Un Automne en Poésie, Saison 8 Sixième et dernière livraison

Fin de l’exposition « Un Automne en Poésie »
— Saison 8 —


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Maquette graphique : © Bruno Rigolt, décembre 2016. Peinture numérique et photomontage (Ikeda Zuigetsu).

Les élèves de Seconde 13 sont fiers de vous présenter l’édition 2016-2017 d’Un automne en poésie. La thématique retenue cette année invitera à réfléchir au rapport intime qui existe entre le réel et la manière dont la poésie parvient à transcender la réalité pour faire naître du banal et de l’ordinaire ce qui n’est pas, et qui pourtant est : la poésie, c’est le jeu de la métamorphose et du voyage des mots : voyage extraordinaire, voyage lointain vers des mondes où l’écriture donne sens à la Vie…

Voici la sixième et dernière livraison de textes de la saison 8
d’« Un automne en Poésie ».

Pour ce millésime 2016, plus de cinquante poèmes ont été publiés, souvent de très grande qualité. Bravo aux élèves de Seconde 13 pour leur participation enthousiaste. Vous pouvez retrouver tous les textes de la saison 8 en cliquant sur les liens suivants :
Première livraison ; Deuxième livraison ; Troisième livraison ; Quatrième livraison ; Cinquième livraison

Un oiseau a chanté

par Vincent P. et Alexandre G.
Classe de Seconde 13

Un oiseau a chanté. Le monde tremble ;
Il exécute la valse fantôme de la guerre.
Quand l’odeur de la mort
Rencontre le rythme des heures,
Le chant des balles brise la vie de tout amour
Par un silence que l’on ne pourrait taire.

Un oiseau a chanté. Mon cœur meurt à chaque instant
Je regarde ce ciel bleu parmi tant de tristesse
Et devant la mélancolie du monde,
Je ne peux résister à l’appel de l’au-delà.
La souffrance en apparence silencieuse
Suscite une explosion de cris et de douleur.

Toutes ces âmes condamnées
Ce monde en ruine dégradé par la haine,
Sous le regard d’un soleil mourant
On n’attend plus que le jugement.
Le soir tombe sur mes sentiments,
Le regard vide de la guerre me remplit de larmes.

Les ténèbres se referment sur mon cœur meurtri.
Un oiseau a chanté dans le jour qui s’achève ;
Il est plus facile de faire la guerre que la paix.
Le bonheur est une idée fausse
Mais c’est la mort
Qui est dénuée de sens.
_________

marc-riboud_la-fille-a-la-fleur_magnum_photos« Le regard vide de la guerre me remplit de larmes… »

Illustration : © Marc Riboud (1923-2016), « La Fille à la fleur », 1967. Magnum Photos

Anima

par Camille B.
Classe de Seconde 13

Le chat est un mammifère carnivore dont il existe des espèces enchaînées −ainsi le chat gris d’amour, retenu par le fouet mécanique−, et une espèce libre qui voyage d’astre en astre vers les roses de la vie.

Ses pensées nuagent à travers la montagne brisée des souvenirs d’enfance.

Lorsque la lune bleue pleure l’être aimé, le vent chargé des senteurs de l’amour diffuse l’attachement englobant du chat gris près de la cheminée. Alors la tristesse  et la mémoire de deux personnes s’unissent dans le soir, et le vent ne souffle plus ; et les larmes ne coulent plus ; et la nuit se faufile doucement entre les volets.

Tel un poison dans l’eau, les écailles du fouet détruisent et altèrent les fonctions vitales de cet être animé, dépourvu de haine.

Le chat s’en est allé dans la nuit. Le fouet vulgaire ayant d’autres chats à fouetter, laissa sur sa langue un goût de liberté…

Découvrez d’autres poèmes de Camille :
« Pendant que des anges » ; « À la Une » (en collaboration avec Aurore P.).

camille_b-1« Le chat s’en est allé dans la nuit.
Le fouet vulgaire ayant d’autres chats à fouetter, laissa sur sa langue un goût de liberté.
.
. »

 Illustration : © décembre 2016, Camille B. (aquarelle)

 

Le point de vue de l’auteure

Le point de départ de ce texte a été mon engagement pour la cause animale, notamment les violences qu’on inflige aux animaux, comme le suggèrent les allusions aux fouet. Mais très vite, la lecture de quelques poésies du Parti pris des choses de Francis Ponge m’a donné envie de rédiger un poème en prose dans lequel je pourrais jouer avec le référentiel. En m’appuyant sur cet animal du quotidien qu’est le chat, j’ai ainsi pu faire une sorte d’éloge de l’ordinaire et restituer à ma manière la présence du réel.

Un peu comme si la « grande » poésie s’effaçait pour s’inscrire dans le quotidien et l’éloge de la merveilleuse banalité : un chat près de la cheminée, la nuit qui passe entre les volets. Mais le chat dans le texte est également chargé de connotations fortes. À la manière de l’albatros baudelairien, il est une allégorie du poète fuyant la société (« le fouet vulgaire ») en quête d’idéal et de liberté : ainsi, « ses pensées ‘nuagent’ à travers la montagne brisée des souvenirs d’enfance » : voyage poétique « vers les roses de la vie »…

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Maman

par Syrilia Z.
Classe de Seconde 13

 

Partie trop tôt, trop vite
Sans même une once d’espoir avant la fuite.
Où est-il à cette heure
Ce qu’on appelle Bonheur ?
Même la lumière de la nuit n’éteint plus mes pleurs.

Ses joues de pureté caressent encore ma main ;
Et mes lèvres, son front.
Mes doigts cascadent le long de ses cheveux.
Je le respire encore, son parfum ;
Mélange de fleurs et d’Orient.

Son corps est présent
Mais son âme elle, nage dans le vent
À travers ciel.
La nuit s’endort à présent,
Le jour ouvre les yeux : bonjour Maman !

Janmot le vol de l'âme« Son corps est présent
Mais son âme elle, nage dans le vent
À travers ciel. »

Illustration : Louis Janmot (1814–1892), Le Poème de l’âme, « Le Vol de l’âme » (détail).
Lyon, Musée des Beaux-Arts

Dernière pensée

par Camille B.
Classe de Seconde 13

 

Le silence coupe court
À ces rumeurs insatiables.
Dans ta tête le martèlement :
Les rires, les moqueries. Tu deviens
Le vide. Les pensées bleues
Se fanent. Le miroir
Reflète le « je » imparfait
Vilenie des enfants
Ne sont que des coquilles vides sans vie
Il ne fait pas si froid
Plus qu’un pas…

Banc en hiver_Bruno Rigolt« Il ne fait pas si froid
Plus qu’un pas…
 »

Illustration : © 2013 « Banc en hiver », Bruno Rigolt

Quatre saisons

par Gabrielle M.
Classe de Seconde 13

Le printemps déploie ses ailes
La neige se métamorphose en pluie
Et laisse revivre la Terre.
J’attends l’été en regardant
Le cerisier éclore d’un rose tendre.

Viendront les saveurs
Des fruits sucrés et juteux,
L’Opéra des abeilles autour des fleurs.
Et je mangerai ces cerises
En attendant la mort des feuilles.

Siège maintenant l’automne.
Saison de repliement pour la nature
Et d’éclosion pour moi.
La forêt se déchlorophyle et s’épuise à faire des rêves,
Je marche sous la douceur automnale,
Et je regarde le cerisier se démunir de son feuillage.

Voici venir l’hiver.
Une vague de silence engloutit la Sphère.
On s’enferme, la faune hiberne
Je songe à tout ce cycle qui s’achève.
Et je regarde mon cerisier qui, bientôt,
S’épanouira en bourgeons…

katsushika-hokusai_bouvreuil-et-cerisier-pleureur-1834_estampe-nishike-e_musee-guimet-paris« Et je mangerai ces cerises
En attendant la mort des feuilles… 
»

Illustration : Katsushika Hokusai, « Bouvreuil et cerisier pleureur », 1834, estampe nishike-e
Paris, musée Guimet

            

                  

Terre de sang

par Élina V.
Classe de Seconde 13

             

Dans un silence de tombe
Inerte. Gît le soldat.
Au loin, tombent les bombes
Sillonnent le ciel
Telles des anges noirs.

Hideuse passion envolant
Les âmes. La grande faucheuse
Berce dans ses bras
Les souffrances
Du soldat.

Oh Carnage ! Oh destruction !
Torpeur invisible. Voici le champ
Sanglant des soldats sans tombe
Vie entourée de barbelés
Terre calcinée.

La guerre rayonne
De son malheur noir
Et au milieu des cris silencieux
Dans un silence de tombe
Inerte. Gît le soldat.

Marcel Gromaire_La Guerre« Oh Carnage ! Oh destruction !
Torpeur invisible. Voici le champ
Sanglant des soldats sans tombe… 
»

Marcel Gromaire, « La Guerre« , 1925
(Musée d’art moderne de la Ville de Paris)

            

                  

Une fraction de seconde

par Vincent P.
Classe de Seconde 13

             

Quand la nuit se lève,
Je me plonge dans la voie lactée
De la lumière comme s’il en pleuvait !
Cette pluie si légère et inaudible.
Je vois les larmes de la nuit
Tomber goutte à goutte, couleur de diamant
Inspiration magique pour le poète.
Quand l’une de ces étoiles tombe
Elle entraîne avec elle un déluge de feu
Pareil à la plume du grand Phénix
Gouttes étincelantes ; Poudre magique.
Soudain l’étoile repart dans le noir
Étoile filante, étoile fuyante
Étoile de diamant éphémère
Mais brillante cependant,
Faible lumière parmi ce monde obscur.

van-gogh_nuit_etoilee_1888« Je vois les larmes de la nuit
Tomber goutte à goutte, couleur de diamant
Inspiration magique pour le poète... 
»

Vincent Van Gogh, « La nuit étoilée sur le Rhône » (huile sur toile), 1888.
Paris, Musée d’Orsay

Vérité inavouée

par Marie D.
Classe de Seconde 13

Vérité inavouée  : nombreux sont-ils à décrire la liberté
Comme une course démesurée et esseulée
Solitude qui fait de son cœur ce vagabond errant qu’il est,
Indépendant mais dépendant de cette liberté.

Elle veut sortir jusqu’à pas d’heure pour la consumer
Ne pas rentrer pour enfin avoir l’impression d’exister
Un jour elle a fini par ne plus y croire,
Commencé à jurer sur tous ceux qui ressemblaient à l’espoir noir

Est-ce votre problème si elle arrête de respirer ?
Si elle se lanterne dans ses songes passés ?
Pour se laisser assassiner par le temps ?

Elle veut être aussi belle qu’une poubelle,
Déraisonner sur les quais du métro
Pour se dire que le monde n’est peut être pas si beau…

munch_le-cri_detail.1297078383.jpg« Solitude qui fait de son cœur ce vagabond airant qu’il est… »

Edvard Munch (1863-1944), « Le Cri » (« Skrik », 1893, détail).
Oslo, Nasjonalgalleriet

ELLE

par Emily D.-N.
Classe de Seconde 13

ELLE, une histoire aux multiples couleurs,
Dont on ne comprend pas toujours le sens.
On peut la voir en rose ou en noir,
La vie ne tient qu’à un hier

Sur cette immense planète parmi des milliards
D’étoiles, je ne suis que poussière
Alors qu’Elle, est l’Univers !
La vie ne tient qu’à un murmure

Si son fil est de soie,
Tout s’écroule pour moi,
Mais si son fil est de fer
La vie ne tient qu’à un sourire

Pourquoi, pour certains,
ELLE est si cruelle ?
Et pour d’autres si belle
Je ne veux qu’ELLE

Toute noire ou rose. Je prends donc mes couleurs,
Mes rêves et mon pinceau,
Afin de peindre un joli tableau arc-en-ciel
Qu’on appelle la Vie…

« Si son fil est de soie,
Tout s’écroule pour moi…
 »

Photomontage et peinture numérique (© BR)

Automne

par Jessica F.
Classe de Seconde 13

Parti l’été puisque je connais
Un arbre qui est dénudé
Car pendant l’automne
Les feuilles sont tombées

Pluie de feuilles jaunes, larmes de feuilles rouges
Les feuilles orangées annoncent la fin de l’année
Les champignons se baladent
Dans la forêt tropicale

J’allume la cheminée
Pour passer une meilleure soirée
Le vent se repose parmi le soir
Puis l’hiver arrive à petits pas.

« Pluie de feuilles jaunes, larmes de feuilles rouges
Les feuilles orangées annoncent la fin de l’année…
 »

Illustration : © Bruno Rigolt

Pensées lointaines

par par Élina V. et Gabrielle V.
Classe de Seconde 13

Tombent, tombent, les heures orangées
Le temps m’échappe comme les plumes de l’arbre
Le vent souffle emportant mes pensées lointaines.
Même le soleil s’est noyé dans l’oubli

Quand pourrais-je revoir la vertitude de l’été ?
La froideur de la nuit s’écrase sur le monde
Ma chute se prolonge et le soleil me fuit
Je me terre dans mes pensées ne sachant que faire

Volent, volent, écureuils de l’automne
Le sol craque sous mes pas
Le temps s’arrête, la bleuitude du soir se réveille
Je m’endors, et le chêne apparaît.

Nikifororvitch Vorobiev Maxim, "La Tempête- le chêne foudroyé" (1842) « La froideur de la nuit s’écrase sur le monde
Ma chute se prolonge et le soleil me fuit… »

Nikifororvitch Vorobiev Maxim, « La Tempête- le chêne foudroyé » (huile sur toile, c.1842)
Moscou, Galerie Tretiakov

Nuit de Venise

par Sylvain H.
Classe de Seconde 13

Des âmes diaphanes
Errent dans la pénombre
du fleuve profane.
Et sur la rive, pour seul vestige,
Des palais en ruine
Et leur lointain prestige.
Fantômes oniriques
Dans leur royaume éphémère,
Des gémissements cadavériques.
Sous le masque, l’épine du désespoir
Plongea dans le pourpre si noir
Le cœur d’amour vénéneux,
Du prince vénitien des malheureux
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les-lumieres-de-venise_masques_32_web« Dans leur royaume éphémère,
Des gémissements cadavériques.
Sous le masque, l’épine du désespoir…
 »

Illustration : © Bruno Rigolt,  février 2015, « Le carnaval de Venise »

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L’apprentissage du monde

par Chancelie G. et Léa T.
Classe de Seconde 13

De ligne en ligne
J’apprends les caractères
Comme j’apprends à me connaître.
Les syllabes se mélangent dans mon être
Et ainsi forment
Des sons au sens étrange
Que puis-je apprendre de tous ces mots ?
Que puis-je apprendre de tous mes maux ?
C’est dans le silence tourmenté
Que le Verbe m’apporte la paix
J’apprends la seule vérité :
« Tout n’est qu’un ».
C’est au sommet des montagnes enneigées
D’orage et de vent vêtu
Que mon cœur s’adonne à une danse infidèle
Le monde est un tableau brisé
Et j’en suis un fragment.
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statue_egypte_fragment« Le monde est un tableau brisé
Et j’en suis un fragment…
 »

Illustration ; fragment de statue brisée (Égypte, c. 1353-1336 av. J.-C.).
New York,
The Metropolitan Museum of Art

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La numérisation de la sixième livraison  de textes est terminée.

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