Concours AMOPA 2013. Lire en ligne… Aujourd’hui la contribution de Romane : « Quelques miettes de sel et d'eau »

Concours AMOPA 2013
Thème : l’émerveillement

La classe de Seconde 9 a choisi de participer au concours d’expression écrite “Défense et Illustration de la langue française”, organisé par l’AMOPA (Association des Membres de l’Ordre des Palmes Académiques). Le thème choisi pour 2012-2013 était l’émerveillement. Étant donné la qualité des écrits (une élève de la classe est même lauréate du premier prix), j’ai décidé de mettre en ligne sur ce site l’ensemble des productions. Aujourd’hui, découvrez le travail de Romane…
Bonne lecture. BR

          

Autres textes publiés :
– Lucie M. (Lauréate académique, premier accessit départemental) : « Près de l’étang du parc »
– Amélie S. (Lauréate académique, deuxième accessit départemental) : « Dans la nuit du monde »
– Léna G.-S. (Premier prix national) : Composition française à partir d’une citation d’Einstein

            

Quelques miettes de sel et d’eau…

Par Romane G.
Classe de Seconde 9

Vous parlez d’un affolement matinal ! Un jour comme les autres plutôt, un jour banal, monotone, un jour à se lever pour aller au lycée. Comme d’habitude, je m’habillai rapidement, enfilai mon blouson et me précipitai dans la rue, pour courir vers mon destin, mon cartable dans une main et une moitié de pomme dans l’autre.

Je marchais d’un pas décidé, lorsque je vis au tournant de la rue une petite fille donner un morceau de pain sec aux moineaux qui « piétonnaient » dans les rues de la ville. Elle émiettait ce pain consciencieusement, minutieusement, comme s’il se fût agi d’un acte grave et solennel et de ses petites mains potelées, elle prenait la mie, la malaxait brutalement, avec vigueur et la lançait sur le trottoir pavé sur lequel elle se trouvait. Je continuais ma course, me rapprochant de cette boule d’énergie. La fillette ne me voyait pas, et dans le lyrisme de ce petit matin frileux de novembre elle s’épanouissait toute seule, indifférente aux regards des passants.

Une scène banale me direz-vous, merveilleusement banale. C’est un conte bien ordinaire que ce quotidien d’un morceau de pain jeté aux oiseaux dans le jour qui s’éveille. Et pourtant… Dans ces petits morceaux de pain, répandus sur l’asphalte comme on sème une récolte pour l’hiver prochain, moi je voyais les champs de blé, et les oiseaux qui attendaient une miette pour espérer voler jusqu’à demain.

Longtemps, j’ai songé à cette image, et à ces morceaux de pain que l’on jette tout aussi machinalement que cette enfant qui les donnait aux oiseaux. Malgré moi, je me disais que le pain est source de vie, bénéficiaire des richesses de la Terre. Le pain n’est-il pas d’ailleurs l’emblème de l’amitié ? Avoir un bon « co-pain », n’est-ce pas celui avec qui l’on partage le pain, c’est-à- dire un aliment apte à restituer à l’homme sa valeur et sa dignité ?

Le soir, rentrée chez moi, je m’installais autour de la table, et sur celle-ci régnait une panière pleine. Je crois bien que, d’avoir été émerveillée par ces simples morceaux de pain le matin même, faisait que je ne concevais plus le pain de la même façon. Je n’avalais plus machinalement le crouton de pain chaud, j’appréciais bien plus que le reste du monde, avec un merveilleux plaisir, ce qui était d’abord le pain de la vie, le pain de la terre et du ciel.

Le lendemain, à la cantine je pétrissais malgré moi une mie de pain… Dans ma main, un peu de farine, quelques miettes de sel et d’eau. Et quelques plumes égarées…

© Romane G.
Février 2013 (mai 2013 pour la présente publication)

Illustration : Jean-François Millet (1814–1875), “Le Semeur” (1851). Pastel sur papier.
Williamstown, Massachusetts (États-Unis), Clark Art Institute

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Publié par

brunorigolt

- Agrégé de Lettres modernes - Docteur ès Lettres et Sciences Humaines (Prix de Thèse de la Chancellerie des Universités de Paris) - Diplômé d’Etudes approfondies en Littérature française - Diplômé d’Etudes approfondies en Sociologie - Maître de Sciences Politiques