur mon cœur

Flamme en vol brûlant

Les ailes des sentiments

Libertés de mai

Animant l’imagination

Travail de l’âme en extension

D’un désir naissant

Lumière de la jeunesse,

Je raconterai l’histoire de ton visage

Doux paradis de plaisir qui alimente

Les regrets d’automne :

Léger frisson de solitude…

Enfance

par Maéva F.

(Première STG3)

Dans ce jardin d’enfance

Suspendu à ma mémoire

Revient le souvenir

Comme une balançoire :

De doux moments magiques

Saisissant dans leur vol

Le sourire du vent,

Les sentiments authentiques.

Ô Nuit

par Céline B.

(Première L2)

S’éteint la flamme d’une enfance

D’infinies nuits emprisonnées se meurent

Dans mes yeux de silence.

L’absence d’ondes lumineuses

Et sonores m’attire dans les profondeurs

Quand m’embrasse le soleil

De jours divaguants ma pensée vagabonde

S’apaise dans le bleu nuit

De mes paupières closes

Globes calmés, m’attire le vide

J’inspire, j’expire

J’aspire à l’enivrement prochain…

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Fin de la deuxième livraison. D’autres textes seront publiés prochainement.
Crédit iconographique : © Bruno Rigolt

Au fil des pages… Anthologie de la poésie française…

 

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Anthologie de la poésie française

Joignez l’utile à l’agréable en parcourant cette Anthologie de la poésie française du Moyen Âge à nos jours (Philippe Sabourdy, Studyrama, 2005).

L’utile, c’est d’abord l’Épreuve Anticipée de Français : n’oubliez pas que si la poésie « tombe » au Bac, le corpus proposé pourra bien évidemment comporter des textes issus d’autres mouvements culturels que ceux que vous avez étudiés. C’est la raison pour laquelle je ne saurais trop vous recommander d’élargir vos connaisances. L’avantage de cette anthologie est qu’elle présente un panorama très large : depuis les ballades populaires jusqu’aux vers libres, des poésies les plus classiques aux poèmes contemporains. Vous y découvrirez aussi de nombreux textes expliqués et commentés. Mais lire des poèmes, c’est aussi jouer avec les mots, rêver, aller à la rencontre… Comme le dit l’auteur dans son introduction, quand « l’on est ému par un poète, c’est que deux intériorités, celle de l’auteur et la nôtre, se sont rencontrées ». Si cette anthologie est donc d’abord une incitation à un voyage dans le riche patrimoine de notre littérature, elle est aussi une invitation à la rencontre : lire un poème, c’est toujours emporter avec soi les mots d’un(e) autre, et c’est aussi rencontrer derrière le texte le visage intime et la voix secrète de l’auteur.

La citation de la semaine… Benoîte Groult…

Nous vivions comme on nous enjoignait de vivre, pensions comme on nous imposait de penser…

Quand suis-je devenue féministe ? Je ne m’en suis même pas aperçue. C’est arrivé beaucoup plus tard et sans doute parce que j’avais eu tant de mal à devenir féminine. Toute cette jeunesse paralysée par le trac de ne pas correspondre à la définition imposée […]. Pendant tous ces siècles, happées dans un vertige climatisé, nous vivions comme on nous enjoignait de vivre, pensions comme on nous imposait de penser […]. benoite_groult_1.1285526373.JPGIci, vous pouvez… là, c’est laid. Et notre docilité devant les lois de la société camouflées en décrets de la Providence paraissait si congénitale, on s’était si bien habitué en haut lieu à nous voir rester à notre place, que l’on est stupéfait, voire indigné aujourd’hui, devant cette soudaine agitation qui s’est emparée de tant de femmes. Harpies domestiques ou Messalines, saintes femmes ou putains, mères dévouées ou mères indignes, d’accord. Ce sont des types codifiés et admis et nous restons dans nos rôles. Mais que nous nous mêlions de repenser chaque acte de la vie selon notre optique à nous, de tout remettre en question depuis le « Tu enfanteras dans la douleur » si longtemps subi comme une volonté divine, jusqu’au schéma du bonheur humble et passif mitonné pour nous par Freud, notre Petit Père, voilà qui paraît indécent et inadmissible. Les hommes ont toujours été ravis quand nous étions capricieuses, coquettes, jalouses, possessives, vénales, frivoles… excellents défauts, soigneusement encouragés parce que rassurants pour eux. Mais que ces créatures-là se mettent à penser, à vivre en dehors des rails, c’est la fin d’un équilibre, c’est la faute inexpiable.

Benoîte Groult, Ainsi soit-elle, Grasset, Paris 1975.

Si « le féminisme n’a jamais tué personne, le machisme tue tous les jours ». Ces propos de Benoîte Groult lors d’un entretien (¹) posent tout l’enjeu d’Ainsi soit-elle. Publié en 1975 lors de « l’année de la femme », et récemment réédité au Livre de Poche (5 €), Ainsi soit-elle est en effet un ouvrage qu’il faut avoir lu et qu’il faut relire, particulièrement aujourd’hui où le statut et le droit des femmes sont si remis en cause dans le monde et où la dévalorisation du féminin en littérature perdure de façon inquiétante. Dès les années Cinquante, le Deuxième sexe de Simone de Beauvoir (1949) s’en était pris aux représentations identitaires, tant masculines que féminines, aux clichés et aux stéréotypes de toute sorte : « On ne naît pas femme, on le devient ». De fait, depuis plus de deux mille ans, beaucoup d’hommes adeptes d’une intolérance extrême, puisent dans les dogmes et les croyances de toute sorte des passages qui n’ont d’autre but que d’assurer la soumission des femmes.

Le plus inquiétant est que l’on se soit accommodé de cette folie ordinaire : « Une femme meurt tous les trois jours du fait de violences conjugales » rappellent quotidiennement entre deux publicités des spots télévisés : c’en est presque devenu banal… Et c’est la raison pour laquelle je vous invite à lire Ainsi soit-elle. Dans cet ouvrage, Benoîte Groult « analyse  en effet « l’infini servage » de la femme, sa dégradation physique et morale, […] il fait le procès des Hommes avec un humour acide. Mais Benoîte Groult sait aussi transmettre son émotion » (²) : évocations poétiques de la Bretagne natale, retour sur l’enfance, moments de complicité entre femmes… Plus fondamentalement, cet essai militant vous amènera à réfléchir avec lucidité et courage sur vos propres comportements : si le féminisme, particulièrement dans la décennie 70, a permis l’émergence d’un nouveau regard moral sur le monde, le désintérêt aujourd’hui des hommes (et des femmes) pour cette cause est peut-être prémonitoire : la mort des femmes est toujours la mort du monde quelque part…

Bruno Rigolt

(1) Florence Montreynaud, Le Féminisme n’a jamais tué personne, Les grandes conférences, Québec 2004, page 11.
(2) Christiane P. Makward, Madeleine Cottenet-Hage, Mary-Helen Becker, Erica Mendelson Eisinger, Dictionnaire littéraire des femmes de langue française, éd. Karthala, Paris 1996.

Les internautes ayant lu cet article pourront également consulter :
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Exposition "Poèmes Symbolistes" par la classe de Première ES1 Deuxième livraison

La classe de Première ES1 est fière de vous inviter à partager un moment poétique autour du Symbolisme. Préparée en décembre, cette exposition a été présentée pour la première fois lors de la journée Portes ouvertes du lycée, le samedi 20 mars 2010. Certains textes ont bénéficié de quelques remaniements depuis. Je vous invite à découvrir aujourd’hui ces écrits, dont certains sont d’une très grande force tant sur le plan littéraire qu’artistique. Pour accéder à la première partie de l’exposition, cliquez ici.

Deuxième et dernière livraison

Bonne lecture à toutes et à tous !

    Poèmes Symbolistes

(suite)

par la classe de Première ES1

                               

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Se révèle obscurité l’enfance

par Deborah P.

                   

Clé du bonheur au mal-être

Nous emprisonne perpétuellement

Tout est-il déterminé par l’ambiance du berceau ?

Etre gai, malheureux… C’est l’héritage des parents

L’ambiance familiale

Qui définit le mental

Une route, un carrefour : à droite ? A gauche ?

La conséquence enfantine agira sur toute la vie…

Se révèle obscurité l’enfance

Dans la route devenue dépendance…

             

                

L’Avant

par Astrid P.

                      

A-t-on vraiment rêvé de vivre les souvenirs ?

S’il se pouvait encore que rien n’ait réveillé

La solitude encrée par la plume du temps.

S’il se pouvait que tes yeux soient plus limpides

Que les clartés d’après la pluie.

                 

Mais le temps est la douce perfection comme des mots d’adieu

C’est là que la fin a commencé ;

Je me suis endormie dans la mort à demi

Là où la naïveté de l’azur

Explore d’éternelles gloires faussées…

               

                   

Parfums de l’été

par Rosanne C.

               

Parfums de l’été comme une rose éclose à peine

Été dans lequel débutait le périple des baroudeurs :

La vie semblait atteindre d’extrêmes grandiosités

Rappelant le chant d’une ode pianotée… 

Sans connaître la direction ni la route nous allions

De lieux en lieux vers l’inconnu

Découvrant le miel de la vie…

                   

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L’océan s’envole

par Émeline H.

              

Souvent l’inconscient fait sombrer la mémoire

Quand l’océan s’envole vers des milliards d’étoiles.

Je navigue à travers des poissons rougeoyants

Ma volonté bleuie face à l’élégance du soleil.

Ma solitude s’enfonçait dans des brises légères…

             

                       

De tristesse et de vent

par Maxime S.

                   

Les azurs somptueux

S’élèvent des cimetières dans un rayon de soleil

Pour continuer de vivre par delà les fossoyeurs

Comme des dragons aux couperets d’acier

Chantent et dansent

Comme des marguerites ivres

De tristesse et de vent.

                 

                       

Anaphore de l’eau

par marie B.

                 

L’anaphore de l’eau construite à partir d’un ruisseau

Réveille le côté fruité des galets.

La violence des regrets reste le plus beau voyage…

                    

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Dans le lointain proche de l’espoir

par Fanny B.

              

Étrange sensation d’obscurité

D’où me venait la lumière de ton histoire :

Une distance noire remplie de déception

M’enivrait jusqu’à la solitude.

               

Je restais seule chaque soir

Dans le lointain proche de l’espoir

Un choix d’expression autre que le regard

Me portait sur la musique de l’âme

               

Comprendras-tu ce que tu ne penses toi-même

Ce que tu n’oses faire :

Oublier la déception flagrante

Des musiques trop entendues.

                        

                           

Comme un hiver sans phrase

par Noémie B.

              

Je me souviens encore de l’enfance

Comme un hiver sans phrase

Le passé joyeux de l’enfant

Une humeur vagabonde et d’invisibles morts

Soudain, je repense aux souvenirs en loque de la vérité

À la magie féérique dans ce miroir brisé…

                 

                          

Sourire à la mer

par Agathe B.

                                

La poésie de l’Adieu est la peine du souvenir…

Oublier l’orage pour sourire à la mer,
Marcher avec la joie et manger la peur

Chanter la mort, comme un au-revoir à la vie
Un cœur rempli de bonheur aux portes du paradis

Un passé bleu, tant aimé
La photographie d’un sourire, émerveillé de soleil

Des souvenirs arc-en-ciel
Un homme rose pulmonaire disparu gentiment…

La clarté du soleil embrassait l’océan
Et le chant de la solitude éveillait mes larmes…

          

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J’espère te revoir

par Alexandrine L.

                

Un accident qui arrive et la vie devenue noire

L’amie dans le coma dévisagée

Mes larmes coulent dans la mer

Le caractère effacé oublié

Mes pensées s’assombrissent dans l’obscurité

Mes sentiments sont incrustés en toi…

J’espère te revoir…

                    

                      

Une chanson de tragédie

par Éléonore G.

                

Le mystère des feuilles tranquilles est la clé

De l’hémisphère de l’amour hypnotique

Et la solution de l’élément Lumière.

Énigmatique comme

La symphonie de l’amour,

Le voyage sacré de l’eau

L’ironie de la bulle…

Mais la musique du navire était une chanson de tragédie

Et les rouges rayures de l’écume

Envolaient la pulsion des vents.

              

                 

Son visage est de ciel

par Jordan P.

                       

Une déesse paraît sous mon âme

Son regard éclaircit l’horizon,

Son visage est de ciel.

Ses cheveux de soleil transcendent mon cœur

D’un indicible bonheur.

La déesse emporte dans son sourire

La vie et les ciels impuissants

Et les lunes et les hivers et les vents…

            

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Comme une envie de partir…

par Deborah P.

                       

La sombre nuit dangereuse comme une envie de partir

Dans la clarté des paradis

Immenses comme ces mers bleues du sud de la France.

Là-haut, de belles étoiles

Sans surprise

Des lendemains où lâche prise

Le cours de la vie…

                     

                     

Musicalité du soir

par Johanna D.

                        

La musicalité du soir est mélancolique

Sans son bien aimé.

Sa souffrance est d’une beauté suprême :

Un mal-être rebelle se met à lui parler.

Quand elle voit ce soleil encore vivant,

Un amour triste envahit son cœur ;

La puissance de ses sentiments

La fait voyager

Intensément…

                

                   

 Le poème sourit au vent

par Marie B.

                   

L’ébullition bleue du désert hante la blondeur du soleil

Et fait pétiller les clartés furtives du poème.

Le poème sourit au vent…

             

             

Amour friable

par Émeline H.

              

Le rideau se lève sur une vague étrange

Le feuillage des étoiles tombe de la lune

L’amour friable s’effrite sur l’astre amer

Les larmes enchantées sont prisonnières du rivage

Le cœur argenté de la nuit fait tomber le voile de l’innocence

Les vents se brisent

La clé de l’amour ouvre la porte.

                   

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Parfums d’une chanson

par Éléonore G.

             

Il faut vivre les saisons

Comme un mystère qui refuse de se taire

Comme les parfums d’une chanson

Qui jamais ne finirait,

Comme une mélodie ensorcelée par ton regard,

Comme la flamme du soleil

Éblouie de ton sourire énigmatique et tranquille.

            

               

Dans le turquoise du soleil

par Louis de B.

 

Départ, envol, espoir et renouveau

Illusion et véritable chemin de vent

Le désir n’est que déroute, recherche éperdue

Parfois imaginée au travers d’une fenêtre :

Alors soudain le turquoise du soleil

Reflète l’or de la mer

Soudain, la rapide échappée d’instants ressuscités

Soudain, une éphémère liberté

Conditionnelle

 

        

Retour au passé

par Fatimatabintou D.

                

L’image de mes paupières

Formant un chemin tel une muraille

En direction de ce visage heureux…

Le regard tourné vers les plaines ;

L’histoire d’une foudre de cris

Perdus au milieu des trottoirs

Rejoignant les autres cartes

Dans l’oubli des noms,

Dans les mémoires délaissées…

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la numérisation des textes est terminée.

Crédit iconographique : © B. R. (EPC/juin 2010)

Exposition « Poèmes Symbolistes » par la classe de Première ES1 Deuxième livraison

La classe de Première ES1 est fière de vous inviter à partager un moment poétique autour du Symbolisme. Préparée en décembre, cette exposition a été présentée pour la première fois lors de la journée Portes ouvertes du lycée, le samedi 20 mars 2010. Certains textes ont bénéficié de quelques remaniements depuis. Je vous invite à découvrir aujourd’hui ces écrits, dont certains sont d’une très grande force tant sur le plan littéraire qu’artistique. Pour accéder à la première partie de l’exposition, cliquez ici.

Deuxième et dernière livraison

Bonne lecture à toutes et à tous !

    Poèmes Symbolistes

(suite)

par la classe de Première ES1

                               

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Se révèle obscurité l’enfance

par Deborah P.

                   

Clé du bonheur au mal-être

Nous emprisonne perpétuellement

Tout est-il déterminé par l’ambiance du berceau ?

Etre gai, malheureux… C’est l’héritage des parents

L’ambiance familiale

Qui définit le mental

Une route, un carrefour : à droite ? A gauche ?

La conséquence enfantine agira sur toute la vie…

Se révèle obscurité l’enfance

Dans la route devenue dépendance…

             

                

L’Avant

par Astrid P.

                      

A-t-on vraiment rêvé de vivre les souvenirs ?

S’il se pouvait encore que rien n’ait réveillé

La solitude encrée par la plume du temps.

S’il se pouvait que tes yeux soient plus limpides

Que les clartés d’après la pluie.

                 

Mais le temps est la douce perfection comme des mots d’adieu

C’est là que la fin a commencé ;

Je me suis endormie dans la mort à demi

Là où la naïveté de l’azur

Explore d’éternelles gloires faussées…

               

                   

Parfums de l’été

par Rosanne C.

               

Parfums de l’été comme une rose éclose à peine

Été dans lequel débutait le périple des baroudeurs :

La vie semblait atteindre d’extrêmes grandiosités

Rappelant le chant d’une ode pianotée… 

Sans connaître la direction ni la route nous allions

De lieux en lieux vers l’inconnu

Découvrant le miel de la vie…

                   

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L’océan s’envole

par Émeline H.

              

Souvent l’inconscient fait sombrer la mémoire

Quand l’océan s’envole vers des milliards d’étoiles.

Je navigue à travers des poissons rougeoyants

Ma volonté bleuie face à l’élégance du soleil.

Ma solitude s’enfonçait dans des brises légères…

             

                       

De tristesse et de vent

par Maxime S.

                   

Les azurs somptueux

S’élèvent des cimetières dans un rayon de soleil

Pour continuer de vivre par delà les fossoyeurs

Comme des dragons aux couperets d’acier

Chantent et dansent

Comme des marguerites ivres

De tristesse et de vent.

                 

                       

Anaphore de l’eau

par marie B.

                 

L’anaphore de l’eau construite à partir d’un ruisseau

Réveille le côté fruité des galets.

La violence des regrets reste le plus beau voyage…

                    

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Dans le lointain proche de l’espoir

par Fanny B.

              

Étrange sensation d’obscurité

D’où me venait la lumière de ton histoire :

Une distance noire remplie de déception

M’enivrait jusqu’à la solitude.

               

Je restais seule chaque soir

Dans le lointain proche de l’espoir

Un choix d’expression autre que le regard

Me portait sur la musique de l’âme

               

Comprendras-tu ce que tu ne penses toi-même

Ce que tu n’oses faire :

Oublier la déception flagrante

Des musiques trop entendues.

                        

                           

Comme un hiver sans phrase

par Noémie B.

              

Je me souviens encore de l’enfance

Comme un hiver sans phrase

Le passé joyeux de l’enfant

Une humeur vagabonde et d’invisibles morts

Soudain, je repense aux souvenirs en loque de la vérité

À la magie féérique dans ce miroir brisé…

                 

                          

Sourire à la mer

par Agathe B.

                                

La poésie de l’Adieu est la peine du souvenir…

Oublier l’orage pour sourire à la mer,
Marcher avec la joie et manger la peur

Chanter la mort, comme un au-revoir à la vie
Un cœur rempli de bonheur aux portes du paradis

Un passé bleu, tant aimé
La photographie d’un sourire, émerveillé de soleil

Des souvenirs arc-en-ciel
Un homme rose pulmonaire disparu gentiment…

La clarté du soleil embrassait l’océan
Et le chant de la solitude éveillait mes larmes…

          

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J’espère te revoir

par Alexandrine L.

                

Un accident qui arrive et la vie devenue noire

L’amie dans le coma dévisagée

Mes larmes coulent dans la mer

Le caractère effacé oublié

Mes pensées s’assombrissent dans l’obscurité

Mes sentiments sont incrustés en toi…

J’espère te revoir…

                    

                      

Une chanson de tragédie

par Éléonore G.

                

Le mystère des feuilles tranquilles est la clé

De l’hémisphère de l’amour hypnotique

Et la solution de l’élément Lumière.

Énigmatique comme

La symphonie de l’amour,

Le voyage sacré de l’eau

L’ironie de la bulle…

Mais la musique du navire était une chanson de tragédie

Et les rouges rayures de l’écume

Envolaient la pulsion des vents.

              

                 

Son visage est de ciel

par Jordan P.

                       

Une déesse paraît sous mon âme

Son regard éclaircit l’horizon,

Son visage est de ciel.

Ses cheveux de soleil transcendent mon cœur

D’un indicible bonheur.

La déesse emporte dans son sourire

La vie et les ciels impuissants

Et les lunes et les hivers et les vents…

            

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Comme une envie de partir…

par Deborah P.

                       

La sombre nuit dangereuse comme une envie de partir

Dans la clarté des paradis

Immenses comme ces mers bleues du sud de la France.

Là-haut, de belles étoiles

Sans surprise

Des lendemains où lâche prise

Le cours de la vie…

                     

                     

Musicalité du soir

par Johanna D.

                        

La musicalité du soir est mélancolique

Sans son bien aimé.

Sa souffrance est d’une beauté suprême :

Un mal-être rebelle se met à lui parler.

Quand elle voit ce soleil encore vivant,

Un amour triste envahit son cœur ;

La puissance de ses sentiments

La fait voyager

Intensément…

                

                   

 Le poème sourit au vent

par Marie B.

                   

L’ébullition bleue du désert hante la blondeur du soleil

Et fait pétiller les clartés furtives du poème.

Le poème sourit au vent…

             

             

Amour friable

par Émeline H.

              

Le rideau se lève sur une vague étrange

Le feuillage des étoiles tombe de la lune

L’amour friable s’effrite sur l’astre amer

Les larmes enchantées sont prisonnières du rivage

Le cœur argenté de la nuit fait tomber le voile de l’innocence

Les vents se brisent

La clé de l’amour ouvre la porte.

                   

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Parfums d’une chanson

par Éléonore G.

             

Il faut vivre les saisons

Comme un mystère qui refuse de se taire

Comme les parfums d’une chanson

Qui jamais ne finirait,

Comme une mélodie ensorcelée par ton regard,

Comme la flamme du soleil

Éblouie de ton sourire énigmatique et tranquille.

            

               

Dans le turquoise du soleil

par Louis de B.

 

Départ, envol, espoir et renouveau

Illusion et véritable chemin de vent

Le désir n’est que déroute, recherche éperdue

Parfois imaginée au travers d’une fenêtre :

Alors soudain le turquoise du soleil

Reflète l’or de la mer

Soudain, la rapide échappée d’instants ressuscités

Soudain, une éphémère liberté

Conditionnelle

 

        

Retour au passé

par Fatimatabintou D.

                

L’image de mes paupières

Formant un chemin tel une muraille

En direction de ce visage heureux…

Le regard tourné vers les plaines ;

L’histoire d’une foudre de cris

Perdus au milieu des trottoirs

Rejoignant les autres cartes

Dans l’oubli des noms,

Dans les mémoires délaissées…

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la numérisation des textes est terminée.

Crédit iconographique : © B. R. (EPC/juin 2010)

Exposition "Poèmes Symbolistes" par la classe de Première ES1 Première livraison

La classe de Première ES1 est fière de vous inviter à partager un moment poétique autour du Symbolisme. Préparée en décembre, cette exposition a été présentée pour la première fois lors de la journée Portes ouvertes du lycée, le samedi 20 mars 2010. Certains textes ont bénéficié de quelques remaniements depuis. Je vous invite à découvrir aujourd’hui ces écrits, dont certains sont d’une très grande force tant sur le plan littéraire qu’artistique.

Première livraison

Les poèmes seront mis en ligne progressivement.
Bonne lecture à toutes et à tous !

   Poèmes Symbolistes

par la classe de Première ES1

                               

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Prélude à ton sourire

par Anaïs M.

                  

J’ai voulu écrire un prélude à ton sourire

Mais l’inspiration ne me guidait plus.

Je me suis perdue dans la thérapie de la vie,

Dans le brouillard de mes pensées.

J’aime le froid de la solitude, tu sais :

Elle me colle à la peau quand mon chagrin

Est à marée haute.

J’ai embrassé le noir fond des ténèbres,

J’ai plongé dans des océans de lumière

Qui rongeaient peu à peu mon cœur de pierre.

Mon amour est un sable mouvant où s’enlise

Le moindre sentiment qui passe

Au rivage de mes lèvres.

Au tourbillon de la vie, mes larmes s’effacent ;

La poussière de mes pensées est une glace qui se brise

Dans la mer, bleue de larmes…

                

                  

Dans les chemins de la nuit

par Marie C.

                       

Une vague disparaît dans la mer : mon cœur s’est plongé dans le tien

L’écume de mes larmes est restée sur le rivage…

La lune tente de consoler le ciel moins bleu,

le vent est l’ennemi du soleil, le vent se lève.

 

Le soleil s’est échoué dans le désespoir de la vie

La lune apparaît, la nuit se crée.

Mon chagrin tombe goutte à goutte

Dans les chemins de la nuit…

         

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Rivage de la tristesse

par Pauline T.

                         

L’amour reposait sur un oreiller de vent,

Emporté par le sable au bord d’un naufrage.

L’enfant poussait dans le jardin du bonheur

Naissait à l’aube dans un clair brouillard.

 

L’amour additionnait le bonheur et les larmes

Provoquait le rivage de la tristesse d’une femme

Dans une vie remplie d’images désirables :

Des envies roses, le cœur d’une seule vague à prendre…

               

                   

 

Mes yeux s’ensablent vers le silence

par Fanny D.

                            

La lune chuchote l’avenir léger ; des astres allument

Les constellations enneigées.

Le ciel est bercé par la tristesse de l’inconnu

Le printemps est fané.

              

Mes yeux s’ensablent vers le silence

La nuit ouvre la clé rêveuse

D’un chemin perdu dans les dunes,

Empli de tristesse et de brumes…

                    

                          

Dans le solfège des rêves

par Margot G.

                   

La mort

Comme une musicalité…

Ses regrets naviguent

Dans le solfège des rêves

La mer pour elle comme

Le refrain du mal-être :

Puissante métamorphose rebelle

Dans les tempêtes noires

De la Liberté.

           

 

              

 

Ode à la mer

par Amélie R.

 

Sur la rive étoilée, une colombe arrêtée

Sur le sable.

Au loin, une route

À l’orée de la pluie

S’ouvre éperdument aux désirs enfuis

Vers des avenues d’étoiles.

L’amour du péché apparaît

Sur ce tapis stellaire

Comme un chagrin enfoui

Que la plume ne peut arrêter ;

Une femme emplie d’un plaisir solaire tente d’accéder

À la rose mortuaire.

Cris et pleurs déchéants

Rappellent le vent

Comme une ode à la mer !

                

           

Les néologismes de la lumière

par Marion M.

                 

Le pommier est tordu avec le temps

Tes yeux se figent pour m’anéantir

Les horloges ont terrassé l’amour doré d’une mélodie exaltante

 

La vie célèbre les néologismes de la lumière.

Le soleil me promet une voie lactée de ton sourire

Ma vie est teintée du son de ta voix

Elle envahit mes pensées, colore mon cœur d’arcs-en-ciel et d’oriflammes

 

La nature du mystère est grande comme l’épopée de l’amour

Mêle pénombres et clartés, parfois et toujours

Parmi l’eau fraîche de l’été…

                   

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La moisson des vents

par Charles G.

          

Envolé le cahier rose de l’élève

Pour des rivages plus froids

Moissonnés par les vents.

 

Le vélo transporte ses rancœurs

Et son envie de partir

Vers des mondes éphémères.

 

Les gratte-ciels s’effondrent

Comme à la plage des châteaux de sable

Emportés par la mer…

               

           

(Luna)

par Florence G.

                

Dans l’océan tourbillonnant

Ses yeux fatigués d’enfant

Voient s’éteindre le jour d’un coup de rame.

Les cendres du croissant d’argent

Embrumant l’embrumé signe de liberté

Idéalisant des mondes fantastiques dans le désir et l’oubli

Dans le froid de l’orage noué d’illusions

Prenant le temps

Le rouge recouvrant les larmes de son corps

Et le chagrin songeur se détournait du monde.

Seule la plume ancrée du vent

Se meurt avec lui dans l’océan tourbillonnant

De ses yeux fatigués d’enfant..

(Luna)

              

              

Par delà les monts verts

par Maxime S.

            

L’amour noir de la lune

Pour les immenses fleurs marines

Et le foin orange des prairies.

L’âme arc-en-ciel évadée

D’amours rapides

Par delà les monts verts

Et les glaces enneigées de là-bas…

        

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Sur mes larmes

par Marie B.

 

Samedi, j’ai embrassé quelques chagrins et des orages superficiels

Qui m’ont fait rire de peine.

Dîner avec les larmes aux couleurs pastel,

Courir après l’inspiration aromatisée d’amertume,

Chercher la fragilité d’un soupir abattu de sourires…

La neige, elle, construisait sur mes larmes

La douceur de l’oreiller aussi piquante que des pétales de rose.

              

                 

L’écriture du poète

par Alexia L.

 

Comme les mers hantaient mes rêves cauchemardesques

Je vis soudain tous ces corps inhumains

Parfaitement dessinés au fer rouge de l’aurore

Balancés sur l’étendue brûlante de mon esprit noyé.

                   

Quand je repense aux rivages perdus de mes rancœurs amères

Je ne connais de différences plus séduisantes

Qu’un terrible artifice incendié

Confronté au réel d’innombrables mers.

                     

L’écriture du poète est comme ces peines perdues

Qui le poussent peu à peu vers l’inconnu de la solitude

Et l’eau douce de la vie, là où la mémoire commence,

Tourbillonne à la surface des eaux mouvantes du monde…

                       

                         

Ouragan d’un voyage tel l’oiseau

Fatimatabintou D.

 

Le soir, les étoiles reflètent la vérité

Une vague de repos s’installe sur la mer

Alors je rêve d’une pensée sans mémoire :

Corps d’un immense ciel

Et les souvenirs sombres d’un enfant

Espérant découvrir une lumière

À l’aide du chant comme œuvre :

Le livre ouvert, les mains rouges,

Mais ce n’est pas la couleur du sang…

                   

visage_mer_pastel_1.1289659008.JPG

Fin de la première livraison

Pour voir la suite de l’exposition, cliquez ici.
Crédit iconographique : © Bruno Rigolt (EPC/mai 2010)

              

Exposition « Poèmes Symbolistes » par la classe de Première ES1 Première livraison

La classe de Première ES1 est fière de vous inviter à partager un moment poétique autour du Symbolisme. Préparée en décembre, cette exposition a été présentée pour la première fois lors de la journée Portes ouvertes du lycée, le samedi 20 mars 2010. Certains textes ont bénéficié de quelques remaniements depuis. Je vous invite à découvrir aujourd’hui ces écrits, dont certains sont d’une très grande force tant sur le plan littéraire qu’artistique.

Première livraison

Les poèmes seront mis en ligne progressivement.
Bonne lecture à toutes et à tous !

   Poèmes Symbolistes

par la classe de Première ES1

                               

expo-1es1-symbolisme_cover_1.1273947596.jpg

                 

 

Prélude à ton sourire

par Anaïs M.

                  

J’ai voulu écrire un prélude à ton sourire

Mais l’inspiration ne me guidait plus.

Je me suis perdue dans la thérapie de la vie,

Dans le brouillard de mes pensées.

J’aime le froid de la solitude, tu sais :

Elle me colle à la peau quand mon chagrin

Est à marée haute.

J’ai embrassé le noir fond des ténèbres,

J’ai plongé dans des océans de lumière

Qui rongeaient peu à peu mon cœur de pierre.

Mon amour est un sable mouvant où s’enlise

Le moindre sentiment qui passe

Au rivage de mes lèvres.

Au tourbillon de la vie, mes larmes s’effacent ;

La poussière de mes pensées est une glace qui se brise

Dans la mer, bleue de larmes…

                

                  

Dans les chemins de la nuit

par Marie C.

                       

Une vague disparaît dans la mer : mon cœur s’est plongé dans le tien

L’écume de mes larmes est restée sur le rivage…

La lune tente de consoler le ciel moins bleu,

le vent est l’ennemi du soleil, le vent se lève.

 

Le soleil s’est échoué dans le désespoir de la vie

La lune apparaît, la nuit se crée.

Mon chagrin tombe goutte à goutte

Dans les chemins de la nuit…

         

chemins_nuit.1289657719.jpg

         

Rivage de la tristesse

par Pauline T.

                         

L’amour reposait sur un oreiller de vent,

Emporté par le sable au bord d’un naufrage.

L’enfant poussait dans le jardin du bonheur

Naissait à l’aube dans un clair brouillard.

 

L’amour additionnait le bonheur et les larmes

Provoquait le rivage de la tristesse d’une femme

Dans une vie remplie d’images désirables :

Des envies roses, le cœur d’une seule vague à prendre…

               

                   

 

Mes yeux s’ensablent vers le silence

par Fanny D.

                            

La lune chuchote l’avenir léger ; des astres allument

Les constellations enneigées.

Le ciel est bercé par la tristesse de l’inconnu

Le printemps est fané.

              

Mes yeux s’ensablent vers le silence

La nuit ouvre la clé rêveuse

D’un chemin perdu dans les dunes,

Empli de tristesse et de brumes…

                    

                          

Dans le solfège des rêves

par Margot G.

                   

La mort

Comme une musicalité…

Ses regrets naviguent

Dans le solfège des rêves

La mer pour elle comme

Le refrain du mal-être :

Puissante métamorphose rebelle

Dans les tempêtes noires

De la Liberté.

           

 

              

 

Ode à la mer

par Amélie R.

 

Sur la rive étoilée, une colombe arrêtée

Sur le sable.

Au loin, une route

À l’orée de la pluie

S’ouvre éperdument aux désirs enfuis

Vers des avenues d’étoiles.

L’amour du péché apparaît

Sur ce tapis stellaire

Comme un chagrin enfoui

Que la plume ne peut arrêter ;

Une femme emplie d’un plaisir solaire tente d’accéder

À la rose mortuaire.

Cris et pleurs déchéants

Rappellent le vent

Comme une ode à la mer !

                

           

Les néologismes de la lumière

par Marion M.

                 

Le pommier est tordu avec le temps

Tes yeux se figent pour m’anéantir

Les horloges ont terrassé l’amour doré d’une mélodie exaltante

 

La vie célèbre les néologismes de la lumière.

Le soleil me promet une voie lactée de ton sourire

Ma vie est teintée du son de ta voix

Elle envahit mes pensées, colore mon cœur d’arcs-en-ciel et d’oriflammes

 

La nature du mystère est grande comme l’épopée de l’amour

Mêle pénombres et clartés, parfois et toujours

Parmi l’eau fraîche de l’été…

                   

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La moisson des vents

par Charles G.

          

Envolé le cahier rose de l’élève

Pour des rivages plus froids

Moissonnés par les vents.

 

Le vélo transporte ses rancœurs

Et son envie de partir

Vers des mondes éphémères.

 

Les gratte-ciels s’effondrent

Comme à la plage des châteaux de sable

Emportés par la mer…

               

           

(Luna)

par Florence G.

                

Dans l’océan tourbillonnant

Ses yeux fatigués d’enfant

Voient s’éteindre le jour d’un coup de rame.

Les cendres du croissant d’argent

Embrumant l’embrumé signe de liberté

Idéalisant des mondes fantastiques dans le désir et l’oubli

Dans le froid de l’orage noué d’illusions

Prenant le temps

Le rouge recouvrant les larmes de son corps

Et le chagrin songeur se détournait du monde.

Seule la plume ancrée du vent

Se meurt avec lui dans l’océan tourbillonnant

De ses yeux fatigués d’enfant..

(Luna)

              

              

Par delà les monts verts

par Maxime S.

            

L’amour noir de la lune

Pour les immenses fleurs marines

Et le foin orange des prairies.

L’âme arc-en-ciel évadée

D’amours rapides

Par delà les monts verts

Et les glaces enneigées de là-bas…

        

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Sur mes larmes

par Marie B.

 

Samedi, j’ai embrassé quelques chagrins et des orages superficiels

Qui m’ont fait rire de peine.

Dîner avec les larmes aux couleurs pastel,

Courir après l’inspiration aromatisée d’amertume,

Chercher la fragilité d’un soupir abattu de sourires…

La neige, elle, construisait sur mes larmes

La douceur de l’oreiller aussi piquante que des pétales de rose.

              

                 

L’écriture du poète

par Alexia L.

 

Comme les mers hantaient mes rêves cauchemardesques

Je vis soudain tous ces corps inhumains

Parfaitement dessinés au fer rouge de l’aurore

Balancés sur l’étendue brûlante de mon esprit noyé.

                   

Quand je repense aux rivages perdus de mes rancœurs amères

Je ne connais de différences plus séduisantes

Qu’un terrible artifice incendié

Confronté au réel d’innombrables mers.

                     

L’écriture du poète est comme ces peines perdues

Qui le poussent peu à peu vers l’inconnu de la solitude

Et l’eau douce de la vie, là où la mémoire commence,

Tourbillonne à la surface des eaux mouvantes du monde…

                       

                         

Ouragan d’un voyage tel l’oiseau

Fatimatabintou D.

 

Le soir, les étoiles reflètent la vérité

Une vague de repos s’installe sur la mer

Alors je rêve d’une pensée sans mémoire :

Corps d’un immense ciel

Et les souvenirs sombres d’un enfant

Espérant découvrir une lumière

À l’aide du chant comme œuvre :

Le livre ouvert, les mains rouges,

Mais ce n’est pas la couleur du sang…

                   

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Fin de la première livraison

Pour voir la suite de l’exposition, cliquez ici.
Crédit iconographique : © Bruno Rigolt (EPC/mai 2010)

              

Exposition « Paroles menottées »… Ecriture et engagement… Nouveaux articles !

Découvrez les nouveaux articles de l’exposition « Paroles menottées » qui sera présentée lors de la Journée Portes Ouvertes du Lycée en Forêt le samedi 20 mars 2010.

yannis-ritsos-miniature.1268416857.jpgYannis Ritsos… Pierres, Répétitions, Barreaux…

par Rayan D.

nien-cheng-miniature.1268461427.jpgNien Cheng… Vie et mort à Shanghai…

par Charlotte B.

ruth-first-miniature.1268499164.jpgRuth First… 117 Days…

par Angélique M.

breyten-breytenbach_miniature.1268807326.jpgBreyten Breytenbach… Confession véridique d’un terroriste albinos…

par Maxime C.

Exposition "Paroles menottées"… Ecriture et engagement… Nouveaux articles !

Découvrez les nouveaux articles de l’exposition « Paroles menottées » qui sera présentée lors de la Journée Portes Ouvertes du Lycée en Forêt le samedi 20 mars 2010.
yannis-ritsos-miniature.1268416857.jpgYannis Ritsos… Pierres, Répétitions, Barreaux…
par Rayan D.
nien-cheng-miniature.1268461427.jpgNien Cheng… Vie et mort à Shanghai…
par Charlotte B.
ruth-first-miniature.1268499164.jpgRuth First… 117 Days…
par Angélique M.
breyten-breytenbach_miniature.1268807326.jpgBreyten Breytenbach… Confession véridique d’un terroriste albinos…
par Maxime C.

Ecrire « édition 2010″… par les classes de Seconde 7 et Seconde 18… la suite !

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Pour la deuxième année consécutive (*), les élèves de mes classes sont fiers de vous présenter le fruit de leurs réflexions sur le rôle que revêt à leurs yeux l’écriture. Après avoir mené un important travail de recherche sur la fonction de l’écrivain, les jeunes ont souhaité mettre en ligne leur propre vision de l’écriture. Les propos, d’une grande densité intellectuelle parfois, résument non seulement leurs recherches précédentes, mais en redéfinissent les enjeux à la lumière d’un travail introspectif sur eux-mêmes : “c’est quoi écrire, pour un adolescent européen du vingt-et-unième siècle?”
(*) Voir en particulier les textes publiés le 21 janvier 2009  et le 29 janvier 2009 par la classe de Seconde 12 (année scolaire 2008-2009).
Pour voir les autres textes déjà publiés en 2010, cliquez ici.

              

Tiffany J*** (Seconde 7)

“En parlant, on dit tellement de paroles inutiles que les mots importants finissent par être noyés parmi tant d’autres… »

Le rôle premier de l’écriture, bien au-delà de sa fonction de communication, est d’échapper à un quotidien qu’on ne contrôle pas toujours. Le temps de quelques lignes et les problèmes s’en vont : on s’invente alors un univers nouveau : on rend réel des personnages. Chacun d’eux devient une facette du moi le plus intime, et l’on crée des mondes qui sont le reflet de nous-mêmes : alors nos problèmes et nos peurs disparaissent, et l’on prend du recul face aux difficultés de la vie. L’écriture me permet ainsi de m’évader dans mon propre univers, dont je détiens seule la clé. Il est parfois difficile de parler de ce que l’on ressent, au fond de nous. Tandis qu’avec l’écriture, je me retrouve dans ma bulle, coupée du monde et de ses peurs.

Je peux alors poser des mots sur la feuille : cela me permet d’éclaircir la situation. Il ne s’agit pas forcément pour moi d’écrire un journal intime ; non une histoire suffit, à travers des personnages fictifs et leur vie qui s’invente et se réinvente sous ma plume. Quand j’écris, je m’identifie à mes personnages, en les faisant évoluer : à travers la narration, j’essaie de les aider à résoudre leurs problèmes : en fait, on cherche des réponses à ses propres questions… Mais il y a un point qui me semble essentiel : quand on écrit, on doit se concentrer pour trouver le juste mot, celui qui exprime exactement ce que l’on veut dire. En parlant, on dit tellement de paroles inutiles que les mots importants finissent par être noyés parmi tant d’autres. L’écriture, elle, marque le mot d’une empreinte qui ne s’oublie jamais.

             

Émilie S*** (Seconde 7)

« C’est un peu comme si la pièce dans laquelle nous nous trouvons était aussi blanche que la feuille : sans fenêtre ni porte… »

Quand on écrit, on ne fait qu’un avec sa feuille, tout ce qu’il y a autour disparaît. Les sons, les bruits, les personnes, les objets … tout semble s’effacer, on est seul avec sa page blanche : on ne voit plus que la feuille et le crayon. C’est un peu comme si la pièce dans laquelle nous nous trouvons était aussi blanche que la feuille, sans fenêtre ni porte. Et puis, tout en écrivant, notre feuille prend de la couleur : le blanc du papier se colore de mots et de signes. La pièce se peuple d’objets, de personnages, de paysages qui en redessinent les murs à la mesure de notre imaginaire.

On est comme prisonnier dans notre histoire, on ne peut pas en sortir, mais c’est une capture stimulante : notre main ne s’arrête plus d’écrire, elle est en relation directe avec notre imagination ; elle semble écrire tout ce que peut lui dicter le cerveau. On est absorbé par ce qu’on raconte, par les personnages que l’on crée, on ressent même tous les sentiments que nos personnages éprouvent dans l’histoire. On s’invente ainsi un monde à soi, pour soi. On part en voyage dans des pays de signes et de lettres, à l’autre bout du monde… sans même bouger !

              

Angélique M*** (Seconde 7)

« C’est dans le silence de l’écriture que les sens du mot se réinventent, et qu’ils nous réinventent… »

Tout d’abord, l’écriture me permet d’exprimer mon côté créatif, moi qui serais bien incapable de peindre ou de sculpter, je peux grâce à l’écriture peindre des sentiments, sculpter des mots, des phrases ou des idées. Il n’y a pas de règles alors : je suis comme déconnectée, j’ai le pouvoir de créer un monde où rien n’est impossible. Je m’invente alors des personnages et dans leur virtualité je mets un peu de moi-même, de mon vécu et de mon réel. Mais ce voyage immobile est aussi plus facile à faire grâce aux mots écrits : la feuille est là, comme une confidente quand les mots seraient trop difficiles à prononcer.

Je peux aussi relire et corriger mon texte ! Alors les mots se réinventent, contrairement à la parole qui, une fois prononcée, ne peut plus être modifiée, tout juste déformée. De plus, un mot écrit contient souvent plus de mots que toutes les paroles réunies : c’est dans le silence de l’écriture que les sens du mot se réinventent donc, et nous réinventent : quand les choses sont confuses dans ma tête, je livre mes souvenirs à la feuille, je lui confie mes incompréhensions et mes doutes, mes émotions, mes manques : l’écriture donne un sens à la vie…

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Clémentine G*** (Seconde 7)

« Une écriture «à soi-même», «pour soi-même», serait dénuée d’intérêt : l’écriture est d’abord une forme de partage… »

Écrire, c’est refus d’oublier… L’oubli me fait peur, c’est pourquoi je ressens le besoin de mettre mes souvenirs sur le papier, pour qu’ils existent vraiment : le papier ne connaît pas l’oubli : il devient ma mémoire et mon esprit, en plus simple et plus compréhensible. Les pensées sont souvent un labyrinthe difficile à cerner, à expliquer, à comprendre. Mais les mots eux, sont visibles. Quand ils sont bien placés, ils expriment tellement d’émotions ! Et puis l’écriture, c’est l’évasion : cette écriture si simple, et pourtant si belle quand elle est maîtrisée : même la fiction peut nous amener d’ailleurs à des questionnements ; on s’identifie par exemple à un personnage, celui qui nous ressemble le plus, celui qu’on aurait aimé être.

Cette écriture qui se passe ailleurs, dans un autre monde, permet à chacun de voir différemment ce monde, puisque c’est un monde différent pour chacun : le monde de notre imaginaire. Là où sont « stockés » nos rêves et nos secrets, un monde que jamais personne ne saurait expliquer. Personnellement, j’aime écrire cet imaginaire et le confier aux autres, ce qui m’amène à l’idée de partage : une écriture « à soi-même », « pour soi-même », serait dénuée d’intérêt, tant il est vrai que l’écriture est d’abord une forme de partage : on invite les autres à sa table : on partage des sentiments, des émotions, on donne ses impressions, et on attend ainsi celles des autres en retour. Sans cet échange, l’écrit perd de son sens.

        

Samuel B*** (Seconde 7)

« L’écrivain est un bâtisseur de rêve… Chaque livre est un millier de rêves, un millier de départs, d’exils et de retours… »

L’écrivain est un bâtisseur de langage. Tout comme le bâtisseur choisit ses matériaux, l’écrivain choisit ses personnages qu’il situe dans un temps, un lieu, des actions. Son chantier est immense : il les modèle pour bâtir une histoire. Parfois, l’écriture peut naître d’un rêve : le rêve est fugitif alors que l’écriture permet de le construire : elle élève les fondations du rêve pour en garder la trace, elle construit les murs de l’histoire, et ouvre des fenêtres sur le monde pour partager avec les lecteurs.

Mais l’écrivain est aussi un bâtisseur de rêve. Il ouvre au lecteur la porte de l’évasion en l’emmenant au cœur de son imaginaire : chaque livre est un millier de rêves, un millier de départs, d’exils et de retours. Car l’écriture permet aussi un retour à la réalité : c’est-à-dire dans le monde que l’auteur s’est créé, mais cette réalité inventée par l’auteur, le lecteur la fera sienne : alors elle n’appartiendra plus à l’auteur. Il aura bâti la maison, et d’autres l’habiteront…

           

Johanna H*** (Seconde 7)

« Écrire, en prenant conscience qu’on écrit, est essentiel : l’écriture est une pensée. »

Tout a commencé avec de la terre et des pierres… Ces dessins sur les parois des cavernes ou des grottes sont la base même de l’écriture. Ou plutôt des écritures : la diversité des alphabets est telle selon les civilisations et les situations géographiques que de simples mots : lettres, dessins, symboles, idéogrammes… nous aident à comprendre notre propre histoire. L’évolution des langues nous a ainsi permis de découvrir la diversité de notre monde, c’est-à-dire son sens. Écrire, c’est donner du sens, sans ça, le monde serait profondément nihiliste : il ne se baserait que sur une seule et même façon de voir, de penser.

Les variations de l’écriture au fil des âges ont également un sens profond : on écrit d’abord pour montrer qu’on existe, pour se rappeler aussi d’où nous venons. Si la parole a un pouvoir indéniable, l’écriture est encore plus puissante parce qu’elle est une justification de notre présence aux autres, mais aussi à soi-même : écrire pour soi-même, c’est aussi écrire pour se soulager et se découvrir « autre ». Il y a tellement de façons d’écrire que cela pourrait presque en devenir banal : nous écrivons tellement « sans réfléchir » ! Sauf qu’il n’y a pas de banalité dans l’écriture : écrire, en prenant conscience qu’on écrit —par le seul fait de se sentir vivant— est essentiel : l’écriture est une pensée. Le simple fait d’écrire relève d’un acte conscient. Mais une fois posée la question « Pourquoi écrire », en vient une autre : « comment écrire » ? La réponse est enfouie au plus profond de nous…

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Aurélie V*** (Seconde 7)

« L’écriture détruit les barrières de la vie. Il n’y a plus de classes sociales avec les mots… Écrire est une délivrance. »

Écrire ce que l’on a sur le cœur, au plus profond de soi, écrire nos espoirs, nos désespoirs… Voilà le sens premier de l’écriture. Paradoxalement, il est parfois plus facile d’écrire que de parler : l’écriture est une parole différée. À l’oral par exemple, on ne réfléchit pas toujours, alors que l’écrit nous oblige à un travail sur les mots, sur la phrase, sur la syntaxe… Et ce travail amène à partager ses émotions : l’écriture détruit ainsi les barrières de la vie. Il n’y a plus de classes sociales avec les mots.

Mais pour bien écrire, il faut prendre du plaisir au mots et au texte. Écrire sous la contrainte, c’est ne pas donner du sens à l’écriture, et alors le récit sera mauvais. Mais si l’on aime écrire, alors le voyage commence : si le travail ne nous plait pas, ce n’est pas grave, on recommence : il y a d’infinis possibles dans l’écriture. Écrire, c’est ainsi réinventer les mots, et au-delà des mots, c’est réinventer la vie, donc se réinventer. Écrire est une délivrance…

         

Florian C*** (Seconde 7)

« Écrire, c’est s’inventer des mondes, créer la vie, faire évoluer tout un univers comme Dieu qui pendant six jours créa la terre… »

S’inventer des mondes, voilà le sens profond de l’écriture : s’inventer des mondes, créer la vie, faire évoluer tout un univers comme Dieu qui pendant six jours créa la terre, les mers et océans ainsi que les animaux et les végétaux : on est presque Dieu par l’écriture, on fait vivre nos personnages ou on les fait mourir, tuer, aimer, évoluer. On a ainsi un vrai pouvoir sur eux comme un roi sur ses terres en son royaume. Écrire permet ainsi de réinventer la vie réelle : je peux inventer une ou plusieurs vies, dans une ou plusieurs époques, dans un ou plusieurs lieux…

          

Lucie L*** (Seconde 7)

« L’écrivain doit immortaliser par les mots tous ces moments qui sans lui seraient perdus dans l’oubli… »

Écrire est la clé pour accéder à limaginaire. C’est un moyen de changer le monde, de le façonner selon ses désirs. Comme un peintre qui exposerait sa toile, ou un musicien qui chercherait à traduire ses sentiments avec des notes, l’écrivain crée son univers et le fait partager au lecteur. Il l’amène ainsi à se libérer des contraintes, des peurs et des dangers de la vie, en réinventant son monde : choisir un livre dans une bibliothèque ou une librairie, c’est ainsi choisir une destination, un univers.

Et c’est découvrir un nouveau monde : le lecteur se retrouve parfois sur une planète lointaine à vivre des aventures fantastiques créées de toutes pièces par la magie du langage, l’entrechoquement des mots et des phrases. L’écriture est donc pour moi un moyen de graver des événements, de sculpter des pensées. Comme l’artiste, il lui appartient d’immortaliser par les mots tous ces moments qui sans lui seraient perdus dans l’oubli…

Les autres textes seront publiés prochainement.
© Les auteur(e)s, LEF/EPC (mars 2010)

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Ecrire "édition 2010"… par les classes de Seconde 7 et Seconde 18… la suite !

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Pour la deuxième année consécutive (*), les élèves de mes classes sont fiers de vous présenter le fruit de leurs réflexions sur le rôle que revêt à leurs yeux l’écriture. Après avoir mené un important travail de recherche sur la fonction de l’écrivain, les jeunes ont souhaité mettre en ligne leur propre vision de l’écriture. Les propos, d’une grande densité intellectuelle parfois, résument non seulement leurs recherches précédentes, mais en redéfinissent les enjeux à la lumière d’un travail introspectif sur eux-mêmes : “c’est quoi écrire, pour un adolescent européen du vingt-et-unième siècle?”
(*) Voir en particulier les textes publiés le 21 janvier 2009  et le 29 janvier 2009 par la classe de Seconde 12 (année scolaire 2008-2009).
Pour voir les autres textes déjà publiés en 2010, cliquez ici.

              

Tiffany J*** (Seconde 7)

“En parlant, on dit tellement de paroles inutiles que les mots importants finissent par être noyés parmi tant d’autres… »

Le rôle premier de l’écriture, bien au-delà de sa fonction de communication, est d’échapper à un quotidien qu’on ne contrôle pas toujours. Le temps de quelques lignes et les problèmes s’en vont : on s’invente alors un univers nouveau : on rend réel des personnages. Chacun d’eux devient une facette du moi le plus intime, et l’on crée des mondes qui sont le reflet de nous-mêmes : alors nos problèmes et nos peurs disparaissent, et l’on prend du recul face aux difficultés de la vie. L’écriture me permet ainsi de m’évader dans mon propre univers, dont je détiens seule la clé. Il est parfois difficile de parler de ce que l’on ressent, au fond de nous. Tandis qu’avec l’écriture, je me retrouve dans ma bulle, coupée du monde et de ses peurs.

Je peux alors poser des mots sur la feuille : cela me permet d’éclaircir la situation. Il ne s’agit pas forcément pour moi d’écrire un journal intime ; non une histoire suffit, à travers des personnages fictifs et leur vie qui s’invente et se réinvente sous ma plume. Quand j’écris, je m’identifie à mes personnages, en les faisant évoluer : à travers la narration, j’essaie de les aider à résoudre leurs problèmes : en fait, on cherche des réponses à ses propres questions… Mais il y a un point qui me semble essentiel : quand on écrit, on doit se concentrer pour trouver le juste mot, celui qui exprime exactement ce que l’on veut dire. En parlant, on dit tellement de paroles inutiles que les mots importants finissent par être noyés parmi tant d’autres. L’écriture, elle, marque le mot d’une empreinte qui ne s’oublie jamais.

             

Émilie S*** (Seconde 7)

« C’est un peu comme si la pièce dans laquelle nous nous trouvons était aussi blanche que la feuille : sans fenêtre ni porte… »

Quand on écrit, on ne fait qu’un avec sa feuille, tout ce qu’il y a autour disparaît. Les sons, les bruits, les personnes, les objets … tout semble s’effacer, on est seul avec sa page blanche : on ne voit plus que la feuille et le crayon. C’est un peu comme si la pièce dans laquelle nous nous trouvons était aussi blanche que la feuille, sans fenêtre ni porte. Et puis, tout en écrivant, notre feuille prend de la couleur : le blanc du papier se colore de mots et de signes. La pièce se peuple d’objets, de personnages, de paysages qui en redessinent les murs à la mesure de notre imaginaire.

On est comme prisonnier dans notre histoire, on ne peut pas en sortir, mais c’est une capture stimulante : notre main ne s’arrête plus d’écrire, elle est en relation directe avec notre imagination ; elle semble écrire tout ce que peut lui dicter le cerveau. On est absorbé par ce qu’on raconte, par les personnages que l’on crée, on ressent même tous les sentiments que nos personnages éprouvent dans l’histoire. On s’invente ainsi un monde à soi, pour soi. On part en voyage dans des pays de signes et de lettres, à l’autre bout du monde… sans même bouger !

              

Angélique M*** (Seconde 7)

« C’est dans le silence de l’écriture que les sens du mot se réinventent, et qu’ils nous réinventent… »

Tout d’abord, l’écriture me permet d’exprimer mon côté créatif, moi qui serais bien incapable de peindre ou de sculpter, je peux grâce à l’écriture peindre des sentiments, sculpter des mots, des phrases ou des idées. Il n’y a pas de règles alors : je suis comme déconnectée, j’ai le pouvoir de créer un monde où rien n’est impossible. Je m’invente alors des personnages et dans leur virtualité je mets un peu de moi-même, de mon vécu et de mon réel. Mais ce voyage immobile est aussi plus facile à faire grâce aux mots écrits : la feuille est là, comme une confidente quand les mots seraient trop difficiles à prononcer.

Je peux aussi relire et corriger mon texte ! Alors les mots se réinventent, contrairement à la parole qui, une fois prononcée, ne peut plus être modifiée, tout juste déformée. De plus, un mot écrit contient souvent plus de mots que toutes les paroles réunies : c’est dans le silence de l’écriture que les sens du mot se réinventent donc, et nous réinventent : quand les choses sont confuses dans ma tête, je livre mes souvenirs à la feuille, je lui confie mes incompréhensions et mes doutes, mes émotions, mes manques : l’écriture donne un sens à la vie…

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Clémentine G*** (Seconde 7)

« Une écriture «à soi-même», «pour soi-même», serait dénuée d’intérêt : l’écriture est d’abord une forme de partage… »

Écrire, c’est refus d’oublier… L’oubli me fait peur, c’est pourquoi je ressens le besoin de mettre mes souvenirs sur le papier, pour qu’ils existent vraiment : le papier ne connaît pas l’oubli : il devient ma mémoire et mon esprit, en plus simple et plus compréhensible. Les pensées sont souvent un labyrinthe difficile à cerner, à expliquer, à comprendre. Mais les mots eux, sont visibles. Quand ils sont bien placés, ils expriment tellement d’émotions ! Et puis l’écriture, c’est l’évasion : cette écriture si simple, et pourtant si belle quand elle est maîtrisée : même la fiction peut nous amener d’ailleurs à des questionnements ; on s’identifie par exemple à un personnage, celui qui nous ressemble le plus, celui qu’on aurait aimé être.

Cette écriture qui se passe ailleurs, dans un autre monde, permet à chacun de voir différemment ce monde, puisque c’est un monde différent pour chacun : le monde de notre imaginaire. Là où sont « stockés » nos rêves et nos secrets, un monde que jamais personne ne saurait expliquer. Personnellement, j’aime écrire cet imaginaire et le confier aux autres, ce qui m’amène à l’idée de partage : une écriture « à soi-même », « pour soi-même », serait dénuée d’intérêt, tant il est vrai que l’écriture est d’abord une forme de partage : on invite les autres à sa table : on partage des sentiments, des émotions, on donne ses impressions, et on attend ainsi celles des autres en retour. Sans cet échange, l’écrit perd de son sens.

        

Samuel B*** (Seconde 7)

« L’écrivain est un bâtisseur de rêve… Chaque livre est un millier de rêves, un millier de départs, d’exils et de retours… »

L’écrivain est un bâtisseur de langage. Tout comme le bâtisseur choisit ses matériaux, l’écrivain choisit ses personnages qu’il situe dans un temps, un lieu, des actions. Son chantier est immense : il les modèle pour bâtir une histoire. Parfois, l’écriture peut naître d’un rêve : le rêve est fugitif alors que l’écriture permet de le construire : elle élève les fondations du rêve pour en garder la trace, elle construit les murs de l’histoire, et ouvre des fenêtres sur le monde pour partager avec les lecteurs.

Mais l’écrivain est aussi un bâtisseur de rêve. Il ouvre au lecteur la porte de l’évasion en l’emmenant au cœur de son imaginaire : chaque livre est un millier de rêves, un millier de départs, d’exils et de retours. Car l’écriture permet aussi un retour à la réalité : c’est-à-dire dans le monde que l’auteur s’est créé, mais cette réalité inventée par l’auteur, le lecteur la fera sienne : alors elle n’appartiendra plus à l’auteur. Il aura bâti la maison, et d’autres l’habiteront…

           

Johanna H*** (Seconde 7)

« Écrire, en prenant conscience qu’on écrit, est essentiel : l’écriture est une pensée. »

Tout a commencé avec de la terre et des pierres… Ces dessins sur les parois des cavernes ou des grottes sont la base même de l’écriture. Ou plutôt des écritures : la diversité des alphabets est telle selon les civilisations et les situations géographiques que de simples mots : lettres, dessins, symboles, idéogrammes… nous aident à comprendre notre propre histoire. L’évolution des langues nous a ainsi permis de découvrir la diversité de notre monde, c’est-à-dire son sens. Écrire, c’est donner du sens, sans ça, le monde serait profondément nihiliste : il ne se baserait que sur une seule et même façon de voir, de penser.

Les variations de l’écriture au fil des âges ont également un sens profond : on écrit d’abord pour montrer qu’on existe, pour se rappeler aussi d’où nous venons. Si la parole a un pouvoir indéniable, l’écriture est encore plus puissante parce qu’elle est une justification de notre présence aux autres, mais aussi à soi-même : écrire pour soi-même, c’est aussi écrire pour se soulager et se découvrir « autre ». Il y a tellement de façons d’écrire que cela pourrait presque en devenir banal : nous écrivons tellement « sans réfléchir » ! Sauf qu’il n’y a pas de banalité dans l’écriture : écrire, en prenant conscience qu’on écrit —par le seul fait de se sentir vivant— est essentiel : l’écriture est une pensée. Le simple fait d’écrire relève d’un acte conscient. Mais une fois posée la question « Pourquoi écrire », en vient une autre : « comment écrire » ? La réponse est enfouie au plus profond de nous…

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Aurélie V*** (Seconde 7)

« L’écriture détruit les barrières de la vie. Il n’y a plus de classes sociales avec les mots… Écrire est une délivrance. »

Écrire ce que l’on a sur le cœur, au plus profond de soi, écrire nos espoirs, nos désespoirs… Voilà le sens premier de l’écriture. Paradoxalement, il est parfois plus facile d’écrire que de parler : l’écriture est une parole différée. À l’oral par exemple, on ne réfléchit pas toujours, alors que l’écrit nous oblige à un travail sur les mots, sur la phrase, sur la syntaxe… Et ce travail amène à partager ses émotions : l’écriture détruit ainsi les barrières de la vie. Il n’y a plus de classes sociales avec les mots.

Mais pour bien écrire, il faut prendre du plaisir au mots et au texte. Écrire sous la contrainte, c’est ne pas donner du sens à l’écriture, et alors le récit sera mauvais. Mais si l’on aime écrire, alors le voyage commence : si le travail ne nous plait pas, ce n’est pas grave, on recommence : il y a d’infinis possibles dans l’écriture. Écrire, c’est ainsi réinventer les mots, et au-delà des mots, c’est réinventer la vie, donc se réinventer. Écrire est une délivrance…

         

Florian C*** (Seconde 7)

« Écrire, c’est s’inventer des mondes, créer la vie, faire évoluer tout un univers comme Dieu qui pendant six jours créa la terre… »

S’inventer des mondes, voilà le sens profond de l’écriture : s’inventer des mondes, créer la vie, faire évoluer tout un univers comme Dieu qui pendant six jours créa la terre, les mers et océans ainsi que les animaux et les végétaux : on est presque Dieu par l’écriture, on fait vivre nos personnages ou on les fait mourir, tuer, aimer, évoluer. On a ainsi un vrai pouvoir sur eux comme un roi sur ses terres en son royaume. Écrire permet ainsi de réinventer la vie réelle : je peux inventer une ou plusieurs vies, dans une ou plusieurs époques, dans un ou plusieurs lieux…

          

Lucie L*** (Seconde 7)

« L’écrivain doit immortaliser par les mots tous ces moments qui sans lui seraient perdus dans l’oubli… »

Écrire est la clé pour accéder à limaginaire. C’est un moyen de changer le monde, de le façonner selon ses désirs. Comme un peintre qui exposerait sa toile, ou un musicien qui chercherait à traduire ses sentiments avec des notes, l’écrivain crée son univers et le fait partager au lecteur. Il l’amène ainsi à se libérer des contraintes, des peurs et des dangers de la vie, en réinventant son monde : choisir un livre dans une bibliothèque ou une librairie, c’est ainsi choisir une destination, un univers.

Et c’est découvrir un nouveau monde : le lecteur se retrouve parfois sur une planète lointaine à vivre des aventures fantastiques créées de toutes pièces par la magie du langage, l’entrechoquement des mots et des phrases. L’écriture est donc pour moi un moyen de graver des événements, de sculpter des pensées. Comme l’artiste, il lui appartient d’immortaliser par les mots tous ces moments qui sans lui seraient perdus dans l’oubli…

Les autres textes seront publiés prochainement.
© Les auteur(e)s, LEF/EPC (mars 2010)

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“De mots, de rimes et de sables”… Suite de l’exposition de poésies par la classe de Première S3

Suite de l’exposition

“De mots, de rimes et de sables”

par la classe de Première S3

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____

Voici le deuxième volet de l’exposition « De mots, de rimes et de sables »

__

Pour accéder à la première partie de l’exposition, cliquez ici.

               

                 

Se lever encore pour revivre les journées d’hier

Dorian

              

La douce lumière du matin entre dans la pièce

Mais la journée que je vis n’est que redite et répétition d’ennui,

Me levant seul dans la poussière et la sombrité

D’une maison vide…

Partir pour vivre de nouvelles clartés et d’autres soleils !

Mon cœur se perdra dans les brumes océaniques.

Des esprits sauvages opportuns me sauveront de la noyade.

Mon corps se trouvera plongé dans des matins

Au sourire de voyage…

                 

                    

D’or et de soir

Maeva, Alexia

        

La lumière exagérée de mes pensées
Fait battre mon cœur :
Une envie de tuer telle une évasion de couleurs
Dans un je agressif
Permet le devoir assassiné tel une perle de galère
Dans un espoir noir
Qui danse une envie d’ailleurs :

Douceur des nuages embrassés,
Amour dans tes yeux de rêve :
C’est l’élément de piqûre ennuyé,
C’est le bâton de souffrance
C’est le souvenir de cette passion au ciel envolé
La cause de ce jour de beauté.

Un morceau de chaîne rouge, rouge
Qui dans la douce mer bouge
Entraîne au loin la crise du malheur
Mêlé de vivante humanité…
Et ma poésie qui mourait d’espérance
Faisait naître la négation de cadavres malchanceux envolés de vent

Et la tendresse du pont de nos bras adoucis

Finissant en rêve,

Par une nuit alanguie

D’or et de soir…

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« D’or et de soir », d’après Odilon Redon, « Les Yeux clos« , © Maeva, Alexia, BR/EPC février 2010

                   

                    

Étrange fleur soluble

Arnaud

                

Précises phrases racontant mieux et tendrement
Les oiseaux de lumière marchant sous les ciels
Comme s’évaporent les choses.

Enfin maintenant étouffant les voix filtrantes,
La langue d’Ésope, doux poème percevant la plume,
Précises phrases racontant les oiseaux de lumière…

Reconnaître l’espoir d’un amour tombant
Par des mots nouveaux conduisant à un sentiment inconnu :
Bouleversement dramatique, étrange fleur soluble. 

                    

           

Fuite vers un ailleurs

Maëlise

             

L’amour naissant, la haine s’évapore doucement :

La rose rouge de la passion se prête à rêver,

La colère se fane…

Le  fleuve de paix colore les soirs d’été :

Sérénité, calme et silence de la nuit !

Tout bruit cesse, seule au milieu de nulle part,

Je me pose dans mes pensées…

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« Fuite vers un ailleurs », © Maëlise R. Crédit iconographique : Bruno Rigolt/EPC février 2010

                

               

Controverse des nuits d’ivresse

Pauline

             

Bercée par cette folle envie fâcheuse d’anéantir la triste rosée froide des herbes noires de ces nuits inachevées des matins de novembre…

Ce mois résonne tel un cataclysme me disant que la chaleur s’est envolée, comme ces colombes sédentaires fuyant arbres et continents.

Les matins secs et lourds ont donné place aux manteaux de velours :

C’est la controverse des nuits d’ivresse au feu de bois.

Je vends des miracles ineffables, et d’hivernales paroles :

Je ne dois pas oublier de vous parler de cette terre blanche qui se fait attendre peu à peu.

Le sommeil est triste, un brin cassant ; les journées courtes comme un livre inachevé

Laissant des cicatrices…

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© Pauline M. pour le texte. Crédit iconographique : Bruno Rigolt/EPC février 2010

               

                    

Planète

Adeline

                 

La terre est constituée d’îles et d’archipels sortis des mers :
Les vagues font un voyage au centre de la terre.

Les déplacements et affrontements des plaques
Se forment sous les mers, des tsunamis s’en vont et viennent

Naufrageant des terres promises.
La Belle au bois dormant croise des arbres flottants

Au gré des continents
Où s’envolent des hommes en voyage…

             

                   

Prête à m’envoler

Camille

               

Je m’enfonce dans ce mystère comme dans le rouge

Blanchâtre d’une mousse d’amour.

L’envie de ta peau se répand sur mes lèvres

Mais la mémoire inconnue du temps qui passe

Me fait oublier les feuilles de vieillesse de l’arbre familial.

Je pense à nous en contemplant nos racines communes,

Prête à m’envoler

Vers tous les océans de ta beauté perpétuée !

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« Prête à m’envoler » © Camille L. Crédit iconographique : Bruno Rigolt/EPC février 2010

              

                 

Haïku mélancolique

Angélique, Marine

            

Vie est vernis de soleil,
Dore et illumine
Le ciel  de mon avenir

Et puis comme fleur
Mon bonheur se fane :

Le rire des enfants
Exilés, irisés

S’est envolé dans le vent.
Et la brise traversa
Mes songes vertigineux.

              

              

Où le temps ne serait que sable

par Sofia

              

La fille à la solitude rouge, dans le Noir des champs de l’amour amer…

Que devient la rencontre de là-bas où l’hier s’inquiétait de l’impossible ?

Sans l’argent du soleil, où irait cet être ? Qui embellira le sang de ce cœur naufragé ?

Cette colombe reviendra peut-être pour un désir de l’ailleurs ?

Rarement le parfum de cet être qui dans le vent se réveilla

D’une tentation, d’un cauchemar, parvint jusqu’à la mer…

La mer, la mer : un symbole de rivage où le temps ne serait que sable

De l’écume de nos cœurs qui ne faisaient plus qu’Un…

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« Où le temps ne serait que sable » (d’après Magritte « La grande famille ») © Sofia V., BR/EPC février 2010

                     

                    

Je me lève

Camille

Je me lève cette nuit avec ton image dans la tête

À moitié endormie, je regarde par la fenêtre :

Le vent coule en larmes-prunes aux pieds de la lune…

                                                      

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© Les auteur(e)s (EPC/Lycée en Forêt, Montargis, France), février 2010

“De mots, de rimes et de sables”… Suite de l'exposition de poésies par la classe de Première S3

Suite de l’exposition

“De mots, de rimes et de sables”

par la classe de Première S3

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Voici le deuxième volet de l’exposition « De mots, de rimes et de sables »

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Pour accéder à la première partie de l’exposition, cliquez ici.

               

                 

Se lever encore pour revivre les journées d’hier

Dorian

              

La douce lumière du matin entre dans la pièce

Mais la journée que je vis n’est que redite et répétition d’ennui,

Me levant seul dans la poussière et la sombrité

D’une maison vide…

Partir pour vivre de nouvelles clartés et d’autres soleils !

Mon cœur se perdra dans les brumes océaniques.

Des esprits sauvages opportuns me sauveront de la noyade.

Mon corps se trouvera plongé dans des matins

Au sourire de voyage…

                 

                    

D’or et de soir

Maeva, Alexia

        

La lumière exagérée de mes pensées
Fait battre mon cœur :
Une envie de tuer telle une évasion de couleurs
Dans un je agressif
Permet le devoir assassiné tel une perle de galère
Dans un espoir noir
Qui danse une envie d’ailleurs :

Douceur des nuages embrassés,
Amour dans tes yeux de rêve :
C’est l’élément de piqûre ennuyé,
C’est le bâton de souffrance
C’est le souvenir de cette passion au ciel envolé
La cause de ce jour de beauté.

Un morceau de chaîne rouge, rouge
Qui dans la douce mer bouge
Entraîne au loin la crise du malheur
Mêlé de vivante humanité…
Et ma poésie qui mourait d’espérance
Faisait naître la négation de cadavres malchanceux envolés de vent

Et la tendresse du pont de nos bras adoucis

Finissant en rêve,

Par une nuit alanguie

D’or et de soir…

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« D’or et de soir », d’après Odilon Redon, « Les Yeux clos« , © Maeva, Alexia, BR/EPC février 2010

                   

                    

Étrange fleur soluble

Arnaud

                

Précises phrases racontant mieux et tendrement
Les oiseaux de lumière marchant sous les ciels
Comme s’évaporent les choses.

Enfin maintenant étouffant les voix filtrantes,
La langue d’Ésope, doux poème percevant la plume,
Précises phrases racontant les oiseaux de lumière…

Reconnaître l’espoir d’un amour tombant
Par des mots nouveaux conduisant à un sentiment inconnu :
Bouleversement dramatique, étrange fleur soluble. 

                    

           

Fuite vers un ailleurs

Maëlise

             

L’amour naissant, la haine s’évapore doucement :

La rose rouge de la passion se prête à rêver,

La colère se fane…

Le  fleuve de paix colore les soirs d’été :

Sérénité, calme et silence de la nuit !

Tout bruit cesse, seule au milieu de nulle part,

Je me pose dans mes pensées…

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« Fuite vers un ailleurs », © Maëlise R. Crédit iconographique : Bruno Rigolt/EPC février 2010

                

               

Controverse des nuits d’ivresse

Pauline

             

Bercée par cette folle envie fâcheuse d’anéantir la triste rosée froide des herbes noires de ces nuits inachevées des matins de novembre…

Ce mois résonne tel un cataclysme me disant que la chaleur s’est envolée, comme ces colombes sédentaires fuyant arbres et continents.

Les matins secs et lourds ont donné place aux manteaux de velours :

C’est la controverse des nuits d’ivresse au feu de bois.

Je vends des miracles ineffables, et d’hivernales paroles :

Je ne dois pas oublier de vous parler de cette terre blanche qui se fait attendre peu à peu.

Le sommeil est triste, un brin cassant ; les journées courtes comme un livre inachevé

Laissant des cicatrices…

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© Pauline M. pour le texte. Crédit iconographique : Bruno Rigolt/EPC février 2010

               

                    

Planète

Adeline

                 

La terre est constituée d’îles et d’archipels sortis des mers :
Les vagues font un voyage au centre de la terre.

Les déplacements et affrontements des plaques
Se forment sous les mers, des tsunamis s’en vont et viennent

Naufrageant des terres promises.
La Belle au bois dormant croise des arbres flottants

Au gré des continents
Où s’envolent des hommes en voyage…

             

                   

Prête à m’envoler

Camille

               

Je m’enfonce dans ce mystère comme dans le rouge

Blanchâtre d’une mousse d’amour.

L’envie de ta peau se répand sur mes lèvres

Mais la mémoire inconnue du temps qui passe

Me fait oublier les feuilles de vieillesse de l’arbre familial.

Je pense à nous en contemplant nos racines communes,

Prête à m’envoler

Vers tous les océans de ta beauté perpétuée !

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« Prête à m’envoler » © Camille L. Crédit iconographique : Bruno Rigolt/EPC février 2010

              

                 

Haïku mélancolique

Angélique, Marine

            

Vie est vernis de soleil,
Dore et illumine
Le ciel  de mon avenir

Et puis comme fleur
Mon bonheur se fane :

Le rire des enfants
Exilés, irisés

S’est envolé dans le vent.
Et la brise traversa
Mes songes vertigineux.

              

              

Où le temps ne serait que sable

par Sofia

              

La fille à la solitude rouge, dans le Noir des champs de l’amour amer…

Que devient la rencontre de là-bas où l’hier s’inquiétait de l’impossible ?

Sans l’argent du soleil, où irait cet être ? Qui embellira le sang de ce cœur naufragé ?

Cette colombe reviendra peut-être pour un désir de l’ailleurs ?

Rarement le parfum de cet être qui dans le vent se réveilla

D’une tentation, d’un cauchemar, parvint jusqu’à la mer…

La mer, la mer : un symbole de rivage où le temps ne serait que sable

De l’écume de nos cœurs qui ne faisaient plus qu’Un…

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« Où le temps ne serait que sable » (d’après Magritte « La grande famille ») © Sofia V., BR/EPC février 2010

                     

                    

Je me lève

Camille

Je me lève cette nuit avec ton image dans la tête

À moitié endormie, je regarde par la fenêtre :

Le vent coule en larmes-prunes aux pieds de la lune…

                                                      

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© Les auteur(e)s (EPC/Lycée en Forêt, Montargis, France), février 2010

La citation de la semaine… Michel Butor…

« … se peignent en rouge sur un rectangle blanc les grandes lettres que vous attendiez… »

La hauteur des maisons diminue, le désordre de leur disposition s’accentue, les accrocs dans le tissu urbain se multiplient, les buissons au bord de la route, les arbres qui se dépouillent de leurs feuilles, les premières plaques de boue, les premiers morceaux de campagne déjà presque plus verte sous le ciel bas, devant la ligne de collines qui se devine à l’horizon avec ses bois.

[…]. Balayant vivement de leur raie noire toute l’étendue de la vitre, se succèdent sans interruption les poteaux de ciment ou de fer ; montent, s’écartent, redescendent, reviennent, s’entrecroisent, se multiplient, se réunissent, rythmés par leurs isolateurs, les fils téléphoniques semblables à une complexe portée musicale, non point chargée de notes, mais indiquant les sons et leurs mariages par le simple jeu de ses lignes.

Un peu plus loin, un peu plus lente, la masse des bois de moins en moins interrompue de villages ou de maisons, tourne sur elle-même, s’entrouvre en une allée, se replie comme se masquant derrière un de ses membres.

C’est une véritable forêt que le train longe, non, traverse, puisqu’au-delà de ce carreau où s’appuie toujours votre tempe, de l’autre côté du corridor vide maintenant et de ses vitres dont vous apercevez toujours la succession jusqu’à l’extrémité du wagon, c’est le même spectacle de futaie broussailleuse et terne qui va s’épaississant.

La voie ferrée y creuse une tranchée qui se resserre de telle sorte que vous ne voyez plus du tout le ciel, que le sol même se relève en de hauts remblais de terre nue ou de maçonnerie sur laquelle un instant, juste le temps de les reconnaître, se peignent en rouge sur un rectangle blanc les grandes lettres que vous attendiez certes, mais peut-être pas aussi tôt, que vous avez lues maintes fois, que vous guettez à chaque passage pourvu qu’il fasse jour, parce qu’elles vous indiquent soit que l’arrivée est prochaine soit que le voyage est vraiment commencé.

[…] De l’autre côté du corridor, une onze chevaux noire démarre devant une église, suit une route qui longe la voie, rivalise avec vous de vitesse, se rapproche, s’éloigne, disparaît derrière un bois, reparaît, traverse un petit fleuve avec ses saules et une barque abandonnée, se laisse distancer, rattrape le chemin perdu, puis s’arrête à un carrefour, tourne et s’enfuit vers un village dont le clocher bientôt s’efface derrière un repli de terrain. Passe la gare de Montereau. »

Michel Butor, La Modification, Les Éditions de Minuit, Paris 1957.


Michel Butor, Photomontage (© Bruno Rigolt, février 2010)

Rédigée en 1957, la Modification apparaît d’emblée comme un texte fondateur de ce qu’on appellera « le nouveau roman ». Certes, il est possible de lire le livre comme un roman traditionnel. L’histoire est au demeurant très banale : le héros, Léon Delmont, directeur pour la France d’une société italienne, 45 ans marié, quatre enfants, habitant Place du Panthéon à Paris part pour Rome (où il va une fois par mois environ) à l’insu de ses patrons pour rejoindre sa maîtresse, Cécile Darcella, qu’il a rencontrée deux ans auparavant. Il lui a trouvé un emploi à Paris et compte rompre avec sa femme Henriette, sur l’insistance de Cécile qui supporte de moins en moins cette situation fausse. Pour ne pas être reconnu, il est monté dans un compartiment de troisième classe. Au fur et à mesure que progresse le voyage (au demeurant très inconfortable), Delmont est gagné par la crainte de devoir quitter sa femme et de supporter une Cécile devenue soudain encombrante si elle s’installait à Paris. D’où le titre du roman : toute l’histoire repose en effet sur la « modification » du projet initial. Finalement à son arrivée à Rome, Léon Delmont repart le soir même pour Paris sans avoir parlé à Cécile : il n’y aura eu aucune « modification » du « train-train »quotidien !

Ce n’est donc pas au niveau de l’histoire que réside l’intérêt de ce roman mais plutôt de la façon dont elle est racontée et qui valut à son auteur une reconnaissance quasi unanime : en premier lieu, Butor a délaissé la traditionnelle narration à la première ou à la troisième personne pour privilégier tout au long du livre un monologue intérieur, mais à la deuxième personne du pluriel. Dès les premières lignes, le lecteur est ainsi bouleversé dans ses habitudes et se sent presque « mis en accusation » :

Vous avez mis le pied gauche sur la rainure de cuivre, et de votre épaule droite vous essayez en vain de pousser un peu plus le panneau coulissant.
Vous vous introduisez par l’étroite ouverture en vous frottant contre ses bords, puis, votre valise couverte de granuleux cuir sombre couleur d’épaisse bouteille, votre valise assez petite d’homme habitué aux longs voyages, vous l’arrachez par sa poignée collante, avec vos doigts qui se sont échauffés, si peu lourde qu’elle soit, de l’avoir portée jusqu’ici, vous la soulevez et vous sentez vos muscles et vos tendons se dessiner non seulement dans vos phalanges, dans votre paume, votre poignet et votre bras, mais dans votre épaule aussi, dans toute la moitié du dos et dans vos vertèbres depuis votre cou jusqu’aux reins.

À cette contestation des règles traditionnelles de l’énonciation, s’ajoute une transgression des codes romanesques, caractéristique de ce qu’on appellera le Nouveau roman. Le personnage, “soupçonné” d’être “trop honnête”, trop “ordinaire” est littéralement “assassiné” par cette entreprise de démystification du romanesque : de là les tentatives de nombreux écrivains (Alain Robbe-Grillet, chef de file du mouvement, Michel Butor, Nathalie Sarraute) d’abandonner les accessoires classiques du roman, au point d’appauvrir considérablement l’intrigue (d’un point de vue narratif, il ne se passe pas grand chose dans ces romans) pour mieux prendre de recul avec le réel. Le but en effet n’est pas de divertir, mais plutôt d’amener le lecteur à une distance critique vis-à-vis du romanesque traditionnel : Delmont n’a rien du héros exceptionnel ; bien au contraire : c’est le type même de l’homme dans ce qu’il a de plus quelconque, sans poids ni épaisseur, mais décrit dans son évolution psychologique d’une façon presque clinique, qui provoque parfois le malaise.

De fait, ce parti pris ultra-réaliste du roman est proprement déroutant : tout nous est minutieusement décrit avec la précision des clichés photographiques, même les détails en apparence les plus banals, amenant ainsi le lecteur à s’interroger sur lui-même et plus fondamentalement sur l’insignifiance de la vie et l’émiettement de l’être :

[…] se peignent en rouge sur un rectangle blanc les grandes lettres que vous attendiez certes, mais peut-être pas aussi tôt, que vous avez lues maintes fois, que vous guettez à chaque passage pourvu qu’il fasse jour, parce qu’elles vous indiquent soit que l’arrivée est prochaine soit que le voyage est vraiment commencé.

Si vous aimez les voyages (et particulièrement les voyages en train), je vous conseille de lire cet ouvrage à juste titre célèbre qui parvient à faire de nous, lecteurs, le personnage à la fois fictif et pourtant bien réel de cet « antiroman ».

Michel Butor (Photomontage d’après un tableau de René Magritte : « La Reproduction interdite » (1937)
© René Magritte, Museum Boijmans Van Beuningen (Rotterdam). © Bruno Rigolt, février 2010.

Pour aller plus loin…

Voir aussi sur le site de l’INA l’interview de Michel Butor par Pierre Dumayet à propos de La Modification.

Un poème… par Rayan D. (Seconde 18)

Requiem lunaire

par Rayan D. (Seconde 18)

Lisez également cet autre poème de Rayan : « La vie« 

                

Lumière calmante criblée

Tu éclaires mon esprit

 Et les dunes de mon cœur

Et les déserts et les clartés.

Pour toi, j’écris un requiem ;

Magicienne de la vie

Fille de la nuit et des marées,

Des péninsules et du soleil…

Croissant parfait lucide :

Lune !

Ivan Aïvazovski La Baie de Naples au clair de lune, 1842 (The Ayvazovski Art Gallery, Théodosie, Ukraine)
Faites le test : quel Romantique êtes-vous ?

Ecrire… par les classes de Seconde 7 et Seconde 18

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Pour la deuxième année consécutive (*), les élèves de mes classes sont fiers de vous présenter le fruit de leurs réflexions sur le rôle que revêt à leurs yeux l’écriture. Après avoir mené un important travail de recherche sur la fonction de l’écrivain, les jeunes ont souhaité mettre en ligne dans ce nouvel Espace Pédagogique Contributif leur propre vision de l’écriture. Les propos, d’une grande densité intellectuelle parfois, résument non seulement leurs recherches précédentes, mais en redéfinissent les enjeux à la lumière d’un travail introspectif sur eux-mêmes : “c’est quoi écrire, pour un adolescent européen du vingt-et-unième siècle?”
(*) Voir en particulier les textes publiés le 21 janvier 2009  et le 29 janvier 2009 par la classe de Seconde 12 (année scolaire 2008-2009).
Étant donné le nombre très important de travaux, les textes seront publiés dans trois livraisons successives. Pour des raisons d’organisation matérielle, les contributions de la classe de Seconde 7 seront mises en ligne à partir du lundi 1er mars 2010. Bonne lecture !

         

Cheyenne M*** (Seconde 7)

« N’oubliez pas cette main qui écrit, ce stylo qui se vide, cette feuille qui se remplit de mots et de larmes… »

Cheyenne M. qui était en Seconde 7, va poursuivre sa scolarité dans une autre académie. Je lui souhaite de poursuivre ses travaux d’écriture et d’art, qui reflètent à l’évidence un talent précieux intellectuellement et humainement. Bonne continuation, et bon courage pour tout !

Écrire pour ne pas être une parole qui s’envole mais un écrit qui reste, écrire pour ne pas être perdue, écrire pour le plaisir d’écrire, dévoiler sa vie comme une opération à cœur ouvert. Nous : spectateurs d’un moment présent qui ne sera que le futur de notre passé. Vivre pour écrire, écrire pour être en vie, voyager pour trouver l’inspiration, écrire pour être le roi de son propre cœur, pour être éternel quand la vie n’est bientôt que le passé amer.

Écrire pour donner vie à ce qui n’est plus, écrire le silence monotone pour ne créer qu’un courant d’air qui réchauffait les cœurs. Donner l’impression de ne pas redevenir poussière aux yeux des gens, mais un rayon de soleil, qui se brise avec le soir. Écrire sa douleur que l’on n’ose pas avouer en la cachant derrière un sourire triste, écrire pour montrer que malgré une maturité prématurée je peux être un enfant, écrire intemporellement pour que le monde comprenne au fil des siècles…

N’oubliez pas les deux bouts de bois et le métal, la plume et le vent, et mon univers d’enfant… N’oubliez pas cette main qui écrit, ce stylo qui se vide, cette feuille qui se remplit de mots et de larmes…

           

Ksenia C*** (Seconde 18)

« Écrire est un travail de couturier… les lignes sont comme un fil qui explore des motifs aussi joyeux que tristes… »

Certains écrivent pour agir. Moi ce serait plutôt partir, et ne plus penser, découvrir un monde romancé et pouvoir explorer des univers sans limites. Il y a tant de voyages à faire : de lettres en lettres, de lignes en lignes je franchis les frontières, je m’embarque pour des destinations inconnues, j’emprunte un vol direct pour « ailleurs », sans escale, je plonge dans des océans de lettres où naviguent les mots. La mer est une étoffe soyeuse… C’est peut-être s’exiler qu’écrire. Exil du quotidien, qui est devenu soudainement inutile, qui ne sert plus à rien…

J’ai toujours aimé écrire, c’est un travail de couturier : les mots brodent les idées et j’aime embellir les miennes. Ma plume est l’aiguille, la page est la toile, les lignes sont comme un fil qui explore des motifs aussi joyeux que tristes, sur des étoffes plus ou moins précieuses, qui vont du synthétique superficiel à la soie naturelle. Mon travail parfois se déchire, se froisse, s’abime. Quelquefois je l’oublie au fond d’un tiroir et quand l’envie reprend, on défroisse, on retouche la faille, on recoud le trou pour le combler de sentiments…

Alors les mailles s’entrelacent de mots doux, rêches, satinés… De mots qui nous donnent envie d’y toucher délicatement, sans abimer les détails… Si bien qu’à la fin, on se retrouve avec une vraie étoffe, brodée de mots et d’arabesques qu’on effleure du bout de la plume. Nos travaux à tous, écrivains d’un jour, c’est de broder ce tissu d’idées : toutes ces lettres déposées sur le papier arrivent par je ne sais quel moyen, à se rendre réelles et bien plus concrètes qu’auparavant. Écrire c’est comme « poser les points sur les i », cela me permet d’y voir plus clair : avec l’étoffe des mots, je peux réaliser tant d’ouvrages !

           

Diane L*** (Seconde 18)

« Il m’arrive parfois d’écrire pour le seul plaisir de voir une feuille blanche se noircir sous ma main… »

C’est avec l’écriture que le jeu commence : si jouer, pour les enfants, leur permet de grandir, mon jeu à moi m’aide à gagner en maturité et en sagesse. L’écriture, qui au départ était un plaisir égoïste d’écrivain, me permet d’ouvrir les portes de mon jardin secret à ces gens assez fous qu’on appelle des lecteurs. Peut-être lisent-ils mes puériles élucubrations parce qu’ils veulent s’évader, tout comme moi, du monde réel, ce monde du conforme, cette fourmilière où chaque fourmi a un rôle prédéfini.

Il m’arrive parfois d’écrire pour le seul plaisir de voir une feuille blanche se noircir sous ma main. Ces signes que je suis la seule à pouvoir déchiffrer, me font voyager à travers une autre dimension, ils contribuent à mon évasion totale du monde réel. Après un point final, le retour à la réalité est toujours difficile : c’est ce qui me pousse à ne jamais m’arrêter d’écrire…

            

Inès E*** (Seconde 18)

« Au moment où l’extrémité de la plume touche le papier, un grand voyage commence… »

Écrire, c’est une histoire entre la feuille et l’écrivain. Elle le laisse libre d’exprimer ce qu’il veut. Il se dévoile à la lumière des mots, se découvre dans la nudité de son être. C’est le fruit de sa pensée qui prend forme avec elle : au moment où l’extrémité de la plume touche le papier, un grand voyage commence. Et le plus étrange, c’est que ce voyage se passe à l’intérieur de nous-mêmes : c’est une expérience unique et différente pour chacun de nous.

Nous avons besoin d’écrire pour exprimer nos émotions mais plus encore pour nous libérer de nous-mêmes : écrire, c’est laisser quelque chose de soi sur la feuille, et c’est aussi s’exiler : en relisant, on est étonné de soi, et plus encore de la force dont les mots font preuve ; et du message qu’inconsciemment peut-être, on a voulu faire passer. Écrire, ça sert à ça : à se dénoncer soi-même, à se retranscrire « à vif » sur le papier…

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Damien L*** (Seconde 18)

« Écrire relève d’une dualité : plaisir et souffrance sonnent comme un défi qu’il faut relever… »

Aussi loin que je me souvienne, je ne me suis jamais posé la question : l’écriture s’est toujours imposée à moi comme une évidence. J’aime inventer des mots et des phrases, des personnages, des intrigues. Quand j’écris, je me sens libre : je ne suis plus Damien, 55 rue … J’échappe à l’état civil, l’écriture me porte vers d’autres adresses, vers l’imaginaire. Ce sentiment de liberté et de puissance, seule le permet l’écriture.

Mais outre ce bonheur personnel, il faut plaire au lecteur et répondre à ses attentes : c’est là toute la difficulté. Ai-je choisi les mots qui convenaient ? Mon personnage est-il attachant ou suffisamment retors ? L’intrigue est-elle bien menée ? Combien de fois ai-je regardé la page blanche, devenue soudain hostile devant moi. Voilà pourquoi je pense qu’écrire relève d’une dualité : plaisir et souffrance sonnent comme un défi qu’il faut relever. C’est une école d’humilité, une remise en question perpétuelle.

                                   

Romane C***

« Si je n’avais pas trop pleuré, les mots me seraient restés étrangers »

Ce matin, sur mon bureau, une question ; simple, laconique, quelques mots : « Pourquoi écrivez-vous ? » Derrière la simplicité apparente, une question difficile, qui n’appelle peut-être pas de réponse concrète… Pour commencer, je dois avouer quelque chose : l’école ne m’a jamais donné envie d’écrire ; la littérature me semblait si décalée de la vie réelle…

Il est bientôt midi, et je reviens à la fameuse question : « Pourquoi écrivez-vous ? » En fait, ça m’est soudainement revenu : je me rappelle la première fois où j’ai commencé consciemment à écrire : j’avais trop pleuré. Si je n’avais pas trop pleuré, je n’aurais pas écrit. Si je n’avais pas trop pleuré, les mots me seraient restés étrangers. Il me fallait dire, crier ce que je ressentais.

Alors, le « pourquoi » de l’écriture ? Ne parlons pas de vocation : simplement quelques mots écrits au hasard des larmes. Écrire a été un moyen de m’exprimer sur tout : sensibilité, perception, regard sur le monde, toucher du monde… L’écriture ne prévient pas, elle surgit sans qu’on s’y attende.

              

Audrey G*** (Seconde 18)

« Un écrivain qui écrit dans l’ignorance n’est pas un écrivain : il doit connaître le poids des mots qu’il écrit… »

Honnêtement, on ne peut pas se lever le matin et se dire : « Tiens, si j’écrivais ? » Non, écrire c’est quelque chose de plus complexe que ça. Pour écrire, « vraiment » écrire, il faut connaître les mots, savoir les modeler, les manipuler, en sculpter le sens. Un écrivain qui écrit dans l’ignorance n’est pas un écrivain : il doit connaître le poids des mots qu’il écrit, parce que les mots sont ses amis. L’écrivain ne doit donc pas écrire pour le seul plaisir mais pour donner du sens à la fiction.

Parce que l’écrivain, quand il écrit, est quelqu’un de solitaire, plongé dans cet autre univers qui lui insuffle des arabesques qui deviendront des mots et du sens. C’est par sa maîtrise de ces mots que l’écrivain est quelqu’un d’unique. Alors la question posée à l’écrivain : « Écrire, ça sert à quoi ? » Surtout pas de réponse. Juste la question, sinon les mots n’auraient plus de secrets pour lui. Et que dire de tous ces mots inconnus, ceux que l’écrivain n’a jamais abordés… Voilà pourquoi il ne faut pas répondre à la question, parce qu’alors les mots perdraient leur sens et l’écrivain n’aurait plus de raison d’écrire.

Lisez aussi cette nouvelle d’Audrey : Overdose.

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William P*** (Seconde 18)

« Quand j’écris, je m’arme d’encre et je plonge dans le papier. Je ne m’en échappe que pour reprendre mon souffle… »

C’est un miroir, un reflet, une image de soi-même. Voilà ce qu’est écrire : une sorte de contemplation personnelle. L’écrivain se regarde toujours écrire ; il croit voir en lui comme à travers de l’eau limpide les secrets même inavoués de lui-même… Mais aussi clair soit-il, ce miroir présente des tâches, des défauts, des marques qui souillent l’écriture. Or ces salissures apparentes font la matière même de l’écrit. Il n’y a pas d’écriture « lisse » : ce sont bien les défauts qui valorisent le texte.

Quand j’écris, je m’arme d’encre et je plonge dans le papier. Je ne m’en échappe que pour reprendre mon souffle ; je ne regagne la rive que lorsque j’ai appris quelque chose sur moi. Je prends mon temps (je n’ai rien à perdre) : je me découvre et me baigne dans cet océan de bonheur limpide que je suis en train d’écrire…

             

Léa G*** (Seconde 18)

« Tracer, former des lettres, des caractères. Puis mélanger, assembler ces mots en fonction de son caractère… »

Je souris quand j’entends tous ces gens sérieux qui ne jurent que par l’engagement et l’invoquent comme la suprématie de l’écriture : selon eux, on ne peut écrire que pour cela. « L’art pour l’art » n’aurait plus sa place parmi nous. Un soupçon pèse sur le style et l’imaginaire. Pourtant le rêve n’est-il pas aussi important que l’engagement ? Tout est permis dans la littérature, toutes les émotions, tous les états d’esprit. Pendant que certains interpellent le lecteur, d’autres le font imaginer…

Dans une société où tout est à dénoncer, pourquoi ne pas inventer un monde (son monde) parfait ? Il pourrait être rempli de fées, de dragons, de pouvoirs magiques en tout genre pour certains. Pour d’autres, l’écriture serait une immense plaine verte, où le crime n’a pas sa place. Qu’importe ! L’essentiel est de faire vivre le lecteur, de le faire vibrer à travers les mots. On n’écrit pas par nécessité ; on écrit par envie : peu importe l’histoire pourvu qu’il y ait le plaisir de celui qui écrit et de celui qui lit.

Voilà ma recette de l’écriture : des phrases pleines de « caractères » pleins de « caractère » : tracer, former des lettres, des caractères. Puis mélanger, assembler ces mots en fonction de son caractère. Et puis des phrases qui marqueront à jamais notre caractère. Écrire parfois ne sert à rien, mais il sert à tout : avec des lettres, on écrit le monde.

           

Nabil B*** (Seconde 18)

« Les livres nourrissent l’esprit, ils nourrissent la mémoire et le cœur des hommes… »

D’abord écrire, c’est « coucher » sur le papier une part de soi : chacun écrit de manière originale, unique, transcendante. Pour s’en convaincre, il n’est que de lire les réponses à cette question : aucune n’est jamais la même. Personnellement, je dirai que l’écrivain est un peu un cuisinier, un faiseur de nourritures. Les livres nourrissent l’esprit, ils nourrissent la mémoire et le cœur des hommes, comme la nourriture nourrit l’estomac.

À ce repas, tout le monde est convié. Les connaissances et le savoir sont protégés dans le livre pour les rendre accessibles aux autres. Le livre devient ainsi un partage, comme le repas est partagé. Contrairement aux hommes, les écrits perdurent à travers les âges, ils suivent le cours des siècles, voire des millénaires. Jamais le voyage ne s’arrête…

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Marion C*** (Seconde 18)

« Écrire, c’est créer un monde dans lequel on a caché des questions… »

Quand j’écris, mon but premier est de faire entrer le lecteur dans l’histoire : je ne veux pas qu’il soit une simple personne assise dans un fauteuil, je voudrais qu’il vive dans et par le livre, j’aimerais qu’il ait peur en même temps que mon héros a peur, qu’il rie avec lui, qu’il partage ses larmes : c’est cela lire. Mais en dehors du fil rouge de mon histoire, des questions sont posées : il est possible que le lecteur ne se soit pas rendu compte qu’elles étaient là, cachées entre les mots. Pourtant, inconsciemment il y a déjà réfléchi, il a essayé de trouver des réponses à ces questions qu’ils ne soupçonnaient pas. Et si les réponses ne sont pas dans le livre, qu’importe : elles seront dans ce livre qui n’a pas encore été écrit, ce livre à venir. Écrire, c’est ainsi créer un monde dans lequel on a caché des questions…

            

Melisa A*** (Seconde 18)

« L’écriture d’un journal intime me permettait de voir après coup mes réactions, de redécouvrir mes sentiments… »

Quand j’ai eu douze ans, j’ai commencé à écrire un journal intime. C’était une volonté de revenir sur mon passé, de laisser une trace de ce que j’avais vécu en détaillant par écrit tous mes jours, et mes heures. J’ai appris aussi à mieux me connaître : l’écriture d’un journal intime me permettait de voir après coup mes réactions, de redécouvrir mes sentiments en les transcrivant sur le papier.

Mais je pense que l’écriture répond aussi à une volonté d’inventer : en se libérant d’un poids qu’on ne peut raconter à personne, on s’invente un monde conforme à sa volonté du moment, on imagine des personnages qui nous ressemblent. L’écriture est ainsi une amie, une confidente : elle apprend à inventer et à s’inventer.

Lisez aussi cette nouvelle de Melisa : J’essuierai mes larmes dans le soir qui tombe.

                   

Florent De W*** (Seconde 18)

« Une feuille de papier est infiniment respectable : elle entend et voit les mots, ces mots écrits qui nous touchent… »

Eh bien pour commencer, je dirais que j’écris (parfois sans réfléchir) comme un être de chair et de sang, de matière organique, d’os et d’organes. J’écris pour cet autre qui lui aussi est fait de matière organique, de sang et d’os mais qui réfléchit, pense à son passé parfois noyé, à son présent souvent instantané ou à son futur trop proche. Entre lui et moi, un mystérieux dialogue silencieux s’établit. Alors, le sens de l’écriture ? C’est peut-être le sens que l’on donne à sa vie : une feuille de papier est infiniment respectable : elle doit entendre et voir les mots, ces mots écrits qui nous touchent, qui sortent du cœur… Oui, pour moi écrire c’est le cœur ; le cœur et la pensée : ils plaident tous deux pour l’écriture et sont les principaux dépositaires de la parole au sens premier du terme : la parole sort de la bouche…

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Madeleine L*** (Seconde 18)

« Si la parole est un trésor, elle est parfois un trésor perdu, tandis que l’écrit est un peu le trésor retrouvé… »

Écrire pour ce qui me paraît l’un des aspects les plus importants : il faut savoir d’où l’on vient pour pouvoir avancer… Donc écrire pour ne pas oublier. Ne pas oublier ce qui fut dit, ce qui fut fait. Si la parole est un trésor, elle est parfois un trésor perdu, oublié ou déformé. Tandis que l’écrit est un peu le trésor retrouvé : cela fait sourire lorsqu’on retrouve enfoui au fond d’un tiroir ces souvenirs qu’on croyait oubliés et qu’on savoure de nouveau en les lisant : la mémoire est importante car elle forme notre personnalité. Et c’est ce qui fait la force et la richesse de l’écriture. En écrivant, on donne un sens au monde et à nous-mêmes : le partage.

          

Charlotte G*** (Seconde 18)

« Comme le peintre pose sur la toile blanche des couleurs, l’écrivain dépose sur la page blanche des caractères… »

Je comparerais l’écriture à un tableau car chaque personnalité peut la regarder et l’interpréter différemment : on peut écrire pour le seul plaisir de mettre des couleurs sur la toile des mots, mais on peut vouloir donner du sens au choix des couleurs, des nuances et à leur assemblage. Voilà, j’imagine que je suis un peintre des mots et j’écris pour voir ma toile prendre forme : alors je donne vie à des personnages et à des paysages grâce à ma plume devenue pinceau.

Comme le peintre pose sur la toile blanche des couleurs, l’écrivain dépose sur la page blanche des caractères. Ils donnent tous deux vie à quelque chose à venir : le peintre donne vie tantôt à des personnages ou à un paysage grâce à sa palette de couleurs, et l’écrivain donne aussi la vie par les mots. La vie est une histoire, qui elle-même est un tableau. Un tableau changeant : parfois sombre ou parfois gai… Et si le lecteur prête quelque attention à ce que j’ai écrit, s’il prend de la hauteur et du recul par rapport au tableau, il verra un tout autre dessin se former et il pourra réinventer l’histoire.

               

Alizée R*** (Seconde 18)

« Écrire c’est pardonner, et peut-être se pardonner… »

Pour moi, écrire permet de me libérer : je me sens libre après avoir rédigé quelques lignes : j’y raconte ma vie, je me pose d’incessantes questions et j’essaie d’y trouver des réponses. Quelquefois, à travers les mots, on trouve les réponses que l’on cherchait depuis si longtemps… Les vieilles rancœurs s’estompent : alors on essaie de trouver le pardon et de pardonner à un autre. Oui, écrire c’est « pardonner » et peut-être « se pardonner » : en allégeant son âme et ses pensées, on peut se créer un monde parallèle, celui où l’on recherchera en soi-même ces éléments épars qui forment notre joie, notre plaisir, nos larmes ou notre bonheur…

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Seydi B*** (Seconde 18)

« Je pense, donc j’écris… »

Écrire est un droit. Un droit inaliénable. Écrire, c’est être le porte-parole de ceux qui ne peuvent parler. C’est une manière non violente de s’exprimer, de militer et surtout d’EXISTER. « Je pense, donc j’écris » : laisser sa trace dans le patrimoine : c’est ça, exister. Et même si vous écrivez, ne serait-ce que pour une seule personne, vous pourrez lui transmettre votre engagement.

Mais il n’y a pas que l’engagement social ou politique… Faut-il ramener toujours l’écriture au militantisme des mots comme le faisait Sartre par exemple ? Je ne crois pas. Pour moi, la fonction première de l’écrit est de faire rêver le lecteur, de le faire s’évader « à travers mots ». Parfois, l’écrivain lui-même s’évade en laissant libre cours à son imagination.

                         

Antoine M*** (Seconde 18)

« Je parle d’un monde où le bonheur est possible… »

Je n’ai jamais vraiment écrit, autrement que pour mes devoirs. Les seules et rares fois où j’écris, c’est pour moi-même, pour me confier. Certes, il m’arrive d’écrire pour d’autres : je leur fais passer un message, banal parfois. Ou alors j’aime écrire pour ceux qui me sont proches, mais alors je raconte, je leur parle d’un monde sans guerres et sans violence, d’un monde où le bonheur est possible. Je pourrais écrire ces histoires, je pourrai ainsi les lire plus tard à mes enfants. Oui vraiment, pour moi, c’est ça écrire : donner accès à l’imaginaire.

               

Claire D*** (Seconde 18)

« L’écriture, c’est le cri du silence. C’est la parole cachée, c’est l’alignement des mots pour former une réponse… »

Il est 10h39, heure peut-être trop matinale pour décrire ce qu’est à mes yeux l’écriture. À cette question, chacun a sa réponse. Pour moi, écrire c’est marquer, toucher : on n’imagine pas à quel point le poids des mots est lourd : certains sont plus violents que les coups. Pourquoi certaines phrases vous glacent le sang alors que d’autres vous réchauffent le cœur ?

Quand on écrit, seule la mort peut vous arrêter : vous êtes libre d’écrire. Et dans ce monde où l’on ne peut faire confiance à personne, le papier, lui, ne vous trahira pas : vous pouvez lui confier vos peines, lui raconter vos joies sans crainte d’être jugé : l’écriture, c’est le cri du silence. C’est la parole cachée, c’est l’alignement des mots pour former une réponse. Bien sûr, il ne s’agit là que de ma propre vision : chacun a en lui sa propre opinion. En fait, peut-être que la vraie force de l’écriture réside précisément dans cette diversité.

Découvrez aussi cette nouvelle de Claire : Forever (larmes blanches).

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Vincent M*** (Seconde 18)

« Sans l’écriture il n’y a plus rien. C’est dans ce refuge des mots qu’un monde nouveau s’ouvre à nous »

Durant mes premières lectures, l’écriture d’un auteur ne m’inspirait rien. Ce n’est que plus tard, en réfléchissant, que j’ai compris combien chaque œuvre avait son propre message : l’écriture n’est pas seulement un art, elle peut être une arme pour dénoncer, mais aussi un refuge : l’écriture c’est la vie, et sans l’écriture il n’y a plus rien. C’est dans ce refuge des mots qu’un monde nouveau s’ouvre à nous. Et c’est aussi l’heure des choix : on est libre de dire, de partir à l’aventure, ou de chercher la vérité sur le monde qui nous entoure. Cette vérité peut être cachée par des ratures, des mots rayés qui tuent parfois la vérité de l’homme…

      

Deborah S*** (Seconde 18)

« Écrire, c’est dérouler son inconscient sur un morceau de papier blanc… »

« Pourquoi écrivez-vous ? » J’ai tenté moi-même de répondre à cette fameuse question, posée à tant d’auteurs. Et ma réponse fut nette : j’écris pour moi. Pour me découvrir et me redécouvrir moi-même. Par nos écrits, nous nous voyons vraiment tels que nous sommes, et pas tels que nous aimerions paraître. Pas de tabous, pas de limites ; si l’écriture est une liberté, elle révèle aussi la face cachée de l’être. Écrire, c’est dérouler son inconscient sur un morceau de papier blanc.

Voilà la véritable écriture, celle qui n’a peur de rien… sinon d’être lue, puisque c’est une partie de nous-mêmes que nous livrons. On n’écrit jamais pour rien. Chaque texte a sa spécificité certes, mais tous ont un socle commun : la défense, fût-elle implicite ou inconsciente, d’un idéal. Mon écriture est ainsi une recherche de ce qui constitue la personne que je suis : écrire pour mettre au jour ma vision du monde, et donc me découvrir, par la force de mes convictions…

Lisez aussi la très belle nouvelle de Deborah : Rose d’hiver, souffle du vent, étoile jaune.

            

Laurie C*** (Seconde 18)

« Si l’écriture est un pays, je crois aussi qu’elle est un voyage, un départ du monde actuel… »

Nina Bouraoui disait : « L’écriture, c’est mon vrai pays, le seul dans lequel je vis vraiment, la seule terre que je maîtrise ». Si l’écriture est un pays, je crois aussi qu’elle est un voyage, un départ du monde actuel. L’écriture serait donc dans un premier temps une échappatoire où l’on contrôle tout ; sans se soucier du monde extérieur. On écrit alors pour soi, pour se soulager, se libérer. Mais on écrit aussi pour les autres, pour ceux qui ne le peuvent pas, qui n’ont pas droit à la parole. Écrire sert donc à témoigner pour eux : entre l’auteur et le lecteur s’établit un dialogue invisible…

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Thulaciga Y*** (Seconde 18)

« Ces mots qui sont liés les uns aux autres forment une fraternité, une paix inconnue à notre monde… »

Les mots sont les seules personnes qui ne jugent pas mon apparence, qui ne se moquent pas de moi. Avec les mots, pas besoin de faire semblant de rire ou de faire des choses dans le but de plaire à des inconnus : en présence des mots, je me sens belle, intelligente, bien dans ma peau : peut-être parce qu’ils parlent à travers moi. L’écriture est un moyen d’échapper à la solitude, l’écriture est moi.

De plus, ces mots qui sont liés les uns aux autres forment une fraternité, une paix inconnue à notre monde. De toute façon, nous irons finir notre vie dans une malheureuse tombe, seule et isolée… Alors que l’écriture sera toujours présente jusqu’à la fin du monde : les mots seront toujours liés ensemble quoi qu’il arrive : ils ne changeront pas, ne vieilliront pas, ne mourront pas : ils sont immortels.

Vous connaissez le proverbe : « Toute bonne chose a une fin ». L’écriture nous montre cela : elle commence par une majuscule, par une naissance, et se termine par un point : c’est un peu comme la mort de la phrase, diront certains. Mais contrairement à nous, elle se ressuscite. Même après ma mort, les mots vivront, toujours les mêmes, et renaîtront, toujours nouveaux…

          

Pauline C*** (Seconde 18)

« Écrire sert à déranger : il n’y a pas de « lecture confortable… »

Je n’écris pas forcément pour convaincre, mais pour faire réagir. Être lue, c’est accepter le débat, c’est forcer ceux qui vous lisent à se poser des questions, c’est les obliger à prendre des décisions, à faire des choix. Ainsi, l’écriture est forcément une provocation : on « provoque » l’autre, on suscite une réaction, un sentiment chez lui ; joie, émotion, colère… Si vous lisez mes écrits (*), je ne souhaite pas que vous les appréciiez, j’ai juste besoin de me dire : « j’ai fait réagir ». Rendre le lecteur furieux, c’est presque le comble pour un écrivain : l’écriture n’est plus alors un simple divertissement, elle est une interpellation. C’est pour cela qu’à la question « Écrire, ça sert à quoi ? » il me semble juste de répondre qu’écrire sert à déranger : il n’y a pas de « lecture confortable ». Il faut déranger les opinions, les idées préfabriquées, l’écrivain doit remettre en cause les fondations…

(*) Lire en particulier la nouvelle de Pauline L’Eau est belle (noire, profonde, infinie).

         

Sibylle B*** (Seconde 18)

« Mots oubliés, rayés. Sentiments écrits puis détruits. Pourtant ces mots sont nés, ils existaient… »

Au commencement de l’écriture, quelques lettres assemblées formant des signes, éparpillés au hasard sur une feuille dite « brouillon ».

Écrire est le seul moyen de laisser une trace de sa vie : un papier et un crayon suffisent pour s’évader dans un monde, son monde, dans lequel l’imagination a le droit de divaguer. Une imagination hors piste, hors-la-loi parfois : on passe de la réalité à l’imaginaire, aux rêves d’enfants qui sont les rêves du monde. Balayées l’orthographe ou la syntaxe… De temps en temps une relecture s’impose : parfois ce qu’on avait écrit n’a aucune signification, l’imagination a divagué : elle a quitté la route. Alors on rature ces mots…

Mots oubliés, rayés. Sentiments écrits puis détruits.

Pourtant ces mots sont nés, ils existaient, puis la plume qui les a fait naître les a tués.

Pourtant ils ont existé, ils vivaient parmi tant d’autres.

Et puis ces mots sont morts.

Voilà pour moi la fonction de l’écriture :

Faire vivre et faire renaître les mots. Écrire, pour achever une histoire sans aucun sens pour autrui, pour en commencer une autre, pour se découvrir de nouveau, pour avoir un nouveau goût de la liberté, pour s’évader dans le monde et s’inventer cette vie dont on avait toujours rêvé, pour réaliser des projets irréalisables, pour bâtir le possible de l’impossible. Écrire, c’est plus qu’écrire, c’est parler sans être interrompu…

Lisez aussi cet autre très beau texte de Sibylle : All over the world, la fin d’un voyage, le début d’une vie.

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Janyce M*** (Seconde 18)

« Écrire, c’est trouver le mot juste pour décrire l’authentique. »

Pour beaucoup de personnes, écrire est forcément lié à une notion d’engagement… Mais la beauté des mots dans tout ça ? On les utilise certes pour « frapper », « viser juste »… Mais on ne cherche pas assez de profondeur. Tout rime alors avec débats, idées à défendre, parti à prendre, avis à scander… Ce n’est pas ainsi que je définirais l’écriture. Écrire pour moi, c’est un moment que l’on partage avec soi-même d’abord, un moment de vérité pure. Comme un aveu. On se dénude, on se met en accord avec soi. Moment de plénitude totale où l’on va transcrire, parfois inconsciemment, nos sentiments, nos pensées les plus secrètes.

Mais écrire, c’est aussi transmettre un magnifique héritage, une sensibilité qui doit vivre malgré le temps. L’écrivain est alors comme un pianiste : quand il commence à « jouer », il recherche les notes les plus justes, celles qui vont témoigner du sentiment profond qui envahit son être : détresse, joie, solitude déception… Et lorsque son doigt effleure enfin la touche ultime de sa mélodie, vient alors le soulagement d’avoir pu faire couler dans un courant fluide de notes ce qu’il ressentait secrètement. Et il aura envie de faire partager ce rendez-vous qu’il a eu avec lui-même, de raconter un peu de son vécu aux autres. Il recherche alors le mot convenant le mieux pour évoquer le ressenti, le mot approprié, le mot juste pour décrire l’authentique.

Lisez aussi cette nouvelle de Janyce : La Balançoire
 Cliquez ici pour lire les autres textes publiés à partir du 1er mars 2010.
© les auteur(e)s, LEF/EPC (janvier 2010)

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Les élèves ont du talent… Lire en ligne : « Overdose » par Audrey G.

“Et si c’était un jour leur premier roman?”

Vous connaissez maintenant cette nouvelle rubrique proposée par les élèves de Seconde 18 et Seconde 7… Au départ, un exercice tout à fait “classique” : rédiger le début et la fin d’un roman… Les élèves les plus assidus à la tâche se sont pleinement investis dans ce challenge : travaillant et retravaillant les manuscrits, corrigeant la grammaire, revoyant la syntaxe, précisant le lexique et surtout s’attelant à la grande question du “style”, afin de proposer la première ébauche de ce qui pourrait bien devenir un jour leur “roman”. Le cahier de texte électronique est fier de vous proposer la lecture de ces textes tous inédits. Même s’il s’agit des premières pages et des dernières pages d’un possible livre, les manuscrits peuvent se lire comme une nouvelle…
Ce bref récit, rédigé par Audrey G. est particulièrement sombre et poignant. L’intime alliance de la poésie et de la prose la plus sèche permet de réfléchir aux dangers de la drogue et aux dérives tant physiologiques que morales qu’elle provoque. 
                

Overdose

par Audrey G. (Seconde 18)

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Mais déjà la nuit et le brouillard froid d’une fin de novembre commençaient à tomber sur la ville.

L’ombre pressa le pas pour rentrer au plus vite, fuyant le silence pesant du soir. Elle savait pertinemment qu’elle ne devait pas traîner, que les bandes finiraient par sortir et même si son jeune frère faisait partie du gang du Nord, elle n’était pas rassurée de devoir passer par ces ruelles sombres.

Encore quelques minutes de marche, et puis elle put enfin rentrer dans le petit appartement sinistre qu’elle partageait avec son frère. Le papier peint se décollait à certains endroits et la tuyauterie fuyait sous l’évier, mais ils n’avaient pas les moyens de la faire réparer ni de changer de logement et le proprio ne voulait rien entendre : il leur permettait déjà de régler le loyer, et souvent, en retard ! Et puis s’ils n’étaient pas contents…

Alors ils faisaient avec et quand l’argent devenait vraiment un problème elle allait déposer un objet de valeur chez le préteur sur gage du quartier. La plupart du temps, c’était sa gourmette en or, celle que ses parents lui avaient offerte quand elle était encore enfant. Dessus, on y avait gravé son prénom, Léis. 

Elle sortit un petit sachet de l’intérieur de sa veste et se dirigea vers sa chambre. Léis le posa sur sa table de chevet et s’assit sur son lit le temps de tout préparer : le garrot, la seringue et la poudre blanche. Son frère ignorait qu’elle prenait de l’héroïne, mais elle, savait bien que son frère se droguait. Elle fouilla dans le tiroir de la table de chevet et en sortit une cuillère et un briquet. Elle s’apprêta à faire fondre la poudre pour se l’injecter.

Après quelques minutes qui lui semblèrent durer presque un hiver, elle laissa tomber la seringue par terre. Sa chambre sombre et vide devenue soudain colorée,  tournait autour d’elle pour l’emporter loin de la misère et des cours d’immeuble et du silence pesant du soir. Elle était joyeuse, elle n’était plus maître de con corps. Alors elle sortit de l’appartement, comme d’habitude, au lieu de rester dans sa chambre à attendre que tout finisse. Elle vagabonda entre les blocs, titubant et riant comme si elle était ivre. Elle ne faisait plus attention, ni aux regards des hommes qui sortaient des bars, ni à la pluie, ni à la nuit, ni à la mort. Seulement au temps présent, au temps qui trébuche sous les étoiles. Dans ces instants, Léis n’était plus la même. Son courage se muait en abandon : elle devenait faible pour montrer sa peine et elle inspirait quelquefois de la pitié aux gens. 

Lorsque les effets de l’héroïne commencèrent à se dissiper, elle tenta de reprendre son calme. Dans cette nuit dure et froide, elle avançait dans les rues en silence laissant couler des larmes de honte et de rage sur le trottoir de la vie…

___________

Ils étaient partis la laissant seule face à son destin. Elle ne pensait plus, elle ne vivait plus sa vie. Elle subissait.

Tout ce comment et ce pourquoi elle avait travaillé pendant des années tombaient en morceaux depuis maintenant des mois. Et maintenant, elle ne pourrait plus rien faire car la dernière personne qui comptait pour elle l’avait quittée pour toujours. Elle contempla, hagarde, la pierre tombale, refusant de montrer ses sentiments. Puis la pluie commença à se faire plus forte alors elle quitta le cimetière. Elle errait au hasard dans les rues malgré l’heure tardive de ce samedi. La nuit était tombée depuis quelques heures, deux, trois peut être ? Elle ne savait plus. La pluie n’avait cessé de tomber mais Léis se foutait complètement d’être trempée jusqu’aux os. Plus rien n’avait d’importance : la vie était triste comme un rendez-vous d’amour manqué. Triste. Triste…

Lorsque l’aube arriva, Léis rentra chez elle. Elle tremblait, était-ce dû à des sanglots ou au froid ? Peut-être le manque ? Elle ne savait plus.

Léis ressemblait à une épave, ses yeux était rouges d’avoir trop pleuré. Ses cheveux blonds dégoulinaient d’eau. Elle se dirigea dans sa chambre. Elle s’allongea le long de son lit, se fit un garrot et attrapa une seringue, peu importe si elle avait déjà servi. Elle sortit un sachet plus rempli que les autres et commença à faire fondre la drogue avec son briquet. Que lui importait de savoir si ce qu’elle faisait était dangereux… Que lui importait la pluie dans ses cheveux ? Que lui importait la mort ? Elle ne souhaitait que d’oublier. Oublier que son frère était mort dans une bagarre des gangs. Oublier qu’elle était seule, sans argent. Oublier le trottoir et la pluie, et l’immeuble, et la cage d’escalier, et la porte mal fermée, et l’eau qui gouttait, et ses larmes qui coulaient…

Elle laissa s’infiltrer le poison dans les veines. Mais elle ne plana pas : elle tremblait et plus elle tremblait, plus elle avait mal. Enfin elle suffoqua, cherchant son air. En vain. Et voilà qu’aujourd’hui, c’était fini. Elle aurait voulu crier mais aucun son ne sortit de sa bouche, seul un filet blanchâtre et âcre s’écoula sur le sol.  Son cœur s’emballa, elle eut l’impression de brûler tant elle avait chaud. Et puis elle ne se rendit compte plus de rien. Lorsque ses tremblements cessèrent, peut-être crut-elle un instant qu’elle allait pouvoir planer. Alors elle sourit. 

Puis plus rien.

Juste

une

overdose.

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Crédit photographique : B. R.

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Les élèves ont du talent… Lire en ligne : "Overdose" par Audrey G.

“Et si c’était un jour leur premier roman?”

Vous connaissez maintenant cette nouvelle rubrique proposée par les élèves de Seconde 18 et Seconde 7… Au départ, un exercice tout à fait “classique” : rédiger le début et la fin d’un roman… Les élèves les plus assidus à la tâche se sont pleinement investis dans ce challenge : travaillant et retravaillant les manuscrits, corrigeant la grammaire, revoyant la syntaxe, précisant le lexique et surtout s’attelant à la grande question du “style”, afin de proposer la première ébauche de ce qui pourrait bien devenir un jour leur “roman”. Le cahier de texte électronique est fier de vous proposer la lecture de ces textes tous inédits. Même s’il s’agit des premières pages et des dernières pages d’un possible livre, les manuscrits peuvent se lire comme une nouvelle…
Ce bref récit, rédigé par Audrey G. est particulièrement sombre et poignant. L’intime alliance de la poésie et de la prose la plus sèche permet de réfléchir aux dangers de la drogue et aux dérives tant physiologiques que morales qu’elle provoque. 
                

Overdose

par Audrey G. (Seconde 18)

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Mais déjà la nuit et le brouillard froid d’une fin de novembre commençaient à tomber sur la ville.
L’ombre pressa le pas pour rentrer au plus vite, fuyant le silence pesant du soir. Elle savait pertinemment qu’elle ne devait pas traîner, que les bandes finiraient par sortir et même si son jeune frère faisait partie du gang du Nord, elle n’était pas rassurée de devoir passer par ces ruelles sombres.
Encore quelques minutes de marche, et puis elle put enfin rentrer dans le petit appartement sinistre qu’elle partageait avec son frère. Le papier peint se décollait à certains endroits et la tuyauterie fuyait sous l’évier, mais ils n’avaient pas les moyens de la faire réparer ni de changer de logement et le proprio ne voulait rien entendre : il leur permettait déjà de régler le loyer, et souvent, en retard ! Et puis s’ils n’étaient pas contents…
Alors ils faisaient avec et quand l’argent devenait vraiment un problème elle allait déposer un objet de valeur chez le préteur sur gage du quartier. La plupart du temps, c’était sa gourmette en or, celle que ses parents lui avaient offerte quand elle était encore enfant. Dessus, on y avait gravé son prénom, Léis. 
Elle sortit un petit sachet de l’intérieur de sa veste et se dirigea vers sa chambre. Léis le posa sur sa table de chevet et s’assit sur son lit le temps de tout préparer : le garrot, la seringue et la poudre blanche. Son frère ignorait qu’elle prenait de l’héroïne, mais elle, savait bien que son frère se droguait. Elle fouilla dans le tiroir de la table de chevet et en sortit une cuillère et un briquet. Elle s’apprêta à faire fondre la poudre pour se l’injecter.
Après quelques minutes qui lui semblèrent durer presque un hiver, elle laissa tomber la seringue par terre. Sa chambre sombre et vide devenue soudain colorée,  tournait autour d’elle pour l’emporter loin de la misère et des cours d’immeuble et du silence pesant du soir. Elle était joyeuse, elle n’était plus maître de con corps. Alors elle sortit de l’appartement, comme d’habitude, au lieu de rester dans sa chambre à attendre que tout finisse. Elle vagabonda entre les blocs, titubant et riant comme si elle était ivre. Elle ne faisait plus attention, ni aux regards des hommes qui sortaient des bars, ni à la pluie, ni à la nuit, ni à la mort. Seulement au temps présent, au temps qui trébuche sous les étoiles. Dans ces instants, Léis n’était plus la même. Son courage se muait en abandon : elle devenait faible pour montrer sa peine et elle inspirait quelquefois de la pitié aux gens. 
Lorsque les effets de l’héroïne commencèrent à se dissiper, elle tenta de reprendre son calme. Dans cette nuit dure et froide, elle avançait dans les rues en silence laissant couler des larmes de honte et de rage sur le trottoir de la vie…

___________

Ils étaient partis la laissant seule face à son destin. Elle ne pensait plus, elle ne vivait plus sa vie. Elle subissait.
Tout ce comment et ce pourquoi elle avait travaillé pendant des années tombaient en morceaux depuis maintenant des mois. Et maintenant, elle ne pourrait plus rien faire car la dernière personne qui comptait pour elle l’avait quittée pour toujours. Elle contempla, hagarde, la pierre tombale, refusant de montrer ses sentiments. Puis la pluie commença à se faire plus forte alors elle quitta le cimetière. Elle errait au hasard dans les rues malgré l’heure tardive de ce samedi. La nuit était tombée depuis quelques heures, deux, trois peut être ? Elle ne savait plus. La pluie n’avait cessé de tomber mais Léis se foutait complètement d’être trempée jusqu’aux os. Plus rien n’avait d’importance : la vie était triste comme un rendez-vous d’amour manqué. Triste. Triste…
Lorsque l’aube arriva, Léis rentra chez elle. Elle tremblait, était-ce dû à des sanglots ou au froid ? Peut-être le manque ? Elle ne savait plus.
Léis ressemblait à une épave, ses yeux était rouges d’avoir trop pleuré. Ses cheveux blonds dégoulinaient d’eau. Elle se dirigea dans sa chambre. Elle s’allongea le long de son lit, se fit un garrot et attrapa une seringue, peu importe si elle avait déjà servi. Elle sortit un sachet plus rempli que les autres et commença à faire fondre la drogue avec son briquet. Que lui importait de savoir si ce qu’elle faisait était dangereux… Que lui importait la pluie dans ses cheveux ? Que lui importait la mort ? Elle ne souhaitait que d’oublier. Oublier que son frère était mort dans une bagarre des gangs. Oublier qu’elle était seule, sans argent. Oublier le trottoir et la pluie, et l’immeuble, et la cage d’escalier, et la porte mal fermée, et l’eau qui gouttait, et ses larmes qui coulaient…
Elle laissa s’infiltrer le poison dans les veines. Mais elle ne plana pas : elle tremblait et plus elle tremblait, plus elle avait mal. Enfin elle suffoqua, cherchant son air. En vain. Et voilà qu’aujourd’hui, c’était fini. Elle aurait voulu crier mais aucun son ne sortit de sa bouche, seul un filet blanchâtre et âcre s’écoula sur le sol.  Son cœur s’emballa, elle eut l’impression de brûler tant elle avait chaud. Et puis elle ne se rendit compte plus de rien. Lorsque ses tremblements cessèrent, peut-être crut-elle un instant qu’elle allait pouvoir planer. Alors elle sourit. 
Puis plus rien.
Juste
une
overdose.

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Crédit photographique : B. R.

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"De mots, de rimes et de sables"… Exposition de poésies par la classe de Première S3…

Exposition de poésies

« De mots, de rimes et de sables »

par la classe de Première S3

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____

La classe de Première S3 a mené un important travail de création poétique, mêlant à l’inspiration littéraire le graphisme, le dessin ou la peinture : de fait, tous les poèmes ont été illustrés par les élèves. À cette heure, l’ensemble des textes a été numérisé… Mais les élèves terminent les illustrations. Donc seuls les poèmes finalisés sont exposés. Les autres textes seront mis en ligne au fur et à mesure de l’achèvement des dessins…

Voici le premier volet de l’exposition.

__

                            

Alchimie du poème perdu

Charlotte S.

            

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Crédit iconographique : © Charlotte S. (Lycée en Forêt, Janvier 2010)

                 

                       

Tes âmes s’envolent

Maeva, Alexia

                 

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Crédit iconographique : © Alexia L. et Maeva P. (Lycée en Forêt, Janvier 2010)
                                   
                                                  

L’interdit

Sarah L.

                 

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    Crédit iconographique : © Sarah L. (Lycée en Forêt, Janvier 2010)
                    
                                

Paparazzis

Maïlys T.

                 

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Crédit iconographique : © Maïlys T. (Lycée en Forêt, Janvier 2010)

              

                 

J’ai pensé à nous…

Morgane L.

        

Les tombeaux de la beauté épousent les étoiles

D’une jeunesse douloureuse et troublée

Par les mouvements métaphoriques qui bornent nos dures racines tendres.

J’ai pensé à cette nuit bleue d’une voie rouge et lactée

De nuages frais couvrant mes rêves les plus désespérés.

Le soleil s’est levé sur Paris : j’ai pensé à nous,

A nos sourires ébréchés. L’astre sombre

A ouvert mes paupières légères.

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Crédit iconographique : © Morgane L. (Lycée en Forêt, Janvier 2010)

                  

                  

Pour écrire ce poème

Fanny M. et Charlotte S.

              

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Crédit iconographique : © Charlotte S. et Fanny M. (Lycée en Forêt, Janvier 2010)

                    

                      

Marmoréenne

Sarah L.

                     

Fébrilement accrochée à la branche de survie,

Une feuille frémit puis lâche prise,

S’envole maladroitement comme le premier vol d’un oiseau

Tombe parmi les cadavres fanés.

Sa peau est marmoréenne

Son sang qui,

Coagulant dans ses veines, se fige et se cristallise

L’homme éphémère s’endort dans un éternel sommeil

L’homme n’est que feuille qui se fane

Et s’achève dans l’oubli.

Son dernier souffle…

     

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Crédit iconographique : © Sarah L. (Lycée en Forêt, Janvier 2010)

                    

                  

Mon âme a trouvé en voyage

Maëlise R.

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Crédit iconographique : « Collages numériques » © Maëlise R. (Lycée en Forêt, Janvier 2010)

                           

                        

La Plume

Sarah L.

                    

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Crédit iconographique : © Sarah L. (Lycée en Forêt, Janvier 2010)

                     

                           

Tous les vieux jardins perdus

Morgane L.

              

Le tique-taquement interne de l’écriture,

Le rouge passionné de l’écharpe chaude

Le fait de gravir les escaliers du désir

Rafraichissent la curieuse envie de bonheur gâché.

 

L’océan de printemps surligne l’hyperbole

Et les marges trop larges de l’angoisse

Effacent tous vieux jardins perdus :

Conduire le désir vers l’impossible est faisable !

 

L’humain vert tord l’ordre du métabolisme photographique :

Océaniques pensées surlignées de rage !

J’atteignis ainsi tous les vieux jardins perdus

Du désir horrible de cette peur joyeuse.

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Crédit iconographique : © Morgane L. (Lycée en Forêt, Janvier 2010)

              

                     

Tour de magie

Caroline T.

                      

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Crédit iconographique : © Caroline T. (Lycée en Forêt, Janvier 2010)
                      
Première livraison : la numérisation des textes est terminée.

« De mots, de rimes et de sables »… Exposition de poésies par la classe de Première S3…

Exposition de poésies

« De mots, de rimes et de sables »

par la classe de Première S3

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____

La classe de Première S3 a mené un important travail de création poétique, mêlant à l’inspiration littéraire le graphisme, le dessin ou la peinture : de fait, tous les poèmes ont été illustrés par les élèves. À cette heure, l’ensemble des textes a été numérisé… Mais les élèves terminent les illustrations. Donc seuls les poèmes finalisés sont exposés. Les autres textes seront mis en ligne au fur et à mesure de l’achèvement des dessins…

Voici le premier volet de l’exposition.

__

                            

Alchimie du poème perdu

Charlotte S.

            

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Crédit iconographique : © Charlotte S. (Lycée en Forêt, Janvier 2010)

                 

                       

Tes âmes s’envolent

Maeva, Alexia

                 

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Crédit iconographique : © Alexia L. et Maeva P. (Lycée en Forêt, Janvier 2010)
                                   
                                                  

L’interdit

Sarah L.

                 

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    Crédit iconographique : © Sarah L. (Lycée en Forêt, Janvier 2010)
                    
                                

Paparazzis

Maïlys T.

                 

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Crédit iconographique : © Maïlys T. (Lycée en Forêt, Janvier 2010)

              

                 

J’ai pensé à nous…

Morgane L.

        

Les tombeaux de la beauté épousent les étoiles

D’une jeunesse douloureuse et troublée

Par les mouvements métaphoriques qui bornent nos dures racines tendres.

J’ai pensé à cette nuit bleue d’une voie rouge et lactée

De nuages frais couvrant mes rêves les plus désespérés.

Le soleil s’est levé sur Paris : j’ai pensé à nous,

A nos sourires ébréchés. L’astre sombre

A ouvert mes paupières légères.

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Crédit iconographique : © Morgane L. (Lycée en Forêt, Janvier 2010)

                  

                  

Pour écrire ce poème

Fanny M. et Charlotte S.

              

fanny-m_charlotte-s_1s3-09-10.1263662740.jpg

Crédit iconographique : © Charlotte S. et Fanny M. (Lycée en Forêt, Janvier 2010)

                    

                      

Marmoréenne

Sarah L.

                     

Fébrilement accrochée à la branche de survie,

Une feuille frémit puis lâche prise,

S’envole maladroitement comme le premier vol d’un oiseau

Tombe parmi les cadavres fanés.

Sa peau est marmoréenne

Son sang qui,

Coagulant dans ses veines, se fige et se cristallise

L’homme éphémère s’endort dans un éternel sommeil

L’homme n’est que feuille qui se fane

Et s’achève dans l’oubli.

Son dernier souffle…

     

sarah_l_marmoreenne_crayon_1s3_2010_1.1263727990.JPG

Crédit iconographique : © Sarah L. (Lycée en Forêt, Janvier 2010)

                    

                  

Mon âme a trouvé en voyage

Maëlise R.

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Crédit iconographique : « Collages numériques » © Maëlise R. (Lycée en Forêt, Janvier 2010)

                           

                        

La Plume

Sarah L.

                    

sarah_l_la_plume_1s3.1263663545.jpg

Crédit iconographique : © Sarah L. (Lycée en Forêt, Janvier 2010)

                     

                           

Tous les vieux jardins perdus

Morgane L.

              

Le tique-taquement interne de l’écriture,

Le rouge passionné de l’écharpe chaude

Le fait de gravir les escaliers du désir

Rafraichissent la curieuse envie de bonheur gâché.

 

L’océan de printemps surligne l’hyperbole

Et les marges trop larges de l’angoisse

Effacent tous vieux jardins perdus :

Conduire le désir vers l’impossible est faisable !

 

L’humain vert tord l’ordre du métabolisme photographique :

Océaniques pensées surlignées de rage !

J’atteignis ainsi tous les vieux jardins perdus

Du désir horrible de cette peur joyeuse.

morgane_l_1s3_touslesvieuxjardinsperdus_2010.1263721703.jpg

Crédit iconographique : © Morgane L. (Lycée en Forêt, Janvier 2010)

              

                     

Tour de magie

Caroline T.

                      

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Crédit iconographique : © Caroline T. (Lycée en Forêt, Janvier 2010)
                      
Première livraison : la numérisation des textes est terminée.

Les élèves ont du talent… Lire en ligne : "L'Eau est belle" par Pauline C.

“Et si c’était un jour leur premier roman?”

Vous connaissez maintenant cette nouvelle rubrique proposée par les élèves de Seconde 18 et Seconde 7… Au départ, un exercice tout à fait “classique” : rédiger le début et la fin d’un roman… Les élèves les plus assidus à la tâche se sont pleinement investis dans ce challenge : travaillant et retravaillant les manuscrits, corrigeant la grammaire, revoyant la syntaxe, précisant le lexique et surtout s’attelant à la grande question du “style”, afin de proposer la première ébauche de ce qui pourrait bien devenir un jour leur “roman”. Le cahier de texte électronique est fier de vous proposer la lecture de ces textes tous inédits. Même s’il s’agit des premières pages et des dernières pages d’un possible livre, les manuscrits peuvent se lire comme une nouvelle…
Par ses qualités littéraires, ce texte rédigé par Pauline C. (Seconde 18), est particulièrement fort et poignant. Il mérite une attention particulière. Bonne lecture !

 

L’Eau est belle

(noire, profonde, infinie)

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par Pauline C.

(Seconde 18)

Incipit

J’ai sursauté, comme à mon habitude, lorsque la cloche annonçant la fin de la journée a sonné. Ce son aigu et brutal fut suivi du brouhaha agaçant des cent-quatre jeunes filles de St. Vincent. L’école n’est pas très grande, assez quelconque et de style contemporain il me semble. Elle se trouve dans un passage parallèle à l’église All Saints, au croisement de Margaret street et de Wells street, non loin de Hyde Park au centre de Londres, dans un environnement calme et pour moi rassurant. Je suis bien à école, les exercices ne m’enchantent pas mais je m’y sens en sécurité.

La plupart des jeunes filles de ma classe sont heureuses de pouvoir rentrer chez elles mais ce n’est guère mon cas. Je sais pertinemment que le chemin du retour sera plutôt long. Certaines élèves ne rentrent pas directement chez elles et restent ensemble pour une balade. Pour ce qui me concerne, j’attends Sophie devant l’école. Sophie c’est ma sœur, une gamine de douze ans, gentille mais écervelée. Je vous avouerai qu’il n’y a jamais eu de réelle complicité entre nous (je me contente de partager le nécessaire avec elle, pour ne pas déplaire à maman) probablement à cause de nos quatre ans de différence. En effet, j’ai seize ans, je ne suis encore qu’une adolescente, du moins c’est ce que j’espère.

Nous sommes en avril 1926, il y a quelques mois, Austen Chamberlain a obtenu le Prix Nobel de la Paix. Je me souviens de cet événement car notre enseignante en a été excessivement heureuse, d’après elle « les Britanniques ont rarement l’occasion de se faire remarquer ». Ma sœur et moi tournons dans Victoria street ; sur le mur, il reste encore des affiche de l’African-American West Student Union qui vient d’être fondée à Londres. Puis Sophie me raconte avec engouement sa journée quand nous croisons trois jeunes filles de St. Vincent ; deux d’entre elles, Jackie et Nicole sont dans ma classe, je ne connais pas la troisième. Le père de Jackie possède des mines de charbon, celui de Nicole serait avocat, d’après ce que j’ai entendu dire. En nous dépassant, ces bécasses habillées selon les codes victoriens me toisent de haut en bas avec mépris. J’y suis habituée, à ce regard : toutes les filles de l’école ont le même envers ma sœur aussi. Mais Sophie ne comprend pas vraiment, elle est jeune. Elle se doute quand même que les morceaux de tissus méticuleusement reprisés qui nous servent de vêtements sont pour quelque chose dans ce « je ne sais quoi » de distant qu’on nous manifeste. Mais contrairement à moi, elle a quelques camarades à l’école, elle est à un âge où les distinctions sociales ne semblent pas encore s’imposer. Je n’exprime néanmoins jamais ces plaintes, Maman ne le supporterait pas.

Maman… Forcée d’enchaîner les basses besognes pour nous permettre d’aller à cette école et d’avoir plus tard, une vie meilleure. Mais elle est malade, et de plus en plus sa peur de ne bientôt plus pouvoir travailler semble l’habiter. Avec Sophie, nous serions prêtes à arrêter l’école et à travailler s’il le fallait. Mais pour ce qui me concerne, Maman a d’autres projets qui ne me plaisent pas du tout : « Sady, tu es jeune et ravissante, tu n’auras aucun mal à trouver un époux convenable! » Par « convenable », je suppose qu’elle entend « riche » (et vieux!). Du haut de ses douze ans, Sophie rêve d’un mariage fantastique et semble du même avis que Maman. Nous traversons la rue Shakespeare et rêvons toutes deux de pouvoir un jour entrer dans l’une de ces boutiques cossues devant lesquelles nous ne faisons que passer : nous ne sommes pas Jackie et Nicole, seulement Sady et Sophie.

Nous marchons en silence, croisons moins de monde au fur et à mesure que nous avançons puis bifurquons dans une impasse nommée Emin’s, c’est étroit et sombre. Je me rends compte que la nuit est tombée. Nous sommes loin des boutiques croisées plus tôt. Il y quelques pubs bruyants, et l’odeur de la bière se mêle aux relents de tabac et de gin. Un homme dort sur le trottoir, allongé sur un carton déplié. Un autre est assis sur un banc et boit sa pinte. Les maisons ressemblent à des cabanes. Il n’y a plus aucun commerce, uniquement un petit marché tenu par une femme sale et mal habillée. La rue est sombre et sent mauvais. Nous sommes presque arrivées.

             

Excipit

Il y en a qui fêtent la nouvelle année 1936 ce soir, moi je suis là, dans ce même pub d’il y a dix ans, à commander un énième whisky. Je me rappelle quand je n’osais regarder à l’intérieur du haut de mes seize ans… Comme l’endroit n’est pas très grand, les quelques tables et chaises semblent se chevaucher. Un homme, barbu et ivre s’est endormi, sa chope à la main. Une prostituée se tient debout, adossée au mur, une clope au bec. Elle tente de faire des cercles en crachant la fumée, mais ce n’est pas très réussi : les cercles s’affaissent dans l’air, se cabossent, ivres et trébuchants eux aussi. Comme tout paraît simple : simple et sale. Toute la pièce est enfumée et les personnes semblent des ombres. La serveuse essuie la vaisselle, tristement. Je crois me rappeler qu’elle s’appelle Randie, elle est russe et n’a pas de famille ici, à Londres ; elle loge à l’étage juste au-dessus du bar. On entend vaguement une musique de fond ; c’est une chanson jazzy de Duke Ellington, je crois. Je fixe mon verre et m’aperçois de deux choses : la première est qu’il est presque vide ; et la seconde, on y voit mon reflet, dans ce verre plein de traces de rouge à lèvres. Pas très glorieux, je trouve. Mes yeux sont cernés de noir, aussi bien par le maquillage et l’alcool que par la fatigue ; j’ai la peau anormalement pâle. Mes boucles d’autrefois sont devenues de pauvres bouclettes tristes. Mes joues se sont creusées, la malnutrition me rend trop maigre. Je vide mon verre et quitte le pub, sans un mot. Je ne paye pas car certains soirs je travaille ici, comme serveuse.

Une fois dans la rue, je sors une cigarette et l’allume, ça me réchauffe les mains, un peu. Il fait très froid, je porte un débardeur rouge, une petite jupe très courte, des résilles et des bottes. La rue est déserte, les gens fêtent le réveillon chez eux, en famille, au chaud. Ma peau se glace, petit à petit; je ne sens plus mes mains, mes muscles se contractent et font tomber ma cigarette. Mes doigts me font trop mal pour en prendre une autre. Je continue de marcher et croise des prostituées habituées des pubs. On se salue furtivement et on  continue d’avancer. Je ne sais pas où je passerai la nuit, je sais que si je m’endors dans la rue ce soir, je ne me réveillerai jamais, à cause du froid. Je tourne et emprunte Matthew Parker Street. Il y a des restaurants ou dînent des familles et des couples venus fêter le nouvel an. Quelques personnes marchent dans la rue, dans leurs fourrures et leurs gants et leur insouciance. Savent-elles qu’on se saoule et qu’on dort sur les trottoirs à quelques rues d’ici ? Le savent-elles ?

Je marche, les passants ne font pas attention à moi. Je retrouve l’indifférence et le mépris auxquels ces gens m’ont toujours habituée. On entend des chansons et des rires d’enfants venus des appartements ou des restaurants, enfin… des endroits chauds. Je marche vite pour fuir le froid et je passe à travers une épaisse couche de brouillard, pareille à de la fumée d’usine. Je m’arrête, mon chemin m’a menée au bord du fleuve ; je suis arrivée au terme du voyage. L’eau est belle : noire profonde, infinie. Les arbres n’ont plus de feuilles, ils ont froid eux aussi. Il n’y a personne autour de moi, je suis seule parmi le soir. Je sors mon paquet de cigarettes et en prends une, c’est la dernière du paquet. Je vais sur le pont, je compte mes pas, je m’arrête au milieu.

On voit la lune entièrement, je pleure.

Il fait froid, je retire mes chaussures.

Le pont est désert, je monte sur la rambarde.

J’ai trouvé un lit où je passerai la nuit, je regarde le fleuve : oui l’eau est belle.

 

On dit souvent qu’avant la mort, toute notre vie défile devant les yeux… C’est faux puisque ce que j’ai vu en sautant, c’était le néant.

         

– FIN –

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Crédit photographique : B.R.

Les élèves ont du talent… Lire en ligne : « L’Eau est belle » par Pauline C.

“Et si c’était un jour leur premier roman?”

Vous connaissez maintenant cette nouvelle rubrique proposée par les élèves de Seconde 18 et Seconde 7… Au départ, un exercice tout à fait “classique” : rédiger le début et la fin d’un roman… Les élèves les plus assidus à la tâche se sont pleinement investis dans ce challenge : travaillant et retravaillant les manuscrits, corrigeant la grammaire, revoyant la syntaxe, précisant le lexique et surtout s’attelant à la grande question du “style”, afin de proposer la première ébauche de ce qui pourrait bien devenir un jour leur “roman”. Le cahier de texte électronique est fier de vous proposer la lecture de ces textes tous inédits. Même s’il s’agit des premières pages et des dernières pages d’un possible livre, les manuscrits peuvent se lire comme une nouvelle…
Par ses qualités littéraires, ce texte rédigé par Pauline C. (Seconde 18), est particulièrement fort et poignant. Il mérite une attention particulière. Bonne lecture !

 

L’Eau est belle

(noire, profonde, infinie)

pauline-218_12.1263157742.JPG

par Pauline C.

(Seconde 18)

Incipit

J’ai sursauté, comme à mon habitude, lorsque la cloche annonçant la fin de la journée a sonné. Ce son aigu et brutal fut suivi du brouhaha agaçant des cent-quatre jeunes filles de St. Vincent. L’école n’est pas très grande, assez quelconque et de style contemporain il me semble. Elle se trouve dans un passage parallèle à l’église All Saints, au croisement de Margaret street et de Wells street, non loin de Hyde Park au centre de Londres, dans un environnement calme et pour moi rassurant. Je suis bien à école, les exercices ne m’enchantent pas mais je m’y sens en sécurité.

La plupart des jeunes filles de ma classe sont heureuses de pouvoir rentrer chez elles mais ce n’est guère mon cas. Je sais pertinemment que le chemin du retour sera plutôt long. Certaines élèves ne rentrent pas directement chez elles et restent ensemble pour une balade. Pour ce qui me concerne, j’attends Sophie devant l’école. Sophie c’est ma sœur, une gamine de douze ans, gentille mais écervelée. Je vous avouerai qu’il n’y a jamais eu de réelle complicité entre nous (je me contente de partager le nécessaire avec elle, pour ne pas déplaire à maman) probablement à cause de nos quatre ans de différence. En effet, j’ai seize ans, je ne suis encore qu’une adolescente, du moins c’est ce que j’espère.

Nous sommes en avril 1926, il y a quelques mois, Austen Chamberlain a obtenu le Prix Nobel de la Paix. Je me souviens de cet événement car notre enseignante en a été excessivement heureuse, d’après elle « les Britanniques ont rarement l’occasion de se faire remarquer ». Ma sœur et moi tournons dans Victoria street ; sur le mur, il reste encore des affiche de l’African-American West Student Union qui vient d’être fondée à Londres. Puis Sophie me raconte avec engouement sa journée quand nous croisons trois jeunes filles de St. Vincent ; deux d’entre elles, Jackie et Nicole sont dans ma classe, je ne connais pas la troisième. Le père de Jackie possède des mines de charbon, celui de Nicole serait avocat, d’après ce que j’ai entendu dire. En nous dépassant, ces bécasses habillées selon les codes victoriens me toisent de haut en bas avec mépris. J’y suis habituée, à ce regard : toutes les filles de l’école ont le même envers ma sœur aussi. Mais Sophie ne comprend pas vraiment, elle est jeune. Elle se doute quand même que les morceaux de tissus méticuleusement reprisés qui nous servent de vêtements sont pour quelque chose dans ce « je ne sais quoi » de distant qu’on nous manifeste. Mais contrairement à moi, elle a quelques camarades à l’école, elle est à un âge où les distinctions sociales ne semblent pas encore s’imposer. Je n’exprime néanmoins jamais ces plaintes, Maman ne le supporterait pas.

Maman… Forcée d’enchaîner les basses besognes pour nous permettre d’aller à cette école et d’avoir plus tard, une vie meilleure. Mais elle est malade, et de plus en plus sa peur de ne bientôt plus pouvoir travailler semble l’habiter. Avec Sophie, nous serions prêtes à arrêter l’école et à travailler s’il le fallait. Mais pour ce qui me concerne, Maman a d’autres projets qui ne me plaisent pas du tout : « Sady, tu es jeune et ravissante, tu n’auras aucun mal à trouver un époux convenable! » Par « convenable », je suppose qu’elle entend « riche » (et vieux!). Du haut de ses douze ans, Sophie rêve d’un mariage fantastique et semble du même avis que Maman. Nous traversons la rue Shakespeare et rêvons toutes deux de pouvoir un jour entrer dans l’une de ces boutiques cossues devant lesquelles nous ne faisons que passer : nous ne sommes pas Jackie et Nicole, seulement Sady et Sophie.

Nous marchons en silence, croisons moins de monde au fur et à mesure que nous avançons puis bifurquons dans une impasse nommée Emin’s, c’est étroit et sombre. Je me rends compte que la nuit est tombée. Nous sommes loin des boutiques croisées plus tôt. Il y quelques pubs bruyants, et l’odeur de la bière se mêle aux relents de tabac et de gin. Un homme dort sur le trottoir, allongé sur un carton déplié. Un autre est assis sur un banc et boit sa pinte. Les maisons ressemblent à des cabanes. Il n’y a plus aucun commerce, uniquement un petit marché tenu par une femme sale et mal habillée. La rue est sombre et sent mauvais. Nous sommes presque arrivées.

             

Excipit

Il y en a qui fêtent la nouvelle année 1936 ce soir, moi je suis là, dans ce même pub d’il y a dix ans, à commander un énième whisky. Je me rappelle quand je n’osais regarder à l’intérieur du haut de mes seize ans… Comme l’endroit n’est pas très grand, les quelques tables et chaises semblent se chevaucher. Un homme, barbu et ivre s’est endormi, sa chope à la main. Une prostituée se tient debout, adossée au mur, une clope au bec. Elle tente de faire des cercles en crachant la fumée, mais ce n’est pas très réussi : les cercles s’affaissent dans l’air, se cabossent, ivres et trébuchants eux aussi. Comme tout paraît simple : simple et sale. Toute la pièce est enfumée et les personnes semblent des ombres. La serveuse essuie la vaisselle, tristement. Je crois me rappeler qu’elle s’appelle Randie, elle est russe et n’a pas de famille ici, à Londres ; elle loge à l’étage juste au-dessus du bar. On entend vaguement une musique de fond ; c’est une chanson jazzy de Duke Ellington, je crois. Je fixe mon verre et m’aperçois de deux choses : la première est qu’il est presque vide ; et la seconde, on y voit mon reflet, dans ce verre plein de traces de rouge à lèvres. Pas très glorieux, je trouve. Mes yeux sont cernés de noir, aussi bien par le maquillage et l’alcool que par la fatigue ; j’ai la peau anormalement pâle. Mes boucles d’autrefois sont devenues de pauvres bouclettes tristes. Mes joues se sont creusées, la malnutrition me rend trop maigre. Je vide mon verre et quitte le pub, sans un mot. Je ne paye pas car certains soirs je travaille ici, comme serveuse.

Une fois dans la rue, je sors une cigarette et l’allume, ça me réchauffe les mains, un peu. Il fait très froid, je porte un débardeur rouge, une petite jupe très courte, des résilles et des bottes. La rue est déserte, les gens fêtent le réveillon chez eux, en famille, au chaud. Ma peau se glace, petit à petit; je ne sens plus mes mains, mes muscles se contractent et font tomber ma cigarette. Mes doigts me font trop mal pour en prendre une autre. Je continue de marcher et croise des prostituées habituées des pubs. On se salue furtivement et on  continue d’avancer. Je ne sais pas où je passerai la nuit, je sais que si je m’endors dans la rue ce soir, je ne me réveillerai jamais, à cause du froid. Je tourne et emprunte Matthew Parker Street. Il y a des restaurants ou dînent des familles et des couples venus fêter le nouvel an. Quelques personnes marchent dans la rue, dans leurs fourrures et leurs gants et leur insouciance. Savent-elles qu’on se saoule et qu’on dort sur les trottoirs à quelques rues d’ici ? Le savent-elles ?

Je marche, les passants ne font pas attention à moi. Je retrouve l’indifférence et le mépris auxquels ces gens m’ont toujours habituée. On entend des chansons et des rires d’enfants venus des appartements ou des restaurants, enfin… des endroits chauds. Je marche vite pour fuir le froid et je passe à travers une épaisse couche de brouillard, pareille à de la fumée d’usine. Je m’arrête, mon chemin m’a menée au bord du fleuve ; je suis arrivée au terme du voyage. L’eau est belle : noire profonde, infinie. Les arbres n’ont plus de feuilles, ils ont froid eux aussi. Il n’y a personne autour de moi, je suis seule parmi le soir. Je sors mon paquet de cigarettes et en prends une, c’est la dernière du paquet. Je vais sur le pont, je compte mes pas, je m’arrête au milieu.

On voit la lune entièrement, je pleure.

Il fait froid, je retire mes chaussures.

Le pont est désert, je monte sur la rambarde.

J’ai trouvé un lit où je passerai la nuit, je regarde le fleuve : oui l’eau est belle.

 

On dit souvent qu’avant la mort, toute notre vie défile devant les yeux… C’est faux puisque ce que j’ai vu en sautant, c’était le néant.

         

– FIN –

pauline-218_134.1263235997.jpg

Crédit photographique : B.R.

Les élèves ont du talent… Lire en ligne : "All over the world" par Sibylle B.

“Et si c’était un jour leur premier roman?”

Vous connaissez maintenant cette nouvelle rubrique proposée par les élèves de Seconde 18 et Seconde 7… Au départ, un exercice tout à fait “classique” : rédiger le début et la fin d’un roman… Les élèves les plus assidus à la tâche se sont pleinement investis dans ce challenge : travaillant et retravaillant les manuscrits, corrigeant la grammaire, revoyant la syntaxe, précisant le lexique et surtout s’attelant à la grande question du “style”, afin de proposer la première ébauche de ce qui pourrait bien devenir un jour leur “roman”. Le cahier de texte électronique est fier de vous proposer la lecture de ces textes tous inédits. Même s’il s’agit des premières pages et des dernières pages d’un possible livre, les manuscrits peuvent se lire comme une nouvelle…
Bonne lecture !

All over the World

—La Fin d’un voyage, le début d’une vie—

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par Sibylle B.

(Seconde 18)

Pauline, je m’appelle Pauline. Nous étions en 2003 à l’heure où j’ai commencé à écrire ces lignes. Aujourd’hui j’ai vingt-sept ans, et je reviens d’un tour du monde avec Malika, handicapée physique. Pourquoi un tour du monde ? Un vieux rêve d’enfance : j’ai toujours été nourrie de voyages tout au long de ma jeunesse ; voyager est un mot magique, un mot de vent et de sables, un mot de ciels, et de nuits, et d’aubes, et d’exils…

Dès que l’on me parle de voyages, je ne pense plus qu’à cela durant le reste de ma journée. J’ai déjà beaucoup voyagé, seule, un peu partout dans le monde, mais toujours pour une courte durée, jamais assez longue et cela me laissait entre les lèvres un goût de trop peu. Malika a nourri le même rêve que moi, je la connais depuis mes quinze ans et nous ne nous sommes jamais perdues de vue : elle aussi a beaucoup voyagé. Nos études étaient maintenant achevées, j’ai obtenu mon diplôme d’infirmière, elle, un diplôme d’ingénieur. Et c’est ensemble que nous avons rêvé d’entreprendre un tour du monde. Mais comment ? Nous avons commencé à énumérer tous les moyens de transport possibles : la montgolfière ? Ou non : le vélocipède, ou en calèche, en train, en avion, en bateau, à vélo, à pied…

« Pourquoi pas en rollers pendant que tu y es! » me dit Malika ; et c’est vrai que pendant des heures, nous avons déliré ! Le voyage commençait déjà à travers les mots et les rires ! Mais une chose était sûre : finalement, nous avons éliminé l’avion : trop basique pour nous ! Après mûres réflexions, le vélo semblait bien être la meilleure des solutions pour les transports terrestres, ainsi que le bateau entre les continents. Pendant de longs mois, nous avons feuilleté un nombre incalculable de revues, rêvé devant les agences de voyage, discuté sur la toile avec des voyageurs du bout du monde : tant de questions nous faisaient déjà partir…

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C’est impressionnant comment un rêve peut s’écrouler en l’espace de quelques secondes… Nous sortions de l’agence de voyage, tout était prêt ou presque, et puis cette voiture roulant trop vite, au passage piétons… Malika fut percutée de plein fouet, les deux jambes furent touchées, les urgences vite appelées : sirènes, perfusions, le rêve brisé. Je la voyais, là sur le brancard, immobile, et comme si c’eût été son dernier voyage : notre tour du monde se brisait sur ce lit d’hôpital… Elle y est restée pour plusieurs mois… Des mois de déprime et de larmes. Des mois d’hôpital et de souffrance. Mois de mélancolie, de larmes et de nostalgie. Il était bien loin notre tour du monde !

Je la voyais là, tous les jours dans ce fauteuil, et les océans que nous rêvions de traverser semblaient s’écouler sans fin de ses yeux. Alors je pensais qu’elle n’aurait plus jamais de jambes, qu’elle ne remarcherait plus jamais ! Jamais, jamais, jamais : un mot qui fait mal à entendre, un mot douloureux : je ne pouvais pas me mettre à sa place ! Je l’accompagnais tous les jours pour sa séance de rééducation, pour son apprentissage de marcher en fauteuil, une douleur pour elle. Au début, elle ne voulait pas me voir, ni même entendre mon nom. Moi avec mes deux jambes, entière, c’était un enfer, une torture. Dès que elle me voyait, elle tournait la tête, faisait comme si je n’étais qu’une étrangère, juste une infirmière de cet hôpital. Il n’y avait plus d’amitié qui tienne, une amitié brisée. Elle broyait du noir jour après jour  en se demandant : « Pourquoi vivre encore ? » Je ne pouvais la réconforter, une étrangère, voilà ce que j’étais.

Le tour du monde était détruit, nos projets de voyages rompus. Sa vie était un cauchemar. Mais pour moi, le projet était encore là, vivant, juste en attente. Une pause. Non une fin. Je lui ai donc fait fabriquer un handbike. De temps en temps, quand elle appréciait ma compagnie, j’essayais de glisser un mot, une allusion au fameux tour du monde. Elle ne voulait rien entendre, faisait la sourde. Je lui offris ce vélo ; elle me fusilla du regard : « Tu n’as donc pas compris, je n’en veux pas. » Et sur ces mots, je partis.

feuille.1242597878.jpg

Comme je le disais en commençant mon récit, hier je suis revenue de ce tour du monde, ou plutôt NOUS sommes revenues ! Des sourires gravés dans nos mémoires… Les plus belles rencontres ne seront plus bientôt que des souvenirs, des photos enfermées dans une boite, mais qu’importe. Nous venons juste d’accoster sur le sol français après cinq ans d’absence, de voyages, de bonheur. Nous avons traversé pas moins de quarante-cinq pays, nous avons péché avec une famille dans les fonds rocheux volcaniques de la presqu’île du Cap Vert, dans les eaux chaudes de sibylle_b_1_111.1263139042.jpgCasamance au Sénégal, nous avons descendu les 3345 mètres de la route de la mort avec notre vélo, côtoyé le toit du monde de la Cordillères des Andes, fait du vélo dans le Salar de Uyuni, j’ai touché les geysers perchés à 5000 mètres, et Malika est parvenue à parler de son handicap…

Que de monuments exceptionnels avons-nous visités : pas moins de quatre des sept merveilles du monde… Le Machu Picchu sur le versant oriental des Andes centrales,  l’ancienne ville maya de Chichén Itzá, entre Valladolid et Mérida au Mexique, les pyramides d’Égypte et la Grande Muraille de Chine. J’ai aussi randonné dans les steppes de Patagonie entre l’Argentine et le Chili, pique-niqué en face des quinze Moai de l’Ile de Pâques, plongé dans les fonds marins d’Indonésie et vers la grande barrière de corail, au nord-est de l’Australie. Un de nos plus mémorables souvenirs culinaires est d’avoir goûté à la tarentule. C’était tout aussi étrange que la chenille, le cochon d’Inde, le serpent, le rat, le chien, le criquet et toute autre nourriture inconnue et peu fréquentable.

Un grain de poussière, voilà ce que nous sommes quand nous voyageons. Le monde est tellement vaste et riche qu’une vie entière suffirait à peine à entrevoir tous ces voyages qu’on ne fera sans doute jamais… Mais le monde est accessible à tous, c’est un cadeau de la vie. Dès que nous arrivions dans un village, les gens avaient toujours leur porte ouverte pour nous accueillir, pour nous offrir les plus belles rencontres que l’on puisse imaginer. Notre aventure a été une liberté, un grand changement dans notre quotidien : plus besoin de prendre des repas à des heures précises, plus besoin d’avoir un supérieur et de rendre des comptes : la vie était un voyage. Nous étions libres. Dans une bulle. Seules face au monde. Nous nous sommes enrichies de paysages, d’émotions, de rencontres. Nos yeux se sont heurtés à tant de routes nouvelles, à tant de ciels inconnus, à tant de villes prochaines… Un matin sous une pluie torrentielle, devant les temples d’Angkor, Malika a enfin accepté le fait qu’elle avait perdu ses jambes, mais qu’elle pouvait marcher autrement, avec les yeux et son cœur… Notre esprit, notre voix, notre souffle étaient bloqués devant tant de beauté : étions-nous en train de rêver ?

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Le retour en France fut un moment de tristesse et de bonheur mêlés. Quand on revient, on a l’impression que rien n’a changé : les amis sont les mêmes, la ville non plus ne semble pas avoir bougé, même après cinq ans. Mais revenir, c’est aussi se redécouvrir : on ne cherche plus n’importe qui, au hasard de rencontres fortuites sur Internet, mais des gens qui prennent leur avenir en mains. Le plus dur fut de me sentir de nouveau envahie par une société de consommation, de marques. Le réapprentissage des codes et des normes reprit. Notre bulle a éclaté. Mais les souvenirs sont là, à jamais. La fin d’un voyage, le début d’une vie…

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Les élèves ont du talent… Lire en ligne : « All over the world » par Sibylle B.

“Et si c’était un jour leur premier roman?”

Vous connaissez maintenant cette nouvelle rubrique proposée par les élèves de Seconde 18 et Seconde 7… Au départ, un exercice tout à fait “classique” : rédiger le début et la fin d’un roman… Les élèves les plus assidus à la tâche se sont pleinement investis dans ce challenge : travaillant et retravaillant les manuscrits, corrigeant la grammaire, revoyant la syntaxe, précisant le lexique et surtout s’attelant à la grande question du “style”, afin de proposer la première ébauche de ce qui pourrait bien devenir un jour leur “roman”. Le cahier de texte électronique est fier de vous proposer la lecture de ces textes tous inédits. Même s’il s’agit des premières pages et des dernières pages d’un possible livre, les manuscrits peuvent se lire comme une nouvelle…
Bonne lecture !

All over the World

—La Fin d’un voyage, le début d’une vie—

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par Sibylle B.

(Seconde 18)

Pauline, je m’appelle Pauline. Nous étions en 2003 à l’heure où j’ai commencé à écrire ces lignes. Aujourd’hui j’ai vingt-sept ans, et je reviens d’un tour du monde avec Malika, handicapée physique. Pourquoi un tour du monde ? Un vieux rêve d’enfance : j’ai toujours été nourrie de voyages tout au long de ma jeunesse ; voyager est un mot magique, un mot de vent et de sables, un mot de ciels, et de nuits, et d’aubes, et d’exils…

Dès que l’on me parle de voyages, je ne pense plus qu’à cela durant le reste de ma journée. J’ai déjà beaucoup voyagé, seule, un peu partout dans le monde, mais toujours pour une courte durée, jamais assez longue et cela me laissait entre les lèvres un goût de trop peu. Malika a nourri le même rêve que moi, je la connais depuis mes quinze ans et nous ne nous sommes jamais perdues de vue : elle aussi a beaucoup voyagé. Nos études étaient maintenant achevées, j’ai obtenu mon diplôme d’infirmière, elle, un diplôme d’ingénieur. Et c’est ensemble que nous avons rêvé d’entreprendre un tour du monde. Mais comment ? Nous avons commencé à énumérer tous les moyens de transport possibles : la montgolfière ? Ou non : le vélocipède, ou en calèche, en train, en avion, en bateau, à vélo, à pied…

« Pourquoi pas en rollers pendant que tu y es! » me dit Malika ; et c’est vrai que pendant des heures, nous avons déliré ! Le voyage commençait déjà à travers les mots et les rires ! Mais une chose était sûre : finalement, nous avons éliminé l’avion : trop basique pour nous ! Après mûres réflexions, le vélo semblait bien être la meilleure des solutions pour les transports terrestres, ainsi que le bateau entre les continents. Pendant de longs mois, nous avons feuilleté un nombre incalculable de revues, rêvé devant les agences de voyage, discuté sur la toile avec des voyageurs du bout du monde : tant de questions nous faisaient déjà partir…

feuille.1242597878.jpg

C’est impressionnant comment un rêve peut s’écrouler en l’espace de quelques secondes… Nous sortions de l’agence de voyage, tout était prêt ou presque, et puis cette voiture roulant trop vite, au passage piétons… Malika fut percutée de plein fouet, les deux jambes furent touchées, les urgences vite appelées : sirènes, perfusions, le rêve brisé. Je la voyais, là sur le brancard, immobile, et comme si c’eût été son dernier voyage : notre tour du monde se brisait sur ce lit d’hôpital… Elle y est restée pour plusieurs mois… Des mois de déprime et de larmes. Des mois d’hôpital et de souffrance. Mois de mélancolie, de larmes et de nostalgie. Il était bien loin notre tour du monde !

Je la voyais là, tous les jours dans ce fauteuil, et les océans que nous rêvions de traverser semblaient s’écouler sans fin de ses yeux. Alors je pensais qu’elle n’aurait plus jamais de jambes, qu’elle ne remarcherait plus jamais ! Jamais, jamais, jamais : un mot qui fait mal à entendre, un mot douloureux : je ne pouvais pas me mettre à sa place ! Je l’accompagnais tous les jours pour sa séance de rééducation, pour son apprentissage de marcher en fauteuil, une douleur pour elle. Au début, elle ne voulait pas me voir, ni même entendre mon nom. Moi avec mes deux jambes, entière, c’était un enfer, une torture. Dès que elle me voyait, elle tournait la tête, faisait comme si je n’étais qu’une étrangère, juste une infirmière de cet hôpital. Il n’y avait plus d’amitié qui tienne, une amitié brisée. Elle broyait du noir jour après jour  en se demandant : « Pourquoi vivre encore ? » Je ne pouvais la réconforter, une étrangère, voilà ce que j’étais.

Le tour du monde était détruit, nos projets de voyages rompus. Sa vie était un cauchemar. Mais pour moi, le projet était encore là, vivant, juste en attente. Une pause. Non une fin. Je lui ai donc fait fabriquer un handbike. De temps en temps, quand elle appréciait ma compagnie, j’essayais de glisser un mot, une allusion au fameux tour du monde. Elle ne voulait rien entendre, faisait la sourde. Je lui offris ce vélo ; elle me fusilla du regard : « Tu n’as donc pas compris, je n’en veux pas. » Et sur ces mots, je partis.

feuille.1242597878.jpg

Comme je le disais en commençant mon récit, hier je suis revenue de ce tour du monde, ou plutôt NOUS sommes revenues ! Des sourires gravés dans nos mémoires… Les plus belles rencontres ne seront plus bientôt que des souvenirs, des photos enfermées dans une boite, mais qu’importe. Nous venons juste d’accoster sur le sol français après cinq ans d’absence, de voyages, de bonheur. Nous avons traversé pas moins de quarante-cinq pays, nous avons péché avec une famille dans les fonds rocheux volcaniques de la presqu’île du Cap Vert, dans les eaux chaudes de sibylle_b_1_111.1263139042.jpgCasamance au Sénégal, nous avons descendu les 3345 mètres de la route de la mort avec notre vélo, côtoyé le toit du monde de la Cordillères des Andes, fait du vélo dans le Salar de Uyuni, j’ai touché les geysers perchés à 5000 mètres, et Malika est parvenue à parler de son handicap…

Que de monuments exceptionnels avons-nous visités : pas moins de quatre des sept merveilles du monde… Le Machu Picchu sur le versant oriental des Andes centrales,  l’ancienne ville maya de Chichén Itzá, entre Valladolid et Mérida au Mexique, les pyramides d’Égypte et la Grande Muraille de Chine. J’ai aussi randonné dans les steppes de Patagonie entre l’Argentine et le Chili, pique-niqué en face des quinze Moai de l’Ile de Pâques, plongé dans les fonds marins d’Indonésie et vers la grande barrière de corail, au nord-est de l’Australie. Un de nos plus mémorables souvenirs culinaires est d’avoir goûté à la tarentule. C’était tout aussi étrange que la chenille, le cochon d’Inde, le serpent, le rat, le chien, le criquet et toute autre nourriture inconnue et peu fréquentable.

Un grain de poussière, voilà ce que nous sommes quand nous voyageons. Le monde est tellement vaste et riche qu’une vie entière suffirait à peine à entrevoir tous ces voyages qu’on ne fera sans doute jamais… Mais le monde est accessible à tous, c’est un cadeau de la vie. Dès que nous arrivions dans un village, les gens avaient toujours leur porte ouverte pour nous accueillir, pour nous offrir les plus belles rencontres que l’on puisse imaginer. Notre aventure a été une liberté, un grand changement dans notre quotidien : plus besoin de prendre des repas à des heures précises, plus besoin d’avoir un supérieur et de rendre des comptes : la vie était un voyage. Nous étions libres. Dans une bulle. Seules face au monde. Nous nous sommes enrichies de paysages, d’émotions, de rencontres. Nos yeux se sont heurtés à tant de routes nouvelles, à tant de ciels inconnus, à tant de villes prochaines… Un matin sous une pluie torrentielle, devant les temples d’Angkor, Malika a enfin accepté le fait qu’elle avait perdu ses jambes, mais qu’elle pouvait marcher autrement, avec les yeux et son cœur… Notre esprit, notre voix, notre souffle étaient bloqués devant tant de beauté : étions-nous en train de rêver ?

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Le retour en France fut un moment de tristesse et de bonheur mêlés. Quand on revient, on a l’impression que rien n’a changé : les amis sont les mêmes, la ville non plus ne semble pas avoir bougé, même après cinq ans. Mais revenir, c’est aussi se redécouvrir : on ne cherche plus n’importe qui, au hasard de rencontres fortuites sur Internet, mais des gens qui prennent leur avenir en mains. Le plus dur fut de me sentir de nouveau envahie par une société de consommation, de marques. Le réapprentissage des codes et des normes reprit. Notre bulle a éclaté. Mais les souvenirs sont là, à jamais. La fin d’un voyage, le début d’une vie…

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Les élèves ont du talent… Lire en ligne : “Forever” par Claire D.

Et si c’était un jour leur premier roman?”

Tel pourrait être le titre de cette nouvelle rubrique proposée par les élèves de Seconde 18 et Seconde 7… Au départ, un exercice tout à fait “classique” : rédiger le début et la fin d’un roman… Les élèves les plus assidus à la tâche se sont pleinement investis dans ce challenge : travaillant et retravaillant les manuscrits, corrigeant la grammaire, revoyant la syntaxe, précisant le lexique et surtout s’attelant à la grande question du “style”, afin de proposer la première ébauche de ce qui pourrait bien devenir un jour leur “roman”. Le cahier de texte électronique est fier de vous proposer la lecture de ces textes tous inédits. Même s’il s’agit des premières pages et des dernières pages d’un possible livre, les manuscrits peuvent se lire comme une nouvelle…
Bonne lecture !

Découvrez le manuscrit…

FOREVER

Larmes blanches

         

par Claire D. (Seconde 18)

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-Incipit-

Effy alluma une dernière cigarette. La fatigue se lisait sur son visage ; ses yeux étaient gonflés, elle laissa échapper une nouvelle larme, une larme parmi tant d’autres.

Depuis un mois et six jours, son quotidien se résumait à ça : pleurer. Jimmy était mort. Il venait de fêter son seizième anniversaire. La maladie l’avait emporté, un matin. Un matin parmi tant d’autres.Effy était maintenant seule, sans Jimmy. Son cœur était déchiré par la tristesse, jamais plus elle ne pourrait être heureuse… Sa cigarette finie, Effy se dirigea vers l’entrée du cimetière. Chaque semaine elle y allait et chaque semaine était la même épreuve : lui qui était si vivant… La mort était venue et l’avait emporté. Une mort parmi tant d’autres. La mort, c’était la seule chose qui pouvait les séparer, eux, les inséparables. Effy déposa un bouquet sur sa tombe et s’en alla…

-Effy qu’est-ce que tu fous ?

Sa mère avait beaucoup changé depuis son divorce, prononcé six mois auparavant. Les cheveux grisés, la clope au bec, la mine pâle. Cette image attrista encore plus Effy : sa mère si belle avant, ne ressemblait plus à rien maintenant. Depuis son divorce elle avait plongé dans l’alcool, les bouteilles vides s’entassaient dans la poubelle. Elles mangèrent en silence. Un silence monotone, mort. Un silence parmi tant d’autres.

Nouvelles larmes, nouvelles journées. Dehors il neigeait, des perles blanches tombaient. C’étaient des larmes, des larmes blanches, des larmes de tristesse, des larmes d’oubli…

Effy se dirigea vers son lycée, où tout avait changé. Chaque recoin du bâtiment lui rappelait Jimmy, son Jimmy. Elle repensa alors à la dernière fois qu’elle l’avait vu. C’était à l’hôpital, les médecins étaient formels : Jimmy vivait son dernier jour. Effy avait passé toute la journée avec lui : quand son cœur s’arrêta de battre, Effy avait déposé un baiser sur sa joue, un baiser bref, mêlé au goût salé de ses larmes. Elle avait pris sa main froide et l’avait déposée sur son cœur tout en prononçant leur devise : « Forever ».

Les jours suivants, Effy resta cloitrée dans sa chambre. Pourquoi cette injustice ? Pourquoi le malheur s’abattait sur elle ? pourquoi lui avait-on enlevé sa moitié d’elle ? En cours Effy ne suivait plus : à quoi bon ? Devant elle, la place qu’occupait Jimmy était toujours là, vacante : une place parmi tant d’autres…

En rentrant chez elle après les cours, elle se dit qu’elle ne pouvait plus vivre comme ça. Sans lui, la vie n’avait plus aucun sens, le ciel ne serait plus jamais bleu, plus jamais les oiseaux ne chanteraient, plus jamais… Le lendemain Effy se leva, il était six heures, sa mère rentrait dans une heure. Elle alla dans la cuisine puis dans la salle de bain, prit les somnifères de sa mère et les avala…

Quand la mère d’Effy rentra de sa nuit de garde à l’hôpital, elle trouva un mot sur la table de la cuisine :

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Elle entendit le réveil d’Effy, ce réveil qui normalement aurait dû être éteint depuis une demi-heure. Elle courut dans le couloir, se prit les pieds dans les escaliers, cria le prénom de sa fille. Mais elle n’entendit aucune réponse. Quand elle arriva dans la chambre d’Effy, elle gisait sur le sol, blanche, froide. Elle avait le bracelet en cuir de Jimmy autour du poignet et dans sa main se trouvait un bout de papier, pliés en quatre :

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C’étaient les paroles d’une chanson de Damien Saez, « Soleil 200O » que Jimmy et elle avaient recopiées sur une page de cahier… Effy laissait derrière elle la maison vide, une maison comme tant d’autres ; une mère affligée, un réveil allumé, une vie monotone, une vie comme tant d’autres, triste à pleurer… Les jours suivants la neige ne s’arrêta pas de tomber, ce furent des larmes, des larmes blanches…

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-Excipit-

On dit souvent qu’avant de mourir on voit sa vie défiler sous les yeux. Personne n’a jamais confirmé cette hypothèse. Mais, si elle s’avérait être vraie alors Effy et Jimmy avaient vu défiler sous leurs yeux les quinze années de leur courte vie. Jimmy fut le premier à quitter le monde. La maladie aux poumons qu’il avait depuis sa naissance l’avait emporté, très loin, de l’autre côté de la terre. Le premier souvenir qu’il vu défiler fut celui d’Effy lui demandant de l’épouser. Ils avaient cinq ans à l’époque. À cet âge-là on ne connait pas les problèmes, on profite de la vie, tout est si simple…

Effy et Jimmy s’étaient toujours connus, chaque nouveauté ils l’avaient découverte ensemble, chaque recoin ils l’avaient exploré ensemble. Si vous aviez cherché la définition de l’amitié dans un dictionnaire, leurs deux noms auraient sûrement été indiqués… La vie de Jimmy continuait de défiler, il n’avait pas mal, il ne sentait rien. À un moment il crut recevoir un baiser sur la joue, il crut entendre quelqu’un prononcer le mot « FOREVER ». Ce mot, Effy en avait fait leur devise, ils l’avaient même gravé sur un arbre de la ville…

-Eh Jimmy tu m’aimes gros comment ?
-Je t’aime gros comme une montgolfière !

Cette réponse avait vexé Effy qui avait alors dix ans. Jimmy était amoureux d’Effy. Elle, ne l’était apparemment pas. Au fil des années ils avaient développé une sorte d’amour fraternel. Ils se connaissaient tellement que chaque geste de l’autre, ils pouvaient le prédire. Chaque regard, ils pouvaient l’interpréter. Leur union était si forte que si l’un des deux venait à partir alors la vie n’aurait plus aucun sens… Effy sentit ses yeux se fermer. Petit à petit elle ne sentit plus ses membres. Puis son cœur s’arrêta de battre…

Le premier souvenir qui lui vint à l’esprit fut celui du divorce de ses parents : au début ce n’étaient que de brèves disputes mais elles se transformèrent vite en scènes de ménage. Quand son père avait quitté la maison, Effy s’était senti abandonnée. Peu après, sa mère tomba dans la spirale infernale de l’alcool, laissant Effy gérer sa tristesse. Seule. Est-ce qu’elle était morte, elle ne le savait pas, elle ne savait rien. Elle avait arrêté de penser à la mort de Jimmy. Elle n’eut pas de peine à quitter sa mère : son départ ne serait qu’une perte de plus. Et puis elle comprendrait ce geste, sa fille serait beaucoup mieux à côté de celui qui l’avait toujours aimée…

forever_anges_3.1262351932.JPGLe deuxième et dernier souvenir qu’elle vit fut celui de Jimmy allongé sur ses genoux. Il lui racontait une anecdote sur leur prof de Français. Cette journée fut la dernière journée heureuse qu’ils passèrent ensemble. Le lendemain Jimmy fut emmené d’urgence à l’hôpital et y décéda une journée après son admission. Ses souvenirs s’arrêtèrent là. Où était-elle ? Personne ne le savait…

Maintenant ils étaient à nouveau réunis, autour d’eux tout était blanc comme neige, ils étaient heureux, ils pleuraient, des larmes, des larmes blanches, des larmes de joie : Jimmy regarda Effy, posa sa main sur son cœur et prononça « Forever », leur devise… Ce soir-là, la mère d’Effy regarda la nuit, la lune brillait plus intensément que jamais, et dans le ciel, tout là-bas, deux nouvelles étoiles étaient apparues…

Lancement de l'exposition de poésies de la classe de Première S3 "De mots, de rimes et de sables…"

La Classe de Première S3 présente…

               

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La classe de Première S3 a mené un important travail de création poétique, mêlant à l’inspiration littéraire le graphisme, le dessin ou la peinture : de fait, tous les poèmes ont été illustrés par les élèves. Pour accéder à cette exposition, cliquez ici ou allez à la rubrique « Les classes exposent » (colonne latérale à gauche) et cliquez sur la classe de Première S3. À cette heure, l’ensemble des textes a été numérisé… Mais les élèves terminent les illustrations. Donc seuls les poèmes finalisés sont exposés. Les autres textes seront mis en ligne au fur et à mesure de l’achèvement des dessins (de décembre 2009 à janvier 2010).

Et découvrez ci-dessous une création collective conçue à partir des titres des poèmes de l’exposition !

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Lancement de l’exposition de poésies de la classe de Première S3 « De mots, de rimes et de sables… »

La Classe de Première S3 présente…

               

expo1s3.1260724569.jpg

La classe de Première S3 a mené un important travail de création poétique, mêlant à l’inspiration littéraire le graphisme, le dessin ou la peinture : de fait, tous les poèmes ont été illustrés par les élèves. Pour accéder à cette exposition, cliquez ici ou allez à la rubrique « Les classes exposent » (colonne latérale à gauche) et cliquez sur la classe de Première S3. À cette heure, l’ensemble des textes a été numérisé… Mais les élèves terminent les illustrations. Donc seuls les poèmes finalisés sont exposés. Les autres textes seront mis en ligne au fur et à mesure de l’achèvement des dessins (de décembre 2009 à janvier 2010).

Et découvrez ci-dessous une création collective conçue à partir des titres des poèmes de l’exposition !

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Les élèves ont du talent… Lire en ligne : "C'était ma sœur après tout…" par Ksénia C.

“Et si c’était un jour leur premier roman?”

Tel pourrait être le titre de cette nouvelle rubrique proposée par les élèves de Seconde 18 et Seconde 7… Au départ, un exercice tout à fait “classique” : rédiger le début et la fin d’un roman… Les élèves les plus assidus à la tâche se sont pleinement investis dans ce challenge : travaillant et retravaillant les manuscrits, corrigeant la grammaire, revoyant la syntaxe, précisant le lexique et surtout s’attelant à la grande question du “style”, afin de proposer la première ébauche de ce qui pourrait bien devenir un jour leur “roman”. Le cahier de texte électronique est fier de vous proposer la lecture de ces textes tous inédits. Même s’il s’agit des premières pages et des dernières pages d’un possible livre, les manuscrits peuvent se lire comme une nouvelle…
Bonne lecture !
                    

C’était ma sœur après-tout…

(des larmes sans compter)

(roman)

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Première page du roman…
Elle restait devant l’écran vide, noir, inanimé, sans savoir pourquoi ni comment, sans comprendre —ne fût-ce qu’un instant— ses gestes (peut-être ceux de la révolte, ou était-ce de l’acceptation ou du désarroi ?). Elle le fixait sans bouger, immobile. Je crus même qu’elle était vraiment paralysée. Seuls ses yeux clignaient d’une façon banale et monotone. Rêvait-elle? Pensait-elle à un moyen ou à un autre de remédier à cette situation? (non je ne le crois pas).
C’était un soir d’octobre, McDowel Road semblait hiberner, malgré « un terrible vent froid venu de Sibérie » disait-on au journal de vingt heures. Et tout d’un coup, malgré la chaleur étouffante de notre maison, je sens un frisson m’envahir.
Aucun bruit (les voisins étaient depuis déjà un bon bout de temps inactifs, au chômage je crois, ils me paraissaient attardés, à regarder toute la journée par la fenêtre, comme s’ils s’attendaient à l’arrivée d’une bonne nouvelle, ou d’une mauvaise, enfin… de quelque chose). Des rumeurs circulaient dans le quartier, comme quoi leur fils était mort à la guerre du Vietnam, et que depuis ce jour, ils étaient devenus si (je ne trouve aucun mot correspondant a mes pensées), « déroutés », serait peut-être le mieux approprié.
Une voix qui me sembla venue de loin, informe la population qu’une tornade viendra frapper tout l’État d’Arizona d’ici environ cinq heures… À Phoenix nous ne sommes pas si souvent sujets à des désastres climatiques, contrairement à d’autres États… Et pourtant je ne peux m’empêcher d’être inquiète aujourd’hui. Pourquoi reste-t-elle devant l’écran vide ? à regarder une image statique ? à tapoter maintenant sa cuisse, avec sont petit doigt (allez savoir si c’était un tic?)…
Je prends ensuite une feuille de papier A4. Et saisis un crayon de graphiste. Je gribouille un instant quelques phrases qui me viennent naturellement, tel un écrivain sûr de son geste, et j’essaye de leur donner un sens, le tout forme un poème de mots égarés… De minuscules particules d’eau viennent effleurer la fenêtre, aussi douces que la rosée au départ, mais qui, avec le vent, prennent une ampleur surdimensionnée : à les voir, elles pourraient terrasser un immeuble, ou peut-être même la vie ?
Je la saisis par la main telle un petit être fragile, pensant deviner dans ses pensées la crainte d’un danger. Pas de réaction. Mais je veux me convaincre qu’elle me remercie intérieurement. Sa main était tiède et sèche. On aurait cru qu’elle pouvait se briser, rien qu’avec une infime pression de mes doigts. J’eus très envie d’essayer…
Une nouvelle annonce nous explique, avec des mots très scientifiques, que le cyclone se rapproche plus rapidement que prévu, il devrait nous atteindre d’ici une demi-heure… Nous sommes priés de bien vouloir rester à la maison et de n’utiliser la voiture qu’en cas « de force majeure ». J’entends ma mère : elle crie, elle à l’air paniqué, je crois qu’elle me dit de faire attention, de ne pas m’inquiéter… Oui, elle doit partir mais elle va bientôt revenir : elle n’en n’a pas pour très longtemps, des amis l’ont appelée, apparemment la tornade à déjà fait beaucoup de dégâts chez eux, ils habitent à l’autre bout de la ville, près de l’amphithéâtre sur la quarante-huitième. J’espère qu’il n’arrivera rien.
Mais soudain, j’aperçois sur son visage fatigué et pâle un pauvre sourire, un faux espoir… Entre elle et moi, un gigantesque fossé, infranchissable, malgré de multiples tentatives… Je voudrais lui dire…

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Dernière page…
Une infirmière s’approche de moi. Je la sens mal à l’aise, exténuée. Moi aussi, pour la première fois je ne sais comment réagir face à ce qu’elle m’annonce peut-être avec tact : « elle est condamnée, vous savez il ne lui reste plus beaucoup de temps, je suis désolée, puis je faire… ». Je ne lui laisse pas le temps de finir sa phrase : non, elle ne peut pas faire. Je suis devant le distributeur de café, je ne verse aucune larme, je réfléchis, je pense au passé, je ne fais que retourner dans ma tête la phrase de l’infirmière : « elle est condamnée… elle est condamnée… elle est condamnée… ».
Je n’ose plus m’approcher de sa chambre, de peur de la voir pour la dernière fois. Mais je sais qu’il faut que je sois près d’elle, je savais que ce moment devait un jour ou l’autre se produire mais pas maintenant, pas ici ! Ça ne sera jamais le bon moment, jamais le bon endroit de toute façon. Après tout ce temps passé à m’occuper d’elle, je ne suis pas prête à la laisser partir, et pourtant je me suis battue… J’avance tout droit sans le vouloir, mes pieds m’emmènent vers sa chambre, son lit toujours bien fait, sur lequel elle est couchée. Elle ne me regarde même plus, elle ne s’alimente plus.
Près de dix ans se sont écoulés depuis cette fameuse tornade de 1999, qui a tout balayé sur son passage, y compris ma joie de vivre. Cela fait dix ans qu’elle ne marche plus, qu’elle me laisse dans l’ignorance, et cela fait dix ans que je ne me considère plus comme une enfant. C’est à partir de ce moment là que tout a changé dans ma vie, et que ma vie… a cessé de vivre. Au début je ne comprenais pas, je ne la comprenais pas, je pensais qu’elle faisait semblant, et que c’était normal. Après la tornade, j’ai compris, la réalité m’a giclé au visage et depuis, je ne vis plus que pour elle, et pour sa maladie.
Je suis face à la porte de la chambre, tétanisée par l’image que je verrai : celle de son visage raide succombant à ces derniers souffles… Tu étais ma vie… Pourquoi j’attends ? Elle est là ! Avance ! C’est trop dur ! Je hurle de souffrance ! Ah ! Mon Dieu ! Ma vie est derrière cette porte ! Si elle n’est plus là, je n’ai aucune raison d’exister, de respirer, elle me donne ce courage même avec tout ce que j’ai enduré… Je franchis cette porte, je pleure pour la première fois depuis dix ans, plus que des pleurs des sanglots… Dix ans… Je lui tiens la main, je la serre très fort, je n’ai plus peur de lui faire mal, non, même ses yeux ne s’ouvrent plus, est-ce qu’elle sait que je l’aime d’un amour décadent ?
Chaque battement de son cœur est comme une pointe enfoncée de plus en plus loin dans mon corps partout (je n’en peux plus, je savais tout ça)… Ma main, elle a serré ma main ! Je n’y crois pas, mon espoir revient, je me sens mieux, je me sens libre, plus rien ne me fait mal maintenant. Je veux l’embrasser, la prendre dans mes bras. Je n’entends même pas les infirmières derrière moi, qui me supplient de la lâcher… Je le fais, passe un regard circulaire sur elles. Elles ne comprennent pas mon enthousiasme, je crie : «  elle m’a serré la main c’est un miracle ! » Je suis comme folle. Mais les deux infirmières me disent que non, le temps était venu pour elle, ce n’était pas vraiment elle qui m’a serré la main mais juste un réflexe, elles sont vraiment désolées… Elles me présentent leurs condoléances les plus sincères. Je les repousse, je regarde l’écran vide de ses battements de cœur, ce ne sont plus des piques, c’est une ligne : elle est morte…

Trouver sans fin des carreaux
Découvrir un sourire vide, infantile, décoloré
Partir vers des pointes symétriques.
Ouvrir une montre hermétique,
Arrêter le temps
Des lacets grisés par personne
Noués autour de tes pieds.
Une crêpe sur le sol
Encore chaude, colorée
« Au revoir » est écrit à l’envers
Coloré par des larmes sans compter
Une soif rare, linéaire
Plaquée sur toi…

Ma vie se résume à ce poème, écrit… Il y a dix ans déjà…
Cela fait un mois qu’elle est morte, je l’ai enterrée, il n’y avait que moi ce jour-là, je ne connaissais personne.
C’était ma sœur après tout… Partie en voyage sans laisser d’adresse…

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© Ksénia C. (Lycée en Forêt, Montargis, France. Décembre 2009).
Creative Commons License
“C’était ma sœur après tout” par Ksénia C. Ce texte est mis à disposition selon les termes de la licence Creative Commons Paternité-Pas d’Utilisation Commerciale-Pas de Modification 2.0 France. La diffusion publique sur un autre support n’est autorisée qu’après accord de l’auteure.

_____________

Crédit iconographique : toutes les images sont librement inspirées de toiles de Gustav Klimt, recolorisées et retouchées numériquement.

Les élèves ont du talent… Lire en ligne : « C’était ma sœur après tout… » par Ksénia C.

“Et si c’était un jour leur premier roman?”

Tel pourrait être le titre de cette nouvelle rubrique proposée par les élèves de Seconde 18 et Seconde 7… Au départ, un exercice tout à fait “classique” : rédiger le début et la fin d’un roman… Les élèves les plus assidus à la tâche se sont pleinement investis dans ce challenge : travaillant et retravaillant les manuscrits, corrigeant la grammaire, revoyant la syntaxe, précisant le lexique et surtout s’attelant à la grande question du “style”, afin de proposer la première ébauche de ce qui pourrait bien devenir un jour leur “roman”. Le cahier de texte électronique est fier de vous proposer la lecture de ces textes tous inédits. Même s’il s’agit des premières pages et des dernières pages d’un possible livre, les manuscrits peuvent se lire comme une nouvelle…
Bonne lecture !
                    

C’était ma sœur après-tout…

(des larmes sans compter)

(roman)

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Première page du roman…

Elle restait devant l’écran vide, noir, inanimé, sans savoir pourquoi ni comment, sans comprendre —ne fût-ce qu’un instant— ses gestes (peut-être ceux de la révolte, ou était-ce de l’acceptation ou du désarroi ?). Elle le fixait sans bouger, immobile. Je crus même qu’elle était vraiment paralysée. Seuls ses yeux clignaient d’une façon banale et monotone. Rêvait-elle? Pensait-elle à un moyen ou à un autre de remédier à cette situation? (non je ne le crois pas).

C’était un soir d’octobre, McDowel Road semblait hiberner, malgré « un terrible vent froid venu de Sibérie » disait-on au journal de vingt heures. Et tout d’un coup, malgré la chaleur étouffante de notre maison, je sens un frisson m’envahir.

Aucun bruit (les voisins étaient depuis déjà un bon bout de temps inactifs, au chômage je crois, ils me paraissaient attardés, à regarder toute la journée par la fenêtre, comme s’ils s’attendaient à l’arrivée d’une bonne nouvelle, ou d’une mauvaise, enfin… de quelque chose). Des rumeurs circulaient dans le quartier, comme quoi leur fils était mort à la guerre du Vietnam, et que depuis ce jour, ils étaient devenus si (je ne trouve aucun mot correspondant a mes pensées), « déroutés », serait peut-être le mieux approprié.

Une voix qui me sembla venue de loin, informe la population qu’une tornade viendra frapper tout l’État d’Arizona d’ici environ cinq heures… À Phoenix nous ne sommes pas si souvent sujets à des désastres climatiques, contrairement à d’autres États… Et pourtant je ne peux m’empêcher d’être inquiète aujourd’hui. Pourquoi reste-t-elle devant l’écran vide ? à regarder une image statique ? à tapoter maintenant sa cuisse, avec sont petit doigt (allez savoir si c’était un tic?)…

Je prends ensuite une feuille de papier A4. Et saisis un crayon de graphiste. Je gribouille un instant quelques phrases qui me viennent naturellement, tel un écrivain sûr de son geste, et j’essaye de leur donner un sens, le tout forme un poème de mots égarés… De minuscules particules d’eau viennent effleurer la fenêtre, aussi douces que la rosée au départ, mais qui, avec le vent, prennent une ampleur surdimensionnée : à les voir, elles pourraient terrasser un immeuble, ou peut-être même la vie ?

Je la saisis par la main telle un petit être fragile, pensant deviner dans ses pensées la crainte d’un danger. Pas de réaction. Mais je veux me convaincre qu’elle me remercie intérieurement. Sa main était tiède et sèche. On aurait cru qu’elle pouvait se briser, rien qu’avec une infime pression de mes doigts. J’eus très envie d’essayer…

Une nouvelle annonce nous explique, avec des mots très scientifiques, que le cyclone se rapproche plus rapidement que prévu, il devrait nous atteindre d’ici une demi-heure… Nous sommes priés de bien vouloir rester à la maison et de n’utiliser la voiture qu’en cas « de force majeure ». J’entends ma mère : elle crie, elle à l’air paniqué, je crois qu’elle me dit de faire attention, de ne pas m’inquiéter… Oui, elle doit partir mais elle va bientôt revenir : elle n’en n’a pas pour très longtemps, des amis l’ont appelée, apparemment la tornade à déjà fait beaucoup de dégâts chez eux, ils habitent à l’autre bout de la ville, près de l’amphithéâtre sur la quarante-huitième. J’espère qu’il n’arrivera rien.

Mais soudain, j’aperçois sur son visage fatigué et pâle un pauvre sourire, un faux espoir… Entre elle et moi, un gigantesque fossé, infranchissable, malgré de multiples tentatives… Je voudrais lui dire…

ksenia.1260646982.jpg

Dernière page…

Une infirmière s’approche de moi. Je la sens mal à l’aise, exténuée. Moi aussi, pour la première fois je ne sais comment réagir face à ce qu’elle m’annonce peut-être avec tact : « elle est condamnée, vous savez il ne lui reste plus beaucoup de temps, je suis désolée, puis je faire… ». Je ne lui laisse pas le temps de finir sa phrase : non, elle ne peut pas faire. Je suis devant le distributeur de café, je ne verse aucune larme, je réfléchis, je pense au passé, je ne fais que retourner dans ma tête la phrase de l’infirmière : « elle est condamnée… elle est condamnée… elle est condamnée… ».

Je n’ose plus m’approcher de sa chambre, de peur de la voir pour la dernière fois. Mais je sais qu’il faut que je sois près d’elle, je savais que ce moment devait un jour ou l’autre se produire mais pas maintenant, pas ici ! Ça ne sera jamais le bon moment, jamais le bon endroit de toute façon. Après tout ce temps passé à m’occuper d’elle, je ne suis pas prête à la laisser partir, et pourtant je me suis battue… J’avance tout droit sans le vouloir, mes pieds m’emmènent vers sa chambre, son lit toujours bien fait, sur lequel elle est couchée. Elle ne me regarde même plus, elle ne s’alimente plus.

Près de dix ans se sont écoulés depuis cette fameuse tornade de 1999, qui a tout balayé sur son passage, y compris ma joie de vivre. Cela fait dix ans qu’elle ne marche plus, qu’elle me laisse dans l’ignorance, et cela fait dix ans que je ne me considère plus comme une enfant. C’est à partir de ce moment là que tout a changé dans ma vie, et que ma vie… a cessé de vivre. Au début je ne comprenais pas, je ne la comprenais pas, je pensais qu’elle faisait semblant, et que c’était normal. Après la tornade, j’ai compris, la réalité m’a giclé au visage et depuis, je ne vis plus que pour elle, et pour sa maladie.

Je suis face à la porte de la chambre, tétanisée par l’image que je verrai : celle de son visage raide succombant à ces derniers souffles… Tu étais ma vie… Pourquoi j’attends ? Elle est là ! Avance ! C’est trop dur ! Je hurle de souffrance ! Ah ! Mon Dieu ! Ma vie est derrière cette porte ! Si elle n’est plus là, je n’ai aucune raison d’exister, de respirer, elle me donne ce courage même avec tout ce que j’ai enduré… Je franchis cette porte, je pleure pour la première fois depuis dix ans, plus que des pleurs des sanglots… Dix ans… Je lui tiens la main, je la serre très fort, je n’ai plus peur de lui faire mal, non, même ses yeux ne s’ouvrent plus, est-ce qu’elle sait que je l’aime d’un amour décadent ?

Chaque battement de son cœur est comme une pointe enfoncée de plus en plus loin dans mon corps partout (je n’en peux plus, je savais tout ça)… Ma main, elle a serré ma main ! Je n’y crois pas, mon espoir revient, je me sens mieux, je me sens libre, plus rien ne me fait mal maintenant. Je veux l’embrasser, la prendre dans mes bras. Je n’entends même pas les infirmières derrière moi, qui me supplient de la lâcher… Je le fais, passe un regard circulaire sur elles. Elles ne comprennent pas mon enthousiasme, je crie : «  elle m’a serré la main c’est un miracle ! » Je suis comme folle. Mais les deux infirmières me disent que non, le temps était venu pour elle, ce n’était pas vraiment elle qui m’a serré la main mais juste un réflexe, elles sont vraiment désolées… Elles me présentent leurs condoléances les plus sincères. Je les repousse, je regarde l’écran vide de ses battements de cœur, ce ne sont plus des piques, c’est une ligne : elle est morte…

Trouver sans fin des carreaux
Découvrir un sourire vide, infantile, décoloré
Partir vers des pointes symétriques.
Ouvrir une montre hermétique,
Arrêter le temps
Des lacets grisés par personne
Noués autour de tes pieds.
Une crêpe sur le sol
Encore chaude, colorée
« Au revoir » est écrit à l’envers
Coloré par des larmes sans compter
Une soif rare, linéaire
Plaquée sur toi…

Ma vie se résume à ce poème, écrit… Il y a dix ans déjà…

Cela fait un mois qu’elle est morte, je l’ai enterrée, il n’y avait que moi ce jour-là, je ne connaissais personne.

C’était ma sœur après tout… Partie en voyage sans laisser d’adresse…

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© Ksénia C. (Lycée en Forêt, Montargis, France. Décembre 2009).
Creative Commons License
“C’était ma sœur après tout” par Ksénia C. Ce texte est mis à disposition selon les termes de la licence Creative Commons Paternité-Pas d’Utilisation Commerciale-Pas de Modification 2.0 France. La diffusion publique sur un autre support n’est autorisée qu’après accord de l’auteure.

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Crédit iconographique : toutes les images sont librement inspirées de toiles de Gustav Klimt, recolorisées et retouchées numériquement.

Les élèves ont du talent… Lire en ligne : “La Balançoire” par Janyce M.

“Et si c’était un jour leur premier roman?”

Tel pourrait être le titre de cette nouvelle rubrique proposée par les élèves de Seconde 18 et Seconde 7… Au départ, un exercice tout à fait “classique” : rédiger le début et la fin d’un roman… Les élèves les plus assidus à la tâche se sont pleinement investis dans ce challenge : travaillant et retravaillant les manuscrits, corrigeant la grammaire, revoyant la syntaxe, précisant le lexique et surtout s’attelant à la grande question du “style”, afin de proposer la première ébauche de ce qui pourrait bien devenir un jour leur “roman”. Le cahier de texte électronique est fier de vous proposer la lecture de ces textes tous inédits. Même s’il s’agit des premières pages et des dernières pages d’un possible livre, les manuscrits peuvent se lire comme une nouvelle…
Bonne lecture !

Découvrez le manuscrit

« La Balançoire »

par Janyce M. (Seconde 18)

               

(incipit)

16h45. Regarde toi ! Et que vois-tu ? Un con. Un con accoudé à sa fenêtre, un con fumant sa clope.

Regardez, admirez mon royaume ! Mes yeux se perdent une nouvelle fois dans ce spectacle répugnant, cette petite représentation quotidienne qui me rappelle l’enfer dans lequel je vis. Mon regard se pose sur le ciel. Soupir de lassitude. Nouvelle clope. Le ciel n’existe pas, pas chez moi. Là où je vis, ce n’est qu’une mélasse terne. Je peux voir la ville entière d’où je suis. Je peux voir les usines cracher leur fumée, cette fumée qui rend notre ciel si triste, sans fond, sans forme, sans nuages pour rêver. Je peux voir les habitants vomir leurs saletés, leurs détritus. Je suis en overdose. Une overdose de cette ville dégueulasse. Un profond dégoût, une nausée constante.

Mais il y a l’océan. J’aime bien l’océan. Malheureusement, on ne le voit plus. Il est caché par de nouvelles habitations, toujours plus hautes, plus nombreuses … Cubes de béton. Je suis asphyxié.

C’est dégueulasse !

J’aimerais m’évader, m’en aller de cette foutue ville. Voilà pourquoi j’ai décidé d’écrire un livre. Un livre qui parlerait d’une île, enfant de l’union de l’océan et du ciel. Il y aurait enfin un ciel ! Un beau ciel azur rempli de moutons blancs. On y verrait des mouettes voler … Oui, de belles mouettes ! J’irais m’y installer … Et comme seul bagage à main : mon rêve d’ailleurs. Je n’ai besoin de rien d’autre. Je veux être loin d’ici ! Loin de cette ville de merde. Loin de ces usines dégueulasses. Je serais sur mon île … Oh oui …

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«Pourquoi tu pleures ? Merde alors ! C’est honteux de pleurer ! Essuie-moi ces larmes tout de suite !» Je reprends possession de mon corps. Mes voix intérieures se sont tues. Je passe machinalement la main sur ma joue mal rasée et je m’aperçois que je pleure … Je prends une autre clope. D’ailleurs … Si je commence à écrire, j’arrête de fumer. La clope, c’est mauvais. Je jette le paquet à la poubelle. Envie de tout jeter à la poubelle. La ville aussi. C’est un nouveau départ.

Je me lève, quitte ma fenêtre. Soupir de celui qui n’a rien à perdre. Je m’installe, un paquet de feuilles jaunies par le temps devant moi. Je prends mon stylo. Ma main tremble. Enfin… Enfin… La pointe de mon stylo effleure la feuille… Quelle jouissance ! Quel bien-être ! Je… Je…

Ma main se crispe. Mon poignet aussi. Tout mon corps se fige. J’entends mon cœur. Résonance sur peau de tambour. Tendu. Mes yeux coulent une eau tiède. La feuille reste vierge. Vierge de mots, mais inondée de sentiments … Espoirs, doutes, tristesse, déception et toujours cette impuissance amère. Alors la rage. Je lance ma chaise contre le mur. Chaise brisée. Je jette mes feuilles et mon stylo par la fenêtre. Je m’assois sur mon lit en plongeant mon visage dans mes mains.

Je ne sais pas écrire.

Je dors. Je rêve. Nuit et jour. Je pense que je suis tombé malade, à cause de la fenêtre qui ne se ferme pas complètement. Je reste dans l’obscurité. Comme ça, pas besoin de fermer les yeux sur le monde, je peux les garder grands ouverts, ils restent aveugles.

«Merde ! Mais qu’est-ce qui te prend ? T’abandonnes ? T’en as dans les tripes, non ? Tu le veux ce livre ! Alors debout ! Lève toi ! ALLEZ LÈVE-TOI !»

Je me redresse. Maladroit. Je m’habille. Je regarde par la fenêtre. Il neige. J’enfile ma petite veste de coton, la seule que j’aie. Je sors. Le vent est glacial. Pas ma volonté.

Je ne sais peut-être pas écrire, mais je ne suis pas un nullos. Faut que je me fasse aider.

(excipit)

16h45. Ça pourrait être une heure de départ d’avion, de train, de retrouvailles, de réunions. 16h45, c’était bien car c’était déjà la journée bien entamée, avec une soirée en perspective en plus. 16h45, ça voulait dire la vie qui a bougé, travaillé, marché, cuisiné, parlé, ri, partagé, lu, réfléchi, pleuré peut-être aussi … 16h45, c’était des heures déjà ben remplies depuis le matin. Mais ça, c’est le 16h45 des autres.

Mon 16h45 à moi, ça a été du vent. Et là, j’ai froid. Je suis fatigué, las. Ce que j’ai fait n’a servi à rien : rien, nada. Mon livre, oui, je l’ai écrit. Mais pas tout seul. Avec plein de rencontres qui ont posé sur mes feuilles mes obésités d’espoirs. Et puis, quoi ? J’ai balancé mes tripes, mais ma vie est la même. Peut-être à balancer elle aussi ?

Je vomis ma nicotine. Je tousse, je crache, je m’arrache les poumons depuis que j’ai repris la clope. Après l’envol de mon livre et sa fin, j’ai chuté : le décalage entre mes rêves et la réalité m’a fait faire le grand écart. J’ai chuté et rechuté, avec la clope.

Les gamins d’aujourd’hui diraient que ma vie est glauque. C’est drôle, c’est ma mère qui trouvait que j’avais un beau regard glauque —ce bleu-vert indéfinissable de l’océan— disait-elle …

J’ai besoin d’air.

Je sors. Il neige. Je ne la sens pas. Je ne sens plus rien. Je marche. Droit devant moi. Le ciel pleure-t-il lui aussi ? Je marche entre les plaques de verglas, ces petits miroirs sur l’asphalte. Je peux sentir l’air salé d’ici. Inconsciemment, mes pas m’ont mené près de l’eau. J’aurai presque pu fermer les yeux pour y arriver. Je me sens plus calme. C’est comme si je retrouvais un vieil ami. Je m’assois au bout de la jetée. Je regarde l’horizon. Ou plutôt ce qui doit être l’horizon.

Je sens la présence d’un môme. Je ne vois que son short vert kaki, ses maigres rotules écorchées. Il s’est assis juste à côté de moi. J’ai rien à lui dire. Nos jambes pendent par-dessus l’eau. Il balance les siennes. Qu’est ce qu’il fout là, l’gamin ? Qu’est-ce qu’il me veut ? Il cause pas. Je fais celui qui ne l’a pas vu. Je regarde le fond de l’eau. Gris-bleu, vert-de-gris, bleu-marine et outremer, gris ardoise. Déclinaison. Nuances. Peut-être que j’en manque ?

Un cri de mouette déchire mon monologue intérieur. Je lève la tête et suit les arabesques qu’elle dessine. Le gamin a dû sentir que je revenais à la vie car il me dit :

«T’as vu la fumée là-bas, au-dessus de la grande usine ? On dirait un renard tu trouves pas ?

janyce_2.1260385728.jpgIl pointe son doigt vers le panache gris. Son doigt attend ma réponse. Un renard ? Comment il voit ça le gamin ? Oui … peut-être … Alors je réponds :

– On dirait que tu as raison, ça y ressemble.

Du coup, j’ai regardé la fumée autrement. C’est vrai, elle pouvait, comme les nuages, s’étirer sous le vent et jouer de notre imagination. Je me suis senti sourire : j’avais vu un dragon. Je regarde le gamin. Brun, des mèches lui tombant sur son regard vert, il m’offrait un sourire tout frais avec une dent de lait manquante. Est-ce que ce gamin a autant de rêves que j’en avais à son âge ? Le gosse fouilla dans sa poche arrière et en sortit un bout de papier. Il me le tendit :

– Dis, tu peux m’faire un avion ?

J’ai pris le papier. Je l’ai plié, déplié, replié. Je me rappelais mes geste d’enfance. J’y suis arrivé. Même qu’il était pas mal mon avion. Le gosse avait l’air ravi, lui.

Il a sauté sur ses jambes, l’a tenu au-dessus de l’eau, prêt à le faire voler.

– Et comment il s’appelle ton avion ?

– Point de Vue»

© Janyce M. (Lycée en Forêt, Montargis, France. Décembre 2009).
Creative Commons License
“La Balançoire” par Janyce M. Ce texte est mis à disposition selon les termes de la licence Creative Commons Paternité-Pas d’Utilisation Commerciale-Pas de Modification 2.0 France. La diffusion publique sur un autre support n’est autorisée qu’après accord de l’auteure.