« Brise Marine » de Mallarmé… Poème expliqué

 

Mallarmé : « Brise marine » (1865)
commentaire littéraire

TEXTE

Brise marine

 

La chair est triste, hélas ! et j’ai lu tous les livres.
Fuir ! là-bas fuir ! Je sens que des oiseaux sont ivres
D’être parmi l’écume inconnue et les cieux !
Rien, ni les vieux jardins reflétés par les yeux,
Ne retiendra ce cœur qui dans la mer se trempe,
Ô nuits ! ni la clarté déserte de ma lampe
Sur le vide papier que la blancheur défend,
Et ni la jeune femme allaitant son enfant.
Je partirai ! Steamer balançant ta mâture,
Lève l’ancre pour une exotique nature !

Un Ennui, désolé par les cruels espoirs,
Croit encore à l’adieu suprême des mouchoirs !
Et, peut-être, les mâts, invitant les orages,
Sont-ils de ceux qu’un vent penche sur les naufrages
Perdus, sans mâts, sans mâts, ni fertiles îlots…
Mais, ô mon cœur, entends le chant des matelots !

Poésies

Joseph Mallord William Turner, « Le Dernier Voyage du Téméraire » (1839)
Huile sur toile, Londres, National Gallery

 

COMMENTAIRE LITTÉRAIRE

          C’est en 1865 que Stéphane Mallarmé rédige, dans le sillage des Fleurs du Mal de Baudelaire, un poème qui fera date : « Brise Marine ». Publiée un an plus tard dans Le Parnasse Contemporain, cette œuvre de jeunesse traduit l’impossible quête de l’absolu qui hanta Mallarmé toute sa vie. Nous étudierons cette problématique selon une triple perspective : après avoir expliqué que le poème se présente comme une opposition entre le monde des réalités et de la banalité quotidienne qui est celui du spleen, et l’appel de la mer qui traduit la soif de l’idéal et du voyage, nous essaierons de montrer que ce divorce entre la vie et l’art, dans la perspective symboliste, débouche sur une réflexion essentielle quant au pouvoir évocateur de la poésie.

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          S’écoulant sur un rythme monotone, le vers initial fait entrer dans le poème plusieurs éléments biographiques traduisant bien l’existence banale et le sentiment de déchéance qui s’empare de l’âme du poète : « La chair est triste, hélas ! et j’ai lu tous les livres ». Cet ennui profond de la vie est tout d’abord suggéré par le présent gnomique, en forme de sentence à valeur générale, employé dans le premier hémistiche. L’énoncé se présente en effet comme un témoignage du spleen et de l’insignifiance des relations conjugales, réduites à une sorte d’étalement dans la durée. À ce titre, la modalité assertive jointe à l’effacement des traces de l’instance d’énonciation renforce l’impression du lecteur d’être en présence d’une condamnation sans appel de la routine qui s’installe dans la relation de couple. La douleur et le doute métaphysique sont en outre  rendus particulièrement poignants par la tonalité élégiaque de l’interjection « hélas ». Nous pourrions d’ailleurs noter combien la symétrie constante, entre les deux hémistiches qui composent le premier vers, en renforce plus encore le pessimisme. À cet égard, l’impression d’avoir « lu tous les livres », par son aspect hyperbolique, joue de l’exagération des données objectives : Mallarmé a en effet dix-neuf ans quand paraît en février 1861 la deuxième édition des Fleurs du mal, ouvrage dont il subira à ce point l’emprise que tout autre livre lui paraîtra dénué d’intérêt. On peut donc déceler ici une très nette allusion à cette crise existentielle. De plus, le groupe verbal « j’ai lu », par sa valeur d’accompli du passé, confère à l’énoncé la dimension d’une formule définitive, sans appel. Cette lassitude extrême de l’existence, renforcée au vers 11 par l’addition d’une majuscule au substantif « Ennui », exprime encore plus par ce procédé de la personnification, le refus de tout lien social.

          C’est en effet par une triple négation structurée autour de l’adverbe « rien » que s’exprime dans la suite du texte l’arrachement du poète au néant et au vide par l’acte de la décision de partir : « Rien, ni les vieux jardins… ne retiendra ce cœur… ni la clarté déserte de ma lampe… Et ni la jeune femme allaitant son enfant. » Faut-il voir dans la métaphore in absentia des « vieux jardins » une allusion à la tragédie personnelle de Mallarmé due à la perte prématurée de sa mère en 1847, de sa sœur dix ans plus tard, puis de son père ? Sans doute peut-on affirmer que le comparé implicite est ici le cimetière, sous-entendu par l’image des « vieux jardins » qui connoterait l’inéluctable réalité de la mort. De façon plus générale, l’expression symboliserait aussi tout ce qui, dans sa vie passée, pourrait retenir l’auteur, à commencer par les lieux familiers et les possessions matérielles qui l’entravent dans sa quête de l’idéal. Comment ne pas être également surpris par le réalisme poignant de la deuxième image, qui ravive l’angoisse de la page blanche saisissant l’écrivain lors de son travail nocturne chez lui, dans la stérilité poétique et la solitude : la blancheur se réduit à la texture du papier sur lequel aucun mot ne vient s’écrire et qui reflète « la clarté déserte de [la] lampe ».  Par le biais de l’oxymore, le cliché romantique associé à la clarté lunaire est détourné de toute forme d’idéalisation comme en témoigne l’emploi inhabituel de l’épithète « déserte », chargée de connotations négatives : en opposition au « cœur qui dans la mer se trempe », c’est au contraire l’aridité, la sécheresse, l’impuissance à créer qui prédominent. On pourrait aussi évoquer dans ce refus du présent la condamnation implicite de la vie petite bourgeoise, guindée, étriquée même, que menait Mallarmé.

          Cette condamnation est d’ailleurs amplifiée par l’allusion à sa femme Marie au vers huit qui rejette tout autant l’idéal que le corps maternels dont l’auteur semble affirmer le caractère contingent. À ce titre, l’emploi du déterminant défini et du substantif (« la jeune femme »), l’un et l’autre à valeur générique, accentue plus encore par sa neutralité et son aspect généralisant, la crise affective que nous notions précédemment à propos du premier vers. De même, l’expression de « jeune femme » signale un recul, une prise de distance avec l’imaginaire social institué de la maternité. Au-delà de l’aspect proprement biographique, il conviendrait par exemple de remarquer combien l’allaitement, loin des clichés rattachant la mère et son enfant à des images de douceur et d’amour, s’associe au réseau lexical du vide et de l’aridité que nous remarquions à propos de la page blanche. À la stérilité de l’inspiration correspond la stérilité de la vie de famille. En contrepoint de ce sentiment d’échec existentiel, la métaphore du « cœur qui dans la mer se trempe » procède donc à la fois d’un appel à se libérer des vestiges du quotidien et d’une invitation à entreprendre le voyage rêvé qui est au cœur des ambitions métaphysiques du symbolisme : la manifestation de cette quête spirituelle est en effet suggérée par le symbole de « l’encrier de la mer » dont l’image presque visuelle du cœur qui s’y abreuve et s’y ressource, évoque l’absolue nécessité de fuir le monde pour aller à l’appel de l’inconnu.

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          Alors que la symétrie du premier vers césuré 6/6 évoquait la durée pesante d’une vie monotone,  l’imminence du départ est suggérée dès le deuxième vers par un alexandrin dissymétrique : le désir irrépressible de l’action et du voyage s’exprime d’abord dans le rythme heurté des premières syllabes : « Fuir ! là-bas fuir ! ». L’impératif à valeur de nécessité et d’ordre, ajouté au jeu des répétitions du verbe et à la tonalité exclamative du discours, donne au voyage la forme d’une impérieuse quête initiatique. En outre, le phrasé du texte oscille entre la répétition saccadée et haletante, et le souffle ample et régulier renforcé par l’enjambement en fin de vers : « Je sens que des oiseaux sont ivres / D’être parmi l’écume inconnue et les cieux ! ». Comme nous le voyons, les facteurs rythmiques sont essentiels car ils participent au sentiment de respiration et de souffle du voyage, par opposition à l’oppressant huis-clos du vers un. Mais si voyage il y a, c’est d’abord un voyage métaphorique, comme le suggère l’adverbe de lieu « là-bas », dans lequel il ne faut pas lire un sens géographique, mais une incursion dans une sorte d’ailleurs absolu auquel aspirait Baudelaire dans « L’Invitation au voyage ». Il s’agit donc d’un voyage vers un ailleurs indéterminé. À cet égard, la préposition « parmi » suivi du singulier « écume inconnue » au vers trois, implique l’idée d’une envolée dans l’infini : ce n’est pas un paysage maritime qui est représenté, mais un paysage pensé, façonné par le mystère de la langue, né d’une véritable fusion de l’homme et de l’univers, permettant de suggérer peu à peu, et conférant au réel force et pureté. Par ses connotations abstraites et spirituelles, le voyage au sens mallarméen ne se réduit donc pas seulement à une fuite « vers une exotique nature » (v. 11) : il est le signe d’une connivence avec l’invisible, ainsi que l’évoque l’image des « oiseaux ivres d’être parmi l’écume inconnue et les cieux ». Emporté vers le monde des essences, le poète partage avec les oiseaux la même ivresse comme le suggère le verbe « sentir » dont la signification équivaut à recevoir une sensation qui passe par la perception primordiale de l’être-au-monde, justifié d’exister.

          Cette expérience de légitimation au monde grâce au voyage est amplifiée aux vers neuf et dix : « Je partirai ! Steamer balançant ta mâture, / Lève l’ancre pour une exotique nature ! » Ici, la valeur d’imminence du futur peut s’interpréter comme un engagement, comme si Mallarmé s’obligeait lui-même, par le seul fait de le dire, à partir. Cette valeur modale, proche de l’impératif, est en outre renforcée par l’injonction donnée au steamer de lever l’ancre. Il faut cependant noter combien l’impératif catégorique qu’utilise Mallarmé pour s’adresser au navire comme s’il s’agissait d’une personne, pousse la décision de partir jusqu’au point de non-retour. Ce caractère de fatalité inéluctable du voyage s’apparente en fait à un exil, comme en témoigne au vers douze  le tableau déchirant de « l’adieu suprême des mouchoirs ». Toutes les connotations positives du départ semblent brutalement s’estomper au détriment de l’amertume de ne pouvoir réellement partir. C’est bien la résignation qui apparaît en effet dans ce distique : « Un Ennui, désolé par les cruels espoirs, / Croit encore à l’adieu suprême des mouchoirs ! » Sous cet angle, que peut espérer le poète en voyageant, sinon de nouvelles désillusions ? La suite du texte ne fait que dramatiser ce sentiment d’amertume. À l’image euphorique et pittoresque du « steamer balançant [sa] mâture » au gré de la houle, succède la vision désespérée du voyage qui se clôt sur un naufrage : « Et, peut-être, les mâts, invitant les orages / Sont-ils de ceux qu’un vent penche sur les naufrages ». On aura noté le changement de désignation du steamer, réduit à n’être que des « mâts ». Cette métonymie ne saurait se limiter à un simple instrument rhétorique, elle traduit en fait une quête vouée à l’échec de ne pouvoir partir réellement.

James Tissot (1835-1902), « L’adieu sur le Mersey » (Détail. c. 1880).
New York,
Forbes Magazine Collection.

          C’est au vers quinze que se creuse plus encore la corrélation du naufrage avec les velléités suicidaires de l’écrivain : « Perdus, sans mâts, sans mâts, ni fertiles îlots… » L’absence de relation fonctionnelle et de coordination entre les mots altère même la structure syntaxique de la phrase dont les coupes fiévreuses et saccadées (2/2/2/6) concourent à renforcer la charge émotionnelle. L’absence complète de tout secours est en outre suggérée par l’hyperbolisation de la scène, propre à peindre le désordre d’un esprit à qui le désespoir exagère tout. La répétition oratoire de l’expression « sans mâts » devient ainsi un signe de vide existentiel : renforcé par l’ellipse finale avec les points de suspension, le vers se clôt sur la mort et le néant, à travers l’image terrifiante du poète naufragé, prisonnier de la solitude et de la déréliction. Sur le plan biographique, on pourrait lire dans ce vers une très nette allusion à la grave crise métaphysique qu’a traversée Mallarmé un an plus tôt, et à l’issue de laquelle il cesse de croire en Dieu. Cependant, si le texte met en scène la mort du poète à travers l’épisode du naufrage, il s’agirait peut-être davantage d’un artifice, comme le suggère le dernier vers : « Mais, ô mon cœur, entends le chant des matelots ! » Cette priorité accordée à la dimension poétique du voyage est ici fondamentale : de fait, elle peut être mise en relation avec ces propos de Mallarmé  dans « Crise de vers »  : « L’œuvre pure implique la disparition élocutoire du poète, qui cède l’initiative aux mots ». Ainsi la feuille blanche engendre le « chant des matelots » suggéré par la matière sonore des mots mêmes. On pourrait donc voir dans ce chant, la purification du langage de toute présence de l’auteur : en cela réside pour Mallarmé la justification et la fonction de la poésie, dont le pouvoir évocateur permet précisément d’entendre « le chant des matelots »…

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          Comme nous le pressentions, ce serait mal comprendre le texte que de s’en tenir à l’échec du voyage. L’apostrophe suppliante du dernier vers peut être interprétée comme une volonté d’échapper à l’emprise du destin grâce à l’acte d’écrire, qui permet de dépasser la fatalité de la vie. Ce dernier vers, qui emprunte une image à Hugo (« Seul et triste au milieu des chants des matelots », in « À quoi je songe ? », Les Voix intérieures, 1837), et surtout sa matière au vers de chute du poème « Parfum exotique » (1857) de Baudelaire (« Se mêle dans mon âme au chant des mariniers »), n’est pourtant pas qu’une banale paraphrase : il est caractéristique d’une nouvelle esthétique qui traduit à la fois l’impossibilité du poète à partir mais bien plus la possibilité d’entendre « le chant des matelots », c’est-à-dire d’accéder à une réalité supérieure grâce à l’exploration des possibilités infinies du langage poétique, qui ouvre la porte d’un monde nouveau. Dans leur mépris de ce qu’ils nommaient « le monde des apparences », les Symbolistes ont en effet assigné d’abord à la poésie la recherche de l’émotion intellectuelle, loin du monde réel. Culte du moi, égoïsme, diront certains, auxquels on pourrait objecter que c’est précisément par son refus des contingences et de l’Histoire que la poésie peut faire naître, dans sa plus intime singularité, la volonté d’une recréation du langage qui va ouvrir la voie à une poétique nouvelle, plus abstraite et conceptuelle. Le dernier vers de « Brise marine » peut donc être interprété comme une ultime invitation au départ vers un ailleurs absolu. Cherchons-en une preuve dans cet autre vers célèbre du « Tombeau d’Edgar Poe » de Mallarmé : la poésie selon lui doit « donner un sens plus pur aux mots de la tribu ». Les « mots de la tribu », c’est le langage ordinaire, la prose commune qui en aurait galvaudé le sens poétique profond en le réduisant au code commun, irréductible à la plénitude de l’être.

          Ce culte d’un renouveau métaphysique et mystique, amplifié par le refus de la vie quotidienne dans son conformisme banal, conduit donc Mallarmé à faire du voyage une métaphore de l’inspiration, et du poème une « alchimie du verbe », pour reprendre une formule chère à Huysmans dans À Rebours. Ce terme d’inspiration doit ainsi s’entendre en son sens le plus fort, comme souffle divin qui révèle à l’artiste l’œuvre dans toute sa splendeur : le voyage mallarméen est d’abord un voyage spirituel, qui symbolise une aventure et une recherche, comme le suggère si bien cette expression du vers cinq : « Ce cœur qui dans la mer se trempe » : devant le poète alchimiste, la matière s’est faite or ; le cœur, trempé dans la mer, se libère de tous les éléments contingents pour accéder à la quintessence du Verbe. Il serait à cet égard intéressant de revenir sur les vers deux et trois que nous avons analysés dans notre deuxième partie : « Fuir ! là-bas fuir ! Je sens que des oiseaux sont ivres / D’être parmi l’écume inconnue et les cieux ! ». À la lecture de ce distique, on a l’impression que les mots ne sont pas pris selon l’acception que leur attribue le sens commun. Cette ivresse extatique, intellectuelle et sensorielle dont parle Mallarmé passe par la négation de la chair (v. 1), de la réalité et de la temporalité (v. 4-8) pour toucher l’infigurable suggéré par les oiseaux « ivres » et « l’écume inconnue » : ce vertige du néant et de l’absence est très caractéristique de la poétique mallarméenne, qui semble complètement détachée du référentiel. Même l’image très suggestive du « chant des matelots » dans le dernier vers, très loin du chant trompeur des sirènes, fournit le substrat symbolique d’une quête intérieure et d’un parcours à la fois poétique, initiatique et spirituel.

          Dans son mépris du « monde des apparences », il  s’agit ainsi pour le poète alchimiste de ressusciter le sens profond du mot qui semble parler pour lui-même, en dehors de son utilisation courante. N’est-il pas dès lors possible d’envisager la poésie comme un art autonome, qui n’aurait d’autre fin que cette part formelle du langage qu’ont parfois à tort si souvent dénigrée les ennemis du Symbolisme ? On pourrait à ce titre rappeler utilement la définition qu’a proposée Roman Jakobson de la fonction poétique du langage : s’il mentionne que toute poésie est au départ contextuelle et référentielle, c’est pour souligner combien les effets rythmiques, les mots, leur agencement syntaxique, sont des éléments essentiels à l’imaginaire poétique. Si déstructuration du réel il y a, cette déstructuration procède d’une volonté de recréation et de découverte. Là encore, il faut rappeler l’importance chez Mallarmé (comme chez les Symbolistes) du signe comme déchiffrement : il s’agit en effet de redécouvrir ce que le signe veut dire, au-delà de son aspect immédiat et matériel : « le chant des matelots » conduit donc à la révélation d’un monde qui doit guider l’homme vers une connaissance spirituelle. Si l’ivresse du voyage aboutissait précédemment au naufrage, elle révèle en même temps l’homme à lui-même : l’expérience poétique aboutit ainsi à une « co-naissance », c’est-à-dire à une naissance qui exalte autant la création d’un nouveau monde que l’accès à un savoir renouvelé grâce à l’esprit de l’homme, magnifiquement symbolisé par « le chant des matelots ».

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          Au terme de ce travail, interrogeons-nous une dernière fois. Comme nous avons essayé de le montrer, « Brise marine » est une œuvre symboliste car sa lecture ouvre à un déchiffrement. Proclamant le pouvoir de l’esprit sur les sens, de l’art sur la vie, de la subjectivité sur l’objectivité, de l’imaginaire sur le réel, cette poésie du refus chante la quête de l’idéal grâce au pouvoir transfigurateur des mots. N’oublions pas que pour Mallarmé, chef de file des symbolistes, le travail poétique est la recherche d’un langage nouveau, celui qui, métaphorisant l’être et son être au monde, pourra restituer la recherche de l’absolu. Le voyage non réalisé devient alors une nouvelle source d’inspiration poétique : tel est le sens majeur qu’il convient d’attribuer à « Brise marine ». Le poème est en réalité une métaphore du voyage poétique, tant il est vrai que pour Mallarmé la poésie a pour mission première de révéler à l’homme une vérité spirituelle, abstraite, et non pas une vérité matérielle, concrète, forcément illusoire : le voyage vers un ailleurs infini et rêvé, même s’il s’apparente à une quête douloureuse de l’idéalité, est toujours un cheminement vers le lieu du voyageur…

© Bruno Rigolt, janvier 2013 (révision : janvier 2015)
Espace Pédagogique Contributif / Lycée en Forêt (Montargis, France)

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Paul Gauguin (1848-1903), Portrait de Stéphane Mallarmé (détail), 1891
Eau forte, Pointe sèche et burin sur cuivre. Bibliothèque de l’Institut National d’Histoire de l’Art, collections Jacques Doucet


© Bruno Rigolt, EPC janvier 2013__

Publié par

brunorigolt

- Agrégé de Lettres modernes - Docteur ès Lettres et Sciences Humaines (Prix de Thèse de la Chancellerie des Universités de Paris) - Diplômé d’Etudes approfondies en Littérature française - Diplômé d’Etudes approfondies en Sociologie - Maître de Sciences Politiques